Embardée dans Tétreaultville, piétons fauchés à Montréal-Nord, délit de fuite dans Hochelaga-Maisonneuve : une série de collisions ayant fait sept blessés en moins de 24 heures à Montréal ravive les inquiétudes, au moment où Québec doit annoncer une nouvelle stratégie pour tenter d’endiguer la détérioration du bilan routier.

Quatre personnes ont été grièvement blessées à Tétreaultville mercredi soir lors d’une violente embardée impliquant sept véhicules dans la rue Notre-Dame. Puis, quelques heures plus tard, deux piétonnes ont été heurtées par un automobiliste dans le stationnement d’un commerce, à Montréal-Nord. Le lendemain, jeudi matin, une femme a été blessée gravement dans ce qui a toutes les apparences d’un délit de fuite, dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve.

Des mesures « pourraient être implantées rapidement » aux intersections où ont eu lieu ces drames, a assuré jeudi le cabinet de la mairesse Valérie Plante. Mais ces trois évènements illustrent que « malgré l’accélération des mesures de sécurisation, il reste encore beaucoup à faire pour changer les comportements et sensibiliser les automobilistes », estime l’entourage de l’élue.

« Ces drames rappellent l’urgence de sécuriser les déplacements et de faire passer la sécurité avant la rapidité et la fluidité. […] La taille, la vitesse et le nombre de voitures sur nos routes représentent un défi de taille pour assurer la sécurité des usagers vulnérables de la route », a martelé l’attachée de presse Catherine Cadotte. Elle appelle à des « actions nationales pour arrêter ce fléau ».

Tout cela survient au moment où la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, doit dévoiler mardi prochain des « mesures importantes en sécurité routière ». Selon nos informations, la ministre dévoilera l’essentiel de sa Stratégie nationale en sécurité routière, attendue de pied ferme par de nombreux observateurs. Le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, sera aussi sur place.

Un copier-coller de l’an dernier

Selon des données préliminaires de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ), 144 personnes auraient perdu la vie sur les routes de la province en date du 30 juin 2023. Il s’agit précisément du même nombre que durant les six premiers mois de 2022, année où on observait déjà une hausse marquée par rapport à la moyenne des cinq années précédentes.

Quelque 535 personnes ont par ailleurs été blessées gravement à ce jour en 2023, contre 509 à pareille date en 2022.

La SAAQ affirme qu’elle ne dispose pas actuellement de données pour les vacances de la construction de 2023, mais son porte-parole, Gino Desrosiers, souligne que « de 2017 à 2022, en moyenne annuellement, il y a eu 20 décès et 90 blessés graves sur les routes du Québec pendant les vacances de la construction ». En 2022, pendant cette période, il y avait eu 20 décès et 71 blessés graves.

Début août, la Sûreté du Québec avait néanmoins signalé que 22 décès étaient survenus pendant les vacances de la construction sur le réseau routier en 2023.

« C’est déjà très inquiétant »

Pour CAA-Québec, ces chiffres montrent d’emblée une tendance pour le moins insécurisante. « C’est un bilan qui est préoccupant quand on sait que 2022, c’était le pire bilan routier en 10 ans. D’être au même niveau déjà cette année, c’est très inquiétant », explique son porte-parole, David Marcille.

En juin, la SAAQ avait révélé que 392 personnes étaient mortes sur les routes du Québec en 2022. Il s’agissait alors d’une hausse d’environ 13 % en un an, mais surtout d’un sommet en près d’une décennie. Surreprésentés, les piétons ont été victimes l’an dernier d’un décès sur cinq, alors que le nombre de collisions impliquant un poids lourd suit aussi une tendance à la hausse.

Les Québécois ont conservé de mauvaises habitudes de conduite issues de la pandémie. On le voit encore : les gens conduisent beaucoup plus vite qu’avant. Il y a énormément d’excès de vitesse et c’est la grande cause des accidents.

David Marcille, porte-parole de CAA-Québec

À Montréal, ajoute M. Marcille, « on sait qu’on a un gros problème en zone scolaire avec la rentrée qui arrive ». L’an passé, son groupe avait fait le constat dans une étude réalisée au mois d’octobre qu’environ 95 % des automobilistes ne respectaient pas la vitesse en zone scolaire.

« Ça va prendre des actions concrètes parce que les gens ne semblent pas conscients du danger de conduire une voiture. On a besoin de mesures qui vont protéger les usagers de la route malgré eux, parce qu’on a beau répéter, faire de la sensibilisation, il y a encore tellement de manœuvres téméraires, beaucoup d’impatience. Ça passe vraiment par une meilleure application des lois », conclut David Marcille.