(Québec) « Il est pour nous le temps de se reconstruire. » Des victimes blessées lors de l’attaque au sabre dans la capitale, le soir du 31 octobre, ont pris la parole jeudi sur les réseaux sociaux, peu après que leur identité eut été révélée par la Cour.

C’est le juge René de la Sablonnière qui a levé jeudi matin l’interdit de publication concernant ces quatre personnes, au palais de justice de Québec. La Presse a pu confirmer que Rémy Bélanger, un musicien originaire de Beauport âgé de 37 ans, figure sur cette liste, tout comme le citoyen Gilberto Porras (19 ans). Lisa Mahmoud (24 ans) et Pierre Lagrevol (26 ans), deux amis et ressortissants français dans la vingtaine, s’y trouvent également.

Dans une publication Facebook mercredi, Lisa Mahmoud – qui est toujours hospitalisée – a d’ailleurs fourni plus de détails sur le récit des évènements. Elle raconte notamment qu’elle était « sortie spécialement pour aller faire des photos dans le Champlain » avec son meilleur ami, Pierre Lagrevol, vers 22 h 10, lorsque la soirée a pris une tout autre tournure. « Vingt-cinq minutes après, on se faisait agresser proche du château Frontenac, on était sur le chemin du retour pour rentrer chez nous », poursuit la victime.

Nos vies ne sont plus en danger, mais nous restons extrêmement choqués par cette attaque plus que barbare.

Lisa Mahmoud, une des victimes de l’attaque au sabre

Sur Instagram, celle qui est originaire de Nîmes, dans le sud de la France, s’est aussi dite reconnaissante pour les nombreux messages de soutien qui lui ont été envoyés dans les derniers jours. « Je me fais opérer à 6 h 30, heure canadienne, pour ma troisième opération. Cette fois-ci, ça sera pour ma main gauche », a-t-elle témoigné jeudi matin, en disant traverser une période excessivement difficile.

Toujours sur les réseaux sociaux, son meilleur ami Pierre Lagrevol a parlé d’un « fou qui nous a agressés, moi et ma meilleure amie ». « On a réussi à s’échapper, d’autres n’ont pas eu cette chance. Maintenant, il est pour nous le temps de se reconstruire physiquement [et] mentalement », raconte le natif de Saint-Étienne, avant d’ajouter : « je vous remercie du soutien, on est bien entourés, merci ».

Jointe au téléphone, la porte-parole du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), MAudrey Roy-Cloutier, a indiqué que les victimes ont toutes été consultées dans le processus. « Ça vient d’eux. Le procureur a présenté cette demande en leur nom ce matin », assure-t-elle. La cinquième victime, elle, ne souhaite pas pour le moment que son identité soit dévoilée.

Le DPCP assure par ailleurs que toutes les victimes seront prises en charge par ses équipes. « Nous sommes en contact avec chacune d’entre elles pour apporter le soutien nécessaire et les référer vers les organismes. On est aussi là pour répondre à leurs questions », avance la porte-parole.

L’accusé présumé sain d’esprit

L’accusé dans l’attaque au sabre du Vieux-Québec est présumé sain d’esprit jusqu’à preuve du contraire, a par ailleurs rappelé jeudi le procureur de la Couronne affecté au dossier.

« Dans le Code criminel, il y a une présomption à l’effet que les gens sont réputés être sains d’esprit. Si jamais [Carl] Girouard entend faire valoir une défense à cet effet, il pourra le faire en temps opportun », a expliqué MFrançois Godin, au palais de justice de Québec. Ce procureur avait notamment été affecté au procès du tueur de la mosquée de Québec, Alexandre Bissonnette.

Au moment où on parle, il est beaucoup trop tôt pour spéculer à cet effet.

MFrançois Godin, procureur de la Couronne, au sujet de l’état de santé de l’accusé

Cette déclaration de la Couronne aux médias a eu lieu à l’issue d’une brève comparution de Carl Girouard. L’homme de 24 ans est accusé de deux meurtres au premier degré et de cinq tentatives de meurtre. L’enquête sur remise en liberté de Girouard a été reportée au 20 novembre. L’audience sur la forme n’a duré que quelques minutes. L’accusé, qui est détenu, a comparu par visioconférence.

Le soir de l’Halloween, un homme armé d’un katana et vêtu d’un costume médiéval s’est attaqué à des passants dans le Vieux-Québec. L’espace de quelques minutes, il a frappé sept innocents. Deux sont morts : François Duchesne, 56 ans, qui se promenait près du château Frontenac, et Suzanne Clermont, 61 ans, qui fumait une cigarette sur le pas de sa porte, rue des Remparts.

Le suspect a été arrêté à 1 h du matin dans le Vieux-Port de Québec. Selon la police, Girouard était en hypothermie. Il aurait été nu-pieds au moment des faits.

Mardi soir, quelques centaines de personnes s’étaient rassemblées devant le Musée national des beaux-arts du Québec (MNBAQ) pour rendre un dernier hommage à M. Duchesne. Ce dernier était le directeur des communications et du marketing de l’organisation muséale.