La poursuite vient de déposer un avis devant la Cour d’appel du Québec demandant à celle-ci de renverser l’acquittement de Joshua Sarroino, qui avait été accusé d’avoir tué d’une balle à la tête Éric Francis De Souza, alors que ce dernier était attablé avec 12 autres individus dans un restaurant du Quartier DIX30 à Brossard, le 10 mai 2019.

Sarroino, un lavallois de 29 ans, a été acquitté du meurtre au premier degré d’Éric Francis De Souza, par un jury le 11 juin dernier, après deux jours de délibérations.

Dans son avis déposé à la Cour d’appel, la procureure de la poursuite, MTian Meng, se demande si le juge au procès a erré en droit lors de ses instructions aux jurés quant à l’identification du tireur, et en écartant une preuve de filature et le témoignage de l’ex-conjointe de la victime dans le cadre de requêtes en voir-dire débattues avant le procès.

  • La victime Éric Francis De Souza, tué à l’âge de 24 ans.

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    La victime Éric Francis De Souza, tué à l’âge de 24 ans.

  • Joshua Sarroino

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    Joshua Sarroino

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Dans les mois qui ont suivi le meurtre d’Éric Francis De Souza, en 2020, des policiers fileurs ont en effet observé Sarroino à quelques reprises en compagnie d’au moins deux des 12 individus assis à la table du restaurant le jour du meurtre et dont l’identité est protégée par un interdit de publication.

CAPTURE D’ÉCRAN TIRÉE D’UNE VIDÉO ET DÉPOSÉE EN COUR

Cette photo montre la victime De Souza, en haut à gauche, avec le numéro 1 rouge et un chandail blanc. Il a été abattu peu de temps après devant tous les témoins de la table, le 10 mai 2019.

L’accusé avait aussi été vu rencontrer un certain David Anthony Di Rienzo, qui s’est rendu à l’hôpital où avait été transportée Éric Francis De Souza le 10 mai 2019.

Toujours dans le cadre de ces requêtes débattues avant procès, un procureur de la poursuite avait également annoncé que si elle venait témoigner, l’ex-conjointe de la victime raconterait qu’elle et Éric Francis de Souza fréquentaient Di Rienzo, certains des individus assis autour de la table et leurs conjointes dans le passé, mais que les liens ont été coupés avec eux et que le comportement de son conjoint a changé vers octobre 2018, après une tentative de meurtre dont a été victime Di Rienzo.

Bras de fer

Pour la poursuite, cette preuve était pertinente et appuyait la théorie voulant que Sarroino a tué Éric Francis De Souza, et que la découverte, non loin des lieux du crime, d’un sac de plastique contenant une douille et une arme à feu chargée de cinq balles, et sur lequel les empreintes digitales et l’ADN de l’accusé ont été identifiés, n’était pas une coïncidence.

« Sur la filature, on ne voit pas l’accusé commettre un crime et il n’est pas montré sous un mauvais jour. Cela ne supporte pas une inférence de culpabilité sur la seule base de mauvais caractère. Je ne vois pas comment cette preuve pourrait mêler le jury. Elle ne compromet pas l’équité du procès et l’accusé aura la possibilité de répliquer à cette preuve », avait déclaré le procureur MPatrick Ostiguy au juge Pierre Labrie de la Cour supérieure lors d’un débat sur une requête qui a eu lieu avant le procès.

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Joshua Sarroino et l’un des hommes assis à la table du restaurant le jour du meurtre, filmés par des policiers de la Sûreté du Québec en juin 2020.

« C’est une invitation à spéculer sur un fait qui n’est pas nécessairement lié au meurtre et qui n’est pas contemporaine aux évènements. Cette preuve n’aidera pas le jury et elle serait dangereuse, car il pourrait faire des interprétations », avait répliqué l’avocate de Sarroino, MDanièle Roy.

Le juge Labrie a donné raison à MRoy concluant que cette preuve engendrerait de la spéculation et qu’il y aurait « un réel danger de mauvaise utilisation de cette preuve par le jury ».

En rendant son jugement, le magistrat a aussi souligné à trois reprises que la poursuite a fait le choix de ne pas faire de preuve de mobile au procès.

La couleur des cheveux

Le procès s’est joué sur l’identification du tueur dont on ne voit pas le visage sur les caméras de surveillance du restaurant et des bâtiments voisins.

Dans son avis d’appel, la poursuite conteste également une partie des directives données par le juge aux jurés avant que ceux-ci amorcent leurs délibérations.

« Malgré l’objection de l’appelant [la poursuite], le juge de première instance a inclus certaines instructions concernant la couleur des cheveux de l’intimé dans la section relative à la preuve d’identification par témoin oculaire. Entre autres choses, le juge du procès a ordonné au jury d’acquitter l’intimé s’il croyait au témoignage d’un témoin oculaire selon lequel le tireur avait les cheveux blonds », écrit MMeng dans sa requête.

La semaine dernière, Sarroino a par ailleurs été déclaré coupable de possession de deux armes à feu et de munitions trouvées chez lui en 2020, et condamné à une peine de 41 mois d’emprisonnement.

Mais en soustrayant la détention préventive calculée en temps et demi – il était détenu depuis mars 2021 –, il ne lui restait qu’une journée à purger et il a été libéré le jour même.

Pour joindre Daniel Renaud, composez-le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.