Entre mai et décembre 2018, l’aspirant Hells Angels Pascal Facchino – devenu membre depuis – aurait remis à 10 reprises à Claude Gauthier des sommes d’argent provenant de la vente de stupéfiants.

C’est ce qu’a plaidé la procureure de la poursuite, MMarie-France Drolet, au juge Claude Leblond de la Cour du Québec, qui préside depuis plusieurs semaines le procès de Gauthier, pour gangstérisme, complot et trafic de cocaïne.

La preuve contre Claude Gauthier est circonstancielle et le motard de 52 ans est le seul parmi les accusés de l’enquête Orque, menée contre un réseau de trafic de stupéfiants qui opérait dans le secteur de Saint-Jean-sur-Richelieu, à ne pas avoir reconnu sa culpabilité et à avoir demandé un procès.

Tous les autres l’ont fait et ont été condamnés, y compris Facchino, Todd Bissett et Denis Couillard, qui jouaient des rôles importants dans l’organisation, selon la poursuite.

Durant l’enquête Orque, les enquêteurs de l’Escouade nationale de répression du crime organisé (ENRCO), qui avaient notamment installé des micros et des caméras chez Gauthier, chez une proche de Facchino, de même que des caméras, des micros et des GPS dans les véhicules de ces derniers, ont constaté que Facchino avait manipulé de l’argent dans sa camionnette à 29 reprises en trois mois, et qu’il s’était rendu chez Gauthier 59 fois durant l’enquête.

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Pascal Facchino avait manipulé de l’argent dans sa camionnette à 29 reprises en trois mois

Un soir, après une réunion au local des Hells Angels de Trois-Rivières à Saint-Cuthbert, les deux motards ont été filmés dans la maison de Gauthier, portant leur veste.

Facchino cachait notamment de l’argent dans des étuis d’instruments de musique.

Lui et les trafiquants auraient notamment échangé de l’argent de façon subtile, à l’abri des regards d’éventuels policiers fileurs – une nouvelle façon de faire, selon un témoin policier qui a décrit deux vidéos déposées en preuve. Sur l’une d’elles, on voit Facchino qui jette dans l’un des coffres de sa Harley-Davidson un rouleau d’argent récupéré ensuite par l’un de ses interlocuteurs.

Pascal et Claude

Dans leur plaidoirie, MDrolet et sa collègue MIsabelle Poulin ont affirmé que Claude Gauthier était le « propriétaire » du territoire de Saint-Jean-sur-Richelieu pour le trafic de stupéfiants, qu’il se trouvait tout en haut de l’organigramme, que Facchino était immédiatement sous lui, que ce dernier était gestionnaire du réseau de trafic de stupéfiants, qu’il versait à Gauthier une taxe pour exercer sur son territoire et que le réseau écoulait trois kilogrammes de cocaïne par mois.

Les procureures ont évoqué des conversations interceptées par les policiers dans lesquelles Facchino parle de « Claude » ou du « gros », affirmant qu’il s’agissait de Claude Gauthier.

Dans d’autres conversations, Claude Gauthier parle de stupéfiants et emploie des termes propres à ce milieu.

Le 24 octobre 2018, lors d’une conversation avec Facchino chez lui, Gauthier laisse échapper un juron lorsqu’il serait question de perquisitions effectuées par la police à Saint-Jean-sur-Richelieu.

Des conversations enregistrées révèlent également que Facchino réservait des chambres d’hôtel et des roulottes pour Gauthier, en utilisant la carte de crédit de ce dernier, et qu’il prenait des rendez-vous médicaux pour lui.

« Facchino est impliqué dans la vie très personnelle de l’accusé », a déclaré MDrolet.

Les murs ont des oreilles… et des yeux

Le 12 novembre 2018, Claude Gauthier a découvert une caméra de la police chez lui à Nicolet et l’a retirée du mur. Il a passé au moins la nuit suivante dans une auberge de Grand-Mère sans prévenir Facchino, qui devait lui apporter de l’argent le lendemain, selon la poursuite, et sans prévenir un ami avec qui il devait s’entraîner.

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Le 12 novembre 2018, Claude Gauthier (à gauche) a découvert une caméra de la police chez lui et la arrachée. Crédit: photo tirée dune vidéo déposée en cour.

Gauthier s’attendait visiblement à être arrêté par la police ; durant une conversation, il a dit à un individu qu’il avait caché sa veste des Hells Angels dans la bordure d’un mur.

« Ce n’est pas Facchino, le patron. La seule conclusion à laquelle on peut en arriver, c’est qu’il opère un réseau avec Gauthier à qui il paye des redevances », a résumé MDrolet.

Les avocates de Claude Gauthier, MMylène Lareau et MAnnie Lahaise, prononceront leur plaidoirie lundi prochain.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.