Des inventeurs québécois fraudés pour plus d’un million de dollars par un « charlatan » ont fait les frais du « laxisme » et de « l’inaction » de l’Office de la protection du consommateur (OPC), reproche une inventrice dans une demande d’action collective. Elle réclame ainsi des milliers de dollars pour chaque inventeur floué.

Un « imposteur » et un « charlatan du XXIsiècle ». C’est ainsi que le juge Alexandre Dalmau a qualifié le président de la Fédération des inventeurs du Québec (FDIQ), Christian Varin, en le reconnaissant coupable de fraude en janvier 2022. Pendant des années, le fraudeur a utilisé sa fédération bidon pour faire croire à ses victimes qu’il allait breveter leurs créations. Or, il n’a jamais obtenu un seul brevet pour les 500 inventeurs. Christian Varin attend toujours l’imposition de sa peine.

De nombreuses personnes avaient pourtant sonné l’alarme auprès de l’OPC, soutient l’inventrice Nancy Vigneault, dans une demande d’autorisation d’action collective déposée la semaine dernière au palais de justice de Montréal. Un ancien policier avait même mené une enquête extrêmement documentée sur les pratiques de Christian Varin et avait alerté la présidente de l’OPC.

Or, même si l’OPC avait été « informée à plusieurs reprises du comportement malhonnête » de la Fédération des inventeurs, l’organisme public n’a rien fait pour protéger le public, soutient-on dans la requête. La « Fédération » de Christian Varin détenait alors un permis de vendeur itinérant de l’OPC.

« L’inaction de [l’OPC] a permis à la FDIQ de procéder à de fausses représentations quant aux services qu’elle offre et ainsi s’attirer grand nombre de clients, et ce, durant plusieurs années, alors que cette conduite dolosive avait été dénoncée maintes fois à la défenderesse », allègue la requête du cabinet Langlois-Cordeau.

« Minimiser » les plaintes

On reproche également à l’OPC d’avoir « minimisé » le nombre de plaintes reçues, ainsi que l’« importance » de celles-ci. La demanderesse ajoute que le site web de l’OPC ne mentionnait en 2018 que quatre plaintes des consommateurs contre Christian Varin, alors qu’une cinquantaine avait été déposées, dont une vingtaine pour « pratiques déloyales et trompeuses ».

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Christian Varin (à gauche), accompagné de son avocat MNormand Haché (à droite), en novembre 2020. MHaché avait tenté d’empêcher La Presse de photographier son client au palais de justice de Montréal.

L’inventrice Nancy Vigneault témoigne que ses vérifications auprès de l’OPC n’ont pas permis de « relever de problèmes importants de probité » chez la Fédération. « Or, si [l’OPC] avait rempli sa mission, la FDIQ aurait été affichée comme entreprise hautement contentieuse. […] La FDIQ œuvrait avec un permis délivré par [l’OPC] et son dossier public était conforme, voire presque sans tache », déplore-t-elle.

Dans le cadre de l’action collective, Mme Vigneault réclame ainsi 2500 $ en dommages pour toutes les personnes qui ont confié un mandat à la FDIQ depuis le 1er mai 2015 et qui n’ont pas obtenu les services demandés et payés, ou qui ont obtenu des services déficients ou incomplets.

L’OPC n’a pas souhaité commenter cette requête. « Le dossier fait présentement l’objet d’un examen par l’Office, et nous verrons à l’analyser et prendre les mesures qui s’imposent au terme de cette évaluation », a indiqué le porte-parole Charles Tanguay.