Rakesh Jankie et Marlon Henry ont été acquittés, dimanche, du meurtre prémédité du Montréalais Fehmi Sen, abattu en mai 2013 au parc Kent, dans le quartier Côte-des-Neiges. La décision a été rendue par 12 jurés au terme d'un procès de plus d'un mois.

Non coupables. C'est ce que contenait l'enveloppe remise en fin d'après-midi par les 12 membres du jury au terme de trois jours de délibérations. Ils devaient juger si Rakesh Jankie et Marlon Henry avaient prémédité le meurtre de Fehmi Sen, un homme de 28 ans tué en mai 2013, à Montréal. Jointe par téléphone après le prononcé du verdict, Behice Yanar, l'une des soeurs de la victime, venait de quitter le palais de justice de Montréal et était en direction de l'hôpital.

«Ma mère a perdu conscience après le prononcé du verdict. [...] On vient de tuer mon frère une deuxième fois. Eux l'ont tué par erreur. Et maintenant, c'est la justice qui vient de tirer la balle. Je ne crois pas en la justice.»

Ce verdict, la famille l'attendait depuis quatre ans, bientôt cinq. Déjà l'an dernier, elle avait craint que ceux qui étaient soupçonnés d'avoir assassiné Fehmi ne fassent jamais face à la justice, alors que la défense avait invoqué l'arrêt Jordan et demandé la fin du processus judiciaire. Requête rejetée, la famille espérait que la suite des choses leur permettrait de panser, un tant soit peu, leurs plaies.

«Je ne m'attendais pas à ça. Il n'y a pas de justice. La justice n'existe pas. Je ne crois plus à la justice. Personne ne pourra me faire croire qu'il y a une justice», répétait Mme Yanar, la voix empreinte de tristesse plus que de colère.

Le 30 mai 2013, Fehmi Sen se trouvait avec des amis au parc Kent, dans Côte-des-Neiges, lorsqu'il a été atteint d'une balle d'arme à feu à la poitrine. Il est mort quelques heures plus tard. L'homme n'avait aucun antécédent judiciaire et, selon toute vraisemblance, il y aurait eu erreur sur la personne.

En début de procès, la Couronne a exposé que les assaillants ont confondu Sen avec un autre homme - Volkan Demirel -, ce dernier étant impliqué dans une querelle amoureuse avec l'ex-petite amie de Rakesh Jankie, l'un des accusés. Le soir du meurtre, un véhicule Lincoln Navigator s'est avancé vers le groupe d'amis de Fehmi Sen à deux reprises. À la seconde occasion, la vitre arrière du véhicule s'est baissée, une arme est apparue et la victime a été atteinte à la poitrine devant ses amis. Les meurtriers auraient cru, à tort, qu'il s'agissait de Demirel.

Les quatre hommes à bord de ce véhicule ont été arrêtés et accusés de meurtre prémédité : Rakesh Jankie, Marlon Henry, Kshawn Rocque et Shorn Carr.



Kshawn et Carr coupables


Les deux autres accusés dans cette histoire ont connu un sort différent. Shorn Carr a plaidé coupable à une accusation réduite d'homicide involontaire en novembre dernier. Il revient en cour le 29 mars pour connaître sa peine. Kshawn Rocque a plaidé coupable à une accusation réduite de complicité après le fait. Il a aussi été condamné à trois ans et demi de prison. «Sachant que Marlon Henry et/ou Rakesh Jankie avaient commis un meurtre, Kshawn Rocque les a assistés pour leur permettre de s'enfuir», le 30 mai 2013, pouvait-on lire dans l'acte d'accusation.

PHOTO FOURNIE PAR LA FAMILLE

Fehmi Sen

Jankie et Henry, eux, ont été acquittés dimanche.

«On comprend que probablement que la poursuite n'a pas réussi à convaincre le jury hors de tout doute que messieurs étaient coupables de meurtre prémédité», a affirmé l'avocate de Rakesh Jankie, Me Marie-Hélène Giroux.

«Le verdict est conforme à la preuve présentée», a ajouté Me Giroux, ajoutant que son client, libre depuis dimanche soir, «est soulagé».

Ce dénouement est irréel aux yeux de la famille du défunt, qui n'entend pas en rester là.

«On va tout faire. On va aller en appel. On va aller aussi haut que nécessaire pour qu'ils restent derrière les barreaux», s'est révoltée la soeur de la victime. 

«Ils ont tué mon frère! Comment peuvent-ils être libres?», a insisté Mme Yanar, avant de retourner auprès de sa mère éplorée.

Les procureurs de la Couronne étaient Me Marie-Claude Bourassa et Me Yasaman Jahanbakhsh.

Marlon Henry et Rakesh Jankie.