Une équipe spéciale de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) a été mise sur pied pour lutter spécifiquement contre la traite de personnes à Montréal, une ville parfois considérée comme la capitale du tourisme sexuel en Amérique du Nord.

Le ministre fédéral de la Sécurité publique et de la Protection civile, Steven Blaney, a annoncé hier la création de cette équipe spéciale, qui comptera une douzaine d'enquêteurs de la GRC, et qui sera dotée d'un budget annuel de 2 millions de dollars.

«N'ayons pas peur des mots: la traite des personnes n'est rien de moins que l'esclavage moderne. C'est un crime où on prive les victimes de leur dignité, on peut aller jusqu'à leur retirer leur propre identité, les inclure dans des réseaux de drogue et de prostitution et les exploiter de façon inimaginable», a indiqué M. Blaney.

Coup de pouce à Montréal

Le ministre s'engage par ailleurs à «appuyer les efforts de la Ville de Montréal et du maire Denis Coderre», qui a promis, en novembre, de s'attaquer aux salons de massage érotique en resserrant les règles d'attribution de permis et en imposant des amendes salées aux contrevenants.

«Ce sont de nouveaux phénomènes, on doit s'adapter, a dit le ministre Blaney. Nous, nous allons attaquer l'angle de l'exploitation des femmes. Ces filles sont prises dans un engrenage infernal.»

L'étau se resserre donc un peu plus autour des quelque 260 salons de massage érotique qui ont pignon sur rue à Montréal. Ces établissements illégaux, qui ont largement remplacé la prostitution de rue dans la métropole, sont propices à la traite de femmes vulnérables, migrantes ou mineures.

En ce moment, chaque cas de traite ou d'exploitation sexuelle exige la tenue d'une enquête policière longue et coûteuse. Souvent, les policiers se sentent impuissants. Et de plus en plus de voix s'élèvent pour que des mesures soient prises pour carrément éradiquer le phénomène.

«On sait que cette industrie exploite les jeunes femmes, a dit l'inspecteur Jean Cormier, responsable des centres de coordination fédéraux de la GRC. Je pense certainement qu'on devrait examiner cette industrie de plus près et se demander si elle devrait être permise, au Québec et ailleurs.»

Pour la première fois, en octobre, la GRC a démantelé un réseau criminel qui aurait forcé quatre jeunes Roumaines à se prostituer dans au moins sept salons de massage de la région de Montréal. Ces femmes étaient sous l'emprise de Marius Trifu Miclescu, qui a été accusé de traite de personnes.

Un cas typique

Les tenancières des salons, pour la plupart d'origine chinoise, ont pour leur part été accusées au cours des derniers jours d'avoir tenu une maison de débauche.

«Des accusations ont été portées la semaine dernière, et il y a encore des enquêtes en cours. C'est comme si on soulevait une toile d'araignée, et que ça conduisait à d'autres arrestations... On se rend compte que c'est la pointe de l'iceberg», a expliqué M. Blaney.

L'équipe spéciale de la GRC sera basée à Montréal en raison de «l'expertise» acquise au sein de la GRC et du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), a ajouté le ministre. «On est peut-être plus conscient du phénomène à Montréal parce qu'on s'est donné des outils pour l'identifier. Mais cela ne veut pas dire que la traite n'existe pas ailleurs...»