Les autorités poursuivaient jeudi leur enquête après la découverte la veille du corps d’un homme dans un boisé à proximité du chemin Roxham, en Montérégie. Peu d’informations ont filtré, mais tout porte à croire qu’il s’agirait d’une personne ayant tenté de traverser la frontière canado-américaine.

Alertés par un hélicoptère américain en patrouille de la présence du cadavre du côté canadien de la frontière, les agents de la Sûreté du Québec (SQ) du poste de la MRC des Jardins-de-Napierville se sont rendus sur place pour confirmer le décès de l’individu.

Le corps, qui se trouvait dans une zone boisée non loin de Saint-Bernard-de-Lacolle, a ensuite été héliporté puisqu’il ne pouvait être déplacé autrement, a indiqué un porte-parole de la SQ, Louis-Philippe Ruel, jeudi.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Le corps a été retrouvé dans un boisé à proximité du chemin Roxham, près de Saint-Bernard-de-Lacolle.

Selon Radio-Canada, il s’agirait du corps d’un migrant qui tentait de traverser la frontière, une information que n’avait pas confirmée la SQ jeudi. « Nous ne sommes pas capables de dire d’où cette personne arrivait et où elle se dirigeait », a précisé M. Ruel.

Il est « surprenant » qu’un corps ait été trouvé à proximité du chemin Roxham, selon Chedly Belkhodja, professeur à l’Université Concordia spécialisé en immigration régionale et en mobilisation citoyenne. « Ce chemin est extrêmement balisé, explique-t-il, surtout avec la présence de la Gendarmerie royale du Canada. Et c’est un lieu où de nombreuses personnes passent tous les jours. Les migrants viennent en taxi, souvent de Plattsburgh, puis ils traversent. »

Certaines personnes peuvent toutefois être inquiètes lorsqu’elles apprennent qu’elles seront arrêtées une fois entrées au Canada, soutient l’expert.

J’ai déjà vu au chemin Roxham des gens fatigués, hésitants. Puis, la police canadienne les informe que chaque personne qui décide de traverser commet un acte illégal et sera arrêtée. Parfois, des gens ont peur, paniquent, reculent. Peut-être certains se retrouvent-ils à errer.

Chedly Belkhodja, professeur à l’Université Concordia spécialisé en immigration régionale et en mobilisation citoyenne

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Une enquête a été ouverte afin de déterminer la nationalité de l’homme retrouvé mercredi et la cause de sa mort.

Une autre hypothèse serait que cette personne tentait plutôt de quitter le Canada en se dirigeant vers les États-Unis. « C’est constaté depuis quelque temps que des gens utilisent le Canada comme porte d’entrée et font le trajet inverse pour aller aux États-Unis », remarque M. Belkhodja.

Une chose est sûre, conclut-il : « C’est une tragédie. »

Déploiement policier

Une enquête a été ouverte afin de déterminer la nationalité de la personne et la cause de sa mort.

Jeudi après-midi, un important déploiement policier s’activait en bordure de la montée Glass, non loin du chemin Roxham, afin de trouver des éléments qui permettraient de mieux comprendre les circonstances de ce drame.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Jeudi, les policiers de la Sûreté du Québec et de la Gendarmerie royale du Canada arpentaient les bois près du chemin Roxham à la recherche d’indices.

Des véhicules tout-terrain de la Sûreté du Québec et de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) faisaient des allers-retours dans la boue gelée d’un champ en bordure d’un boisé afin de se rendre dans la zone de recherche.

« On essaie de trouver des éléments permettant de comprendre ce qui s’est passé, la raison pour laquelle cette personne se trouvait là. Est-ce qu’il a laissé un sac à dos quelque part ? Une personne en hypothermie a tendance à se déshabiller. Peut-on trouver des bouts de vêtements qui traînent à gauche et à droite ? », a expliqué le porte-parole Louis-Philippe Ruel.

Saint-Bernard-de-Lacolle est situé non loin du chemin Roxham, une voie de passage empruntée par la quasi-totalité des dizaines de milliers de migrants qui transitent entre les États-Unis et le Canada chaque année.

Lisez « Chemin Roxham : pourquoi tous les chemins y mènent »

Le 28 décembre dernier, la SQ avait déclenché une opération de recherche afin de retrouver un homme porté disparu dans le secteur de la montée Glass, non loin de l’endroit où le corps a été découvert mercredi. Mais on ne fait pas de lien pour le moment entre les deux évènements.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Les policiers utilisaient des véhicules tout-terrain pour accéder à la zone de recherche, dans un boisé près du chemin Roxham.

L’avis de recherche avait été levé le 29 décembre puisque la SQ avait des raisons de croire que l’homme recherché, un Montréalais de 44 ans, se trouvait du côté américain de la frontière.

Si l’information selon laquelle il s’agit du corps d’un migrant se confirme, ce drame constituerait le premier décès connu dans ce genre de situation depuis un an au Canada.

En janvier 2022, les corps de quatre membres d’une même famille indienne qui tentaient de traverser la frontière vers les États-Unis avaient été trouvés à Emerson, au Manitoba. Ils auraient tenté la traversée à pied dans des conditions hivernales rigoureuses et seraient morts d’hypothermie.

« Nous sommes attristés d’apprendre le décès d’une personne à la frontière canado-américaine et nous souhaitons offrir nos condoléances à ses proches », a réagi jeudi le cabinet du ministre fédéral de la Sécurité publique, Marco Mendicino. Son attachée de presse, Audrey Champoux, a ajouté qu’il suivrait de près l’enquête menée par la Sûreté du Québec.

Pas la première fois

En avril 2019, le corps d’un homme avait aussi été trouvé dans les bois près du poste frontalier de Saint-Bernard-de-Lacolle.

Une dizaine de Mexicains venaient d’être arrêtés du côté américain, pour avoir traversé clandestinement la frontière, et un membre du groupe manquait à l’appel. Les autorités américaines avaient averti les autorités canadiennes, et la Sûreté du Québec avait lancé une vaste opération de recherche.

L’homme avait été retrouvé sans vie et, à première vue, rien n’indiquait qu’il s’agissait d’une mort violente ou d’un meurtre.

Avec la collaboration de Lila Dussault, La Presse