Trois ans après le dépôt, en juin 2019, d’une première demande d’action collective contre les Frères des écoles chrétiennes et l’un des membres de cet ordre, la Cour supérieure a donné son aval la semaine dernière pour entendre la cause.

Le demandeur, un homme aujourd’hui âgé de 68 ans désigné sous les initiales A. B., a obtenu du tribunal le droit d’agir à titre de représentant pour les 162 victimes, hommes et femmes, qui se sont manifestées jusqu’ici.

L’action collective vise toute agression sexuelle commise de 1940 à nos jours.

La congrégation des Frères des écoles chrétiennes n’a pas contesté la demande d’action collective.

Agressions dans le sous-sol de l’école

Selon la requête, A. B. a été agressé sexuellement par le frère Patrice, entre l’âge de 7 et 8 ans, alors qu’il fréquentait l’École Dominique-Savio, à Forestville, où le religieux était préposé, de 1960 à 1961.

Ces agressions « prenaient généralement la forme d’attouchements et de masturbations » d’après la description contenue dans la requête, se déroulaient « généralement au sous-sol de l’école, dans une salle d’entreposage » et « se sont produites à de nombreuses occasions ».

Le frère Patrice est décédé le 18 mai 2019.

Invoquant une série de conséquences de ces agressions présumées — anxiété, culpabilité, humiliation, baisse d’estime de soi, dysfonction sexuelle, consommation abusive d’alcool et de drogue, idées suicidaires, notamment — le demandeur réclame 300 000 $ à titre de dommages-intérêts non pécuniaires, 150 000 $ pour pertes pécuniaires et 150 000 $ de dommages punitifs, pour un total de 600 000 $. La requête fait valoir que les Frères des Écoles chrétiennes étaient responsables du contrôle, de la direction et de la surveillance de leurs préposés et de leurs membres.

Elle soutient que les préposés ou membres de la congrégation visés « ont utilisé leur position d’autorité religieuse afin de développer des liens avec les membres du groupe, dont le demandeur, et faussement gagner leur confiance ». Elle reproche également à l’organisme religieux, entre autres, d’avoir « omis d’instaurer des politiques et mesures de sécurité ou de surveillance pour que ses membres ne commettent pas d’agressions sexuelles » et d’avoir « préféré la culture du silence » plutôt que de respecter leur propre droit interne.

Forte présence de la congrégation en éducation

L’audition de la demande d’action collective a eu lieu le 10 mai dernier au palais de justice de Montréal en présence de nombreuses victimes provenant des quatre coins du Québec qui y ont assisté par visioconférence. La décision a été rendue ce mardi par le juge Donald Bisson.

Les Frères des Écoles chrétiennes ont été très présents dans l’éducation primaire et secondaire de plusieurs centaines d’établissements scolaires au Québec et ont enseigné à plus de 40 000 étudiants par année de 1955 à 1965.

La décision de la Cour supérieure permet donc au processus judiciaire de s’enclencher à une date qui reste à être déterminée. La cause sera donc entendue à moins d’une entente hors cour avant la fin des procédures.