Le prédateur sexuel Georgi Spitzer a passé une douzaine d’années dans une prison américaine pour avoir drogué et violé de nombreuses jeunes femmes avec son frère jumeau. Malgré son manque de crédibilité, il a été acquitté jeudi d’avoir agressé sexuellement une Montréalaise en raison des contradictions dans le témoignage de la plaignante.

« J’étais absolument sûre qu’il allait me tuer, me découper en morceaux, envelopper mon corps dans une pellicule de plastique, puis l’envoyer morceau par morceau à mon fils. »

La plaignante a rendu un témoignage percutant l’automne dernier au procès de Georgi Spitzer. Or, les « contradictions, inconsistances et doutes » dans son témoignage ont incité le juge Christian M. Tremblay à acquitter Georgi Spitzer jeudi. Vêtu d’un chapeau et de verres fumés, le Montréalais s’est à nouveau caché des journalistes au palais de justice de Montréal.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Georgi Spitzer

La plaignante, une femme nouvellement arrivée au pays, a rencontré l’accusé au centre-ville de Montréal en 2012. L’homme de 63 ans était de retour au pays depuis trois ans, après avoir purgé une longue peine de prison pour une série d’agressions sexuelles sur cinq femmes entre 1993 et 1996.

Le Montréalais et son frère jumeau Stefan se faisaient passer pour des producteurs de cinéma auprès de jeunes femmes. Ils droguaient leurs victimes et filmaient ensuite leurs agressions sexuelles. Un sordide stratagème qui leur a voulu le surnom de « Roofie Romeos » [les Roméo de la drogue du viol] par la presse américaine.

Un soir de janvier 2013, la plaignante a témoigné avec aplomb avoir été agressée sexuellement par Georgi Spitzer, alors qu’elle sortait de la douche de l’appartement de ce dernier. Elle venait de lui annoncer la fin de leur relation.

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Georgi Spitzer

L’accusé lui a alors suggéré d’avoir « du sexe », puis l’a lancée sur le lit, selon la plaignante. « Il m’a bloqué la bouche avec sa main. J’arrivais à peine à respirer. Je me battais pour ma vie. Ma seule chance de survie était d’atteindre ses yeux », a-t-elle raconté. Pour sa part, Spitzer a martelé n’avoir « jamais violé » cette femme.

Le juge Tremblay conclut que les souvenirs de la plaignante ne sont « pas fiables », puisque son témoignage entre en contradiction avec sa version donnée aux policiers six ans plus tôt. Le juge comprend mal que la plaignante ait omis de mentionner d’« importants détails » à la police, comme la phrase « Ayons du sexe » lancée par l’accusé avant l’agression. Pour justifier ses omissions, la plaignante soutient qu’elle cherchait à avoir de l’aide des policiers, mais qu’elle ne voulait pas porter plainte pour agression sexuelle. « Une explication à peine convaincante », selon le juge.

Le juge relève également une « importante contradiction » dans le témoignage de la plaignante. Celle-ci a déclaré en interrogatoire principal que son agresseur avait éjaculé à côté d’elle, alors qu’elle a dit qu’il avait éjaculé dans son vagin en contre-interrogatoire.

La plaignante déclare elle-même ne pas avoir un bon souvenir des évènements, souligne le juge. « La Cour reconnaît qu’une victime d’agression sexuelle n’a pas à donner un témoignage irréprochable pour être crue. Cependant, le témoignage de la victime doit être crédible et fiable comme d’autres témoins. Ce n’est pas le cas ici », tranche-t-il dans sa décision.

Le juge ajoute que la plaignante avait aussi une dent contre Georgi Spitzer. Ainsi, son témoignage n’est pas « entièrement désintéressé », dit-il.