Giuseppe Lopez, membre du clan familial Lopez-Oliverio, relié à la mafia montréalaise, a été assassiné lundi soir en République dominicaine, a appris La Presse de plusieurs sources policières et du milieu criminel.

Giuseppe Lopez, 59 ans, aurait été tué par balles par des inconnus alors qu’il se trouvait sur une moto, près du club Ambar de Juan Dolio, où il résidait, dans la municipalité de Guayacanes, dans la province de San Pedro de Macorís, à une soixantaine de kilomètres à l’est de la capitale, Saint-Domingue, rapportent des médias dominicains. Ceux-ci identifient la victime, ce que n’ont pas fait les autorités canadiennes pour le moment.

« Par l’entremise de son réseau d’agents de liaison internationaux, la Gendarmerie royale du Canada est en mesure de confirmer qu’un homme connu des services policiers a été abattu en République dominicaine », a déclaré à La Presse la caporale Anick Fournier de la Division C (Québec) de la GRC.

« Affaires mondiales Canada est au courant du décès d’un citoyen canadien en République dominicaine. Les agents consulaires sont en contact avec les autorités locales et fournissent une assistance consulaire à la famille. Pour des raisons de confidentialité, aucune autre information ne peut être divulguée », a renchéri une porte-parole d’Affaires mondiales Canada, Charlotte MacLeod.

Une autopsie a été ou sera pratiquée sur le corps de la victime.

Selon nos informations, la famille Lopez possède des propriétés en République dominicaine où elle serait présente depuis des années.

D’après plusieurs sources, le patriarche du clan, Serafino Oliverio, serait d’ailleurs actuellement en République dominicaine.

Un clan discret

Le clan Lopez a toujours mené ses affaires discrètement avant que les projecteurs des enquêteurs de la défunte Escouade régionale mixte (ERM) de Montréal et de la Division des produits de la criminalité de la Sûreté du Québec soient braqués sur lui durant l’enquête Magot-Mastiff, entre 2013 et 2015.

Durant l’enquête, les limiers ont écouté et suivi plusieurs suspects, dont Giuseppe Lopez et ses frères, et utilisé un agent civil d’infiltration grâce auquel les policiers ont pu constater que le clan avait fourni une douzaine de kilogrammes de cocaïne à un trafiquant du quartier Hochelaga-Maisonneuve alors que celui-ci était en rupture de stock.

Dans un résumé de 400 pages de l’enquête Magot-Mastiff déposé en cour, il est écrit que l’ACI aurait été impliqué dans une transaction de près de 700 000 $ avec les frères Lopez à l’été 2014.

Le 2 août 2014, l’ACI s’est rendu dans un restaurant appartenant à la famille Lopez pour déposer une somme de 140 000 $.

Un des frères lui avait précédemment expliqué qu’il devait porter des pantalons plus grands, car il ne voulait pas qu’il entre dans l’établissement avec un sac, qu’il devait commander un repas et se rendre ensuite dans les toilettes pour déposer l’argent dans une armoire, « près du Ajax », et qu’après son départ, quelqu’un irait prendre les billets pour éviter qu’ils se croisent.

L’ACI a suivi ces instructions et par la suite, les enquêteurs ont observé un des frères Lopez récupérer le sac.

Surnom Espresso

Toujours durant l’enquête Magot-Mastiff, le 25 mars 2015, les policiers ont intercepté une conversation entre l’ancien criminaliste Loris Cavaliere, Giuseppe Lopez, son frère jumeau et deux autres individus reliés au crime organisé.

Durant la conversation, un des frères Lopez a demandé à Cavalière si les « machines » (appareils de communications cryptées) étaient sécuritaires, ce à quoi l’ancien avocat a répondu qu’avant, c’était les BlackBerry qui étaient les plus sécuritaires, mais que la police (GRC) a pu les décrypter durant l’enquête qui a mené à l’arrestation de Raynald Desjardins.

Selon la preuve déposée en cour, Giuseppe Lopez aurait utilisé le surnom Espresso pour ses communications sur PGP.

Giuseppe et ses deux frères ont été accusés de trafic de cocaïne à l’issue de l’enquête Magot-Mastiff, mais ils ont bénéficié d’un arrêt des procédures en octobre 2019.

Giuseppe Lopez n’avait pas d’antécédent criminel, tout comme ses frères d’ailleurs.

Au cœur d’un conflit

Au cours des dernières années, le clan Lopez a vraisemblablement été mêlé à un conflit avec un autre clan dont on ignore s’il est terminé ou non.

En novembre 2021, le patriarche du clan et oncle des frères Lopez, Serafino Oliverio, a été blessé par balles alors qu’il sortait de sa résidence située sur le boulevard Gouin, dans le nord-est de Montréal.

Le clan possède plusieurs cafés, restaurants et immeubles, surtout dans le nord-est de la métropole.

À partir de 2019, certains de leurs cafés et d’autres établissements, dont un restaurant du boulevard Gouin dans le quartier Rivière-des-Prairies considéré comme le quartier général de Serafino Oliverio, ont été les cibles d’incendiaires.

Des véhicules appartenant à des membres de la famille ont également été endommagés dans des incendies criminels.

En 2018, un immeuble qui abrite une entreprise appartenant à la famille Oliverio-Lopez dans le nord de Montréal avait pris feu quand un incendie — vraisemblablement accidentel — s’était déclaré dans des serveurs de cryptomonnaie installés au sous-sol.

Il est trop tôt pour dire si le commanditaire de l’attentat qui a coûté la vie à Giuseppe Lopez se trouve à Montréal et si le meurtre est relié au conflit dans lequel est mêlée la famille depuis des mois.

Plusieurs évènements importants ont secoué la mafia montréalaise depuis le printemps dernier, avec la tentative de meurtre contre le fils cadet de Vito Rizzuto, Leonardo, à la mi-mars, puis les assassinats de Claudia Iacono en mai et de Francesco Del Balso en juin.

Avec la collaboration de Mathieu Perreault, La Presse

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.