Un Hells Angels condamné pour meurtre obtient sa semi-liberté après 14 ans.

Un Hells Angels incarcéré pour meurtre depuis 14 ans et l’un des derniers membres de cette bande de motards toujours détenus dans la foulée de l’opération SharQc, Claude Morin, pourra aller en maison de transition, ont décidé les commissaires aux libérations conditionnelles du Canada lundi.

Morin, 53 ans, a été condamné à l’emprisonnement à perpétuité en 2012 pour le meurtre d’un trafiquant de drogue, Daniel Savard, commis vers la fin de la guerre des motards, à Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier, en février 2000.

Savard était assis dans son salon, et regardait tranquillement la télévision, lorsque Morin a appuyé sur la détente de sa carabine et l’a tué sur le coup.

Claude Morin était alors accompagné de Dayle Fredette, devenu ensuite collaborateur de police, et c’est à la suite de ce revirement que Morin a décidé de plaider coupable en 2012.

« J’ai tiré parce que j’avais des talents de tireur. J’étais un chasseur depuis l’enfance », a déclaré Morin devant les commissaires des libérations conditionnelles.

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Claude Morin il y a environ cinq ans.

« Pour la famille de la victime, ce sont des souffrances incommensurables. J’ai créé un vide qui ne sera jamais comblé. J’ai commis l’irréparable ».

« J’ai conscience du mal que j’ai fait. La plus grande chose que l’on peut enlever à un être humain, c’est sa vie. Après ça, oui, on y pense, on essaie d’oublier et on y parvient », a dit Morin, ajoutant ne pas craindre de représailles.

« J’ai beaucoup plus peur du karma », a-t-il lancé.

Des motards près de chez lui

Claude Morin a commencé à consommer de la drogue dans la jeune adolescence. À 16 ans, il a quitté le nid familial sans l’accord de ses parents, pour se rapprocher des motards qui passaient devant sa maison pour se rendre au local des El Toros.

« C’était impressionnant de voir passer 25 ou 30 bicycles. Les couleurs, la gang, le sentiment d’appartenance, impressionner tout le monde autour de moi malgré ma petite stature, impressionner les filles », a décrit Morin.

C’est lorsqu’il a gravi les échelons de l’organisation et qu’il s’est mis à vendre de la drogue qu’il a commencé à faire de l’argent.

« Parce qu’avant, j’étais mal arrangé. J’ai vécu longtemps dans le local sauf quand j’avais une blonde. J’ai été longtemps à manger du Cheez Whiz », a-t-il expliqué.

Alors que les autorités considèrent que Morin s’est désaffilié des Hells Angels en 2012, celui-ci dit qu’il les a quittés en bons termes en novembre 2010 et que sa décision a été prise en même temps qu’il a choisi de plaider coupable pour le meurtre de Daniel Savard.

« Je l’ai dit à tous les membres de la section de Québec : “Je m’en vais et en sortant, on ne se verra plus, c’est terminé.” Les gars ont tous compris et m’ont souhaité bonne chance », a dit Morin.

Retour du balancier

Claude Morin a effectué 140 sorties avec escorte correctionnelle et a maintenu un bon comportement en détention.

Depuis qu’il est dans un minimum, il travaille aux cuisines. Durant sa longue incarcération, il a toujours préféré marcher seul dans la cour du pénitencier.

« J’étais tanné d’entendre parler de criminalité. Ce n’est que de ça dont les gens parlent. Ils veulent se revaloriser. Je suis devenu dans un trop plein », a-t-il expliqué.

Aujourd’hui, Morin s’est réfugié dans la méditation et la spiritualité, dont il a beaucoup parlé durant l'audience.

Son seul travail dans la vie a été de vendre de la drogue, des substances dont il déplore les effets aujourd’hui.

« Les drogues fortes vont causer de graves blessures émotionnelles et détruire des vies. En plus des blessures personnelles, il y a les blessures familiales. L’argent des familles qui part, des enfants qui souffrent. J’ai vécu sur l’addiction et la misère des gens. C’est le retour du balancier et la misère me revient », a témoigné l’ancien motard.

Reconstruire sa vie

Une fois libéré, Morin ne veut plus vivre en Beauce, sa région natale, pour ne pas faire de rencontres fortuites.

Malgré un handicap, ses principaux objectifs sont de se trouver un emploi valorisant qui lui permettra de bien vivre, et de rencontrer une femme avec laquelle il pourra finir sa vie.

« Mon plus gros défi sera de me construire un cercle d’amis et d’être transparent en le construisant. En espérant que cela se passe bien et que quelques-uns ne soient pas trop dans le jugement », a-t-il dit.

Après une courte délibération, malgré le fait qu’il ait un dossier « peu élogieux », qu’il ait tué une personne froidement et qu’il ait adhéré aux valeurs d’une organisation criminelle, les commissaires aux libérations conditionnelles ont accepté d’envoyer Morin en maison de transition tout en lui interdisant de communiquer avec des gens impliqués dans le crime et de fréquenter les endroits où l’on vend de l’alcool, sauf la SAQ.

« Ce qui préoccupe la commission, c’est que vous pourriez surestimer vos capacités. En collectivité, la marche sera haute. Ce n’est pas pour vous faire peur, mais depuis 20 ans, bien des choses ont changé. Cela va demander une force et une vigilance de votre part », l’a prévenu la commissaire Jessie Landry-Marquis, en l’invitant à ne pas hésiter à demander de l’aide.

Pour joindre Daniel Renaud, composez-le 514 285-7000, poste 4918, écrivez drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.