Les policiers étaient intervenus 13 fois dans les derniers mois pour maîtriser Pascal Arseneault en raison de son « état mental perturbé »

Pascal Arseneault était une bombe à retardement. Deux jours après une énième arrestation musclée chez lui, il a poignardé sa conjointe, croyant qu’elle était un « robot », puis a mis le feu à leur résidence. Dans les derniers mois, les policiers étaient intervenus une dizaine de fois pour le maîtriser, alors qu’il se prenait pour un « samouraï ».

« Ma mère méritait de vivre, elle méritait d’être aimée. Elle ne méritait pas d’avoir peur le soir lorsqu’elle allait se coucher. Elle ne méritait pas de se faire insulter. Je suis triste que cet amour si fort que Louise éprouvait soit en quelque sorte devenu sa prison. J’ai du mal à accepter qu’une personne aussi douce ait connu une fin aussi violente », a confié la fille de Louise Avon dans une lettre poignante.

Accusé de meurtre au second degré, Pascal Arseneault a plaidé coupable mardi au palais de justice de Saint-Jérôme à un chef réduit d’homicide involontaire. Il reconnaît avoir tué Louise Avon, sa conjointe des 12 dernières années, le 31 mars dernier, à Sainte-Agathe-des-Monts. Il était alors en plein délire après avoir consommé du crack. Ils étaient propriétaires d’une entreprise d’aménagement paysager, Les Pas Verts du Nord.

Le procureur de la Couronne, MAlexandre Dubois, et l’avocate de la défense, MMarie-Ève Duplessis, ont présenté une suggestion commune de huit ans de détention. Le juge Sylvain Lépine rendra sa décision en mai prochain.

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Le corps de la victime transporté par les intervenants

Signaux d’alarme

Pascal Arseneault « pète les plombs » à l’automne 2021. Abstinent depuis une décennie, il recommence à consommer du crack. L’entrepreneur se met à se parler seul, fait des katas de karaté avec des bâtons dans la rue et attaque sa maison à coups de sabre. En outre, il pense être un ninja.

Les signaux d’alarme sont pourtant nombreux. Dans les six mois précédant la tragédie, les policiers interviennent 13 fois auprès de Pascal Arseneault en raison de son « état mental perturbé ». Étonnamment, aucune intervention ne mène à sa détention. Il est toutefois hospitalisé à huit reprises. Rien n’y fait pour améliorer son état.

Les détails des interventions policières montrent l’ampleur des problèmes de santé mentale de Pascal Arseneault. À la mi-octobre, il crie contre des clients dans un commerce et s’attaque à un policier avec un bâton de deux mètres. Dix jours plus tard, il saccage sa maison en pleine psychose, armé d’un couteau. Il combat alors « les ombres ».

Sa conjointe, Louise Avon, vit alors dans la terreur. « J’étais trop high sur la consommation, Louise avait peur, elle appelait les flics et ils m’emmenaient », a confié Arseneault à un psychiatre. Il évoque d’ailleurs leur relation de couple « toxique », décrivant la victime comme une femme « jalouse et possessive ».

Début janvier, les policiers interviennent chez Pascal Arseneault, alors qu’il est armé de deux haches. Fin janvier, un employé alerte les policiers en voyant un homme faire des gestes de samouraï à l’extérieur. Plus tard en hiver, il chasse des « créatures » en pleine tempête de neige, nu-pieds. On le retrouve un autre jour, armé d’un bâton de baseball avec un clou, barricadé dans les toilettes de la gare de Piedmont.

Une intervention deux jours avant la mort de Louise Avon

Deux jours avant la mort de Louise Avon, les policiers interviennent auprès de Pascal Arseneault, intoxiqué au crack. Le forcené brise tout dans sa maison. En plein délire, il frappe les murs avec des bâtons. Les policiers doivent utiliser un pistolet à impulsion électrique pour le maîtriser. Il est arrêté pour voies de fait, puis libéré quelques heures plus tard.

Pascal Arseneault commet ensuite l’irréparable. Après avoir consommé du crack, il prend deux couteaux dans la cuisine et poignarde sa conjointe neuf fois. Il met le feu à leur résidence puis sort regarder le brasier, sans appeler les secours. Louise Avon était toujours en vie. À l’arrivée des policiers, il est couché dans la neige, armé d’un couteau.

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La résidence de Sainte-Agathe-des-Monts était en ruine après l’incendie.

« Lors de son arrestation, l’accusé mentionne être victime d’un complot de la part de la victime et de la police pour le tuer. Le tout était accompagné de propos délirants », indique le résumé des faits.

« Quand j’ai tué Louise, je la voyais comme un bogue du système, je voyais tout le monde comme des robots », a déclaré Pascal Arseneault, lors d’une évaluation psychiatrique sur son aptitude à comparaître.

Pendant cette rencontre, Pascal Arseneault a confié « coexister » avec le « Christ ». Un moment, il a même changé de voix et s’est exprimé comme s’il était lui-même le Christ. « Je vis en dedans de Pascal. L’humanité est en perdition », a alors proféré l’accusé. Il a également expliqué s’être battu avec le démon Baal.

Un second rapport conclut qu’au moment des faits, l’entrepreneur avait des « convictions délirantes envahissantes ». Toutefois, la psychiatre estime qu’il était responsable criminellement de ses gestes puisque son état était « induit par la forte consommation de crack ».

Les parties conviennent qu’en raison de son état mental et d’intoxication, Pascal Arseneault n’était pas capable de formuler l’intention de tuer sa victime. C’est pourquoi le chef de meurtre n’a pas été retenu.

En savoir plus
  • « La consommation de drogues n’est jamais une excuse pour faire mal à quelqu’un. Pascal a fait souffrir ma mère pendant plus de six mois avant de finir par la tuer. Rien ne justifie une telle violence. »
    Lettre de la fille de la victime