Après avoir admis qu’il avait poignardé 19 fois sa femme enceinte avec une fourchette à barbecue, causant des blessures mortelles à son bébé à naître, Sofiane Ghazi revient sur sa décision : le Montréalais de 39 ans a congédié ses avocats et annoncé qu’il voulait retirer son plaidoyer de culpabilité.

« Ils n’ont pas défendu mes droits », a-t-il dit au juge, expliquant qu’il ne faisait plus confiance à ses avocats. « Je pensais qu’ils allaient se battre ».

Cette décision a causé un vif étonnement.

Au début du mois, Ghazi avait coupé court à son procès devant jury pour meurtre au premier degré et tentative de meurtre, en plaidant coupable, à la deuxième journée du procès, à des accusations réduites de meurtre au deuxième degré et de voies de fait.

Il était de retour devant le juge Jean-François Buffoni mardi matin, pour les plaidoiries sur la peine à lui imposer. Sa conjointe devait témoigner en cour du traumatisme vécu lors du drame, qui remonte au 24 juillet 2017.

Cette nuit-là, Sofiane Ghazi, consommateur de crack, se présente au domicile familial, même si une ordonnance le lui interdit. Furieux que sa conjointe, mère de ses deux enfants et enceinte de 36 semaines, ait appelé le 911 pour se plaindre de sa présence, il revient plus tard et l’attaque avec une grande fourchette à viande : 12 coups dans le ventre et sept dans une cuisse.

Une voisine a témoigné, au début du procès, avoir vu la femme « le visage en sang, la bouche en sang, la jaquette en sang, l’entrejambe en sang… ».

Quelques minutes de vie

Le bébé naît à la suite d’une césarienne d’urgence mais, malgré des manœuvres de réanimation et la présence de battements cardiaques, il meurt après quelques minutes. Il a été atteint neuf fois par les coups portés par son père.

Le fait que l’enfant ait vécu brièvement hors du ventre de sa mère est crucial dans cette affaire. C’est ce qui a permis de déposer des accusations de meurtre contre Sofiane Ghazi, même si le bébé a été blessé avant sa naissance, alors qu’il n’avait pas encore le statut d’« être humain », selon la loi.

Mardi, le père a expliqué brièvement qu’il avait plaidé coupable de meurtre en vertu de l’article du Code criminel stipulant qu’il y a homicide lorsque « quiconque cause à un enfant, avant ou pendant sa naissance, des blessures qui entraînent sa mort après qu’il est devenu un être humain ».

Selon lui, il aurait plutôt dû être accusé d’« homicide involontaire coupable », ce que le Code criminel prévoit « si la personne qui l’a commis a ainsi agi dans un accès de colère causé par une provocation soudaine ».

« Je demande pardon pour cette décision », a dit Ghazi, après avoir informé le tribunal qu’il faisait volte-face.

Ses avocats, Me François Taddeo et Me Moulay-Badre Aber, ont expliqué avoir appris mardi matin que leur client ne voulait plus être représenté par eux.

Ce retournement signifie-t-il un nouveau procès pour Sofiane Ghazi ? « Tout est possible », a répondu le procureur de la Couronne, Me Louis Bouthillier.

Le juge a reporté la cause de trois semaines, pour donner le temps à l’accusé de trouver de nouveaux avocats.