«Les enfants ont besoin d'être protégés et maman sera là pour s'en occuper.» Avec aplomb, émotion et tristesse, la mère et les proches de Jolène Riendeau ont tourné le dos à 12 années d'angoisse, de colère, d'impuissance et de chagrin, hier, en célébrant les funérailles de la fillette, dont la disparition a marqué le Québec.

Dans l'église Saint-Charles, où s'étaient entassés des centaines de proches, d'amis et de badauds, l'émotion, mais aussi un immense soulagement collectif étaient palpables. Durant la minute de silence à la mémoire de Jolène, seuls les cris et gazouillis de quelques bébés ont résonné.

Marqués par la disparition ou la mort violente de leur propre enfant, les Martin Provencher, Michel Surprenant et Pierre-Hugues Boisvenu ont assisté aux funérailles. «La disparition de ma fille a duré moins de 10 jours. Les parents de Jolène ont attendu 12 ans. Ils doivent être tristes, mais aussi soulagés. J'espère maintenant que le meurtrier sera retrouvé et que justice sera rendue», a déclaré le sénateur Boisvenu sur le parvis de l'église, avant la cérémonie.

«Jolène a besoin de vous»

Dans un vibrant hommage, la tante de Jolène, Johanne Soucy, a salué le travail des enquêteurs de la section des crimes majeurs du SPVM et de l'organisme Enfant-Retour ainsi que le soutien de la population au fil des années. «Toi Jolène, tu reviens décédée. Maintenant, repose en paix, veille sur nous avec tes ailes et on se reverra un jour. Là-bas. Je t'aime, je t'embrasse, tu peux partir...» a dit Mme Soucy. Elle a raconté que l'écriture l'avait aidée à traverser ces longues années d'attente et a lu quelques extraits de ces mots. «Tu approches de tes 18 ans. On dit que tu peux voler de tes propres ailes, mais celles-ci t'ont été volées. Jamais je ne pardonnerai au tueur...» avait-elle écrit il y a quelques années. En des termes durs, elle a dit attendre avec impatience le jour où l'assassin répondra de ses actes. «Il finira en prison. Je lui souhaite de vivre l'enfer, un calvaire...»

La mère de Jolène, Dolorès Soucy, a pour sa part récité un poème à briser le coeur sur la journée de plus qu'elle aurait aimé partager avec sa fille avant son départ précipité. «Juste pour ce soir quand je glisserai mes doigts dans tes cheveux durant ta prière, je remercierai Dieu de m'avoir fait le plus beau cadeau du monde», a murmuré la maman de Jolène.

Au nom de tous les parents d'enfants disparus, elle a ensuite invité les gens à la suivre dans sa croisade pour aider les enfants. «On a besoin de vous, Jolène a besoin de vous!» a résumé Dolorès Soucy, l'ourson de sa fille dans les mains.

Sur une chanson interprétée par Johanne Blouin, l'église s'est ensuite vidée.

Dehors, la foule s'est scindée en deux pour laisser passer le cortège. Parmi tous ces gens, il y avait Bonny Dallaire, amie d'enfance de Jolène. «Jolène est une petite fleur coupée trop tôt. La dernière fois que je l'ai vue, elle m'a donné deux becs sur les joues en me disant avoir hâte à ma fête le lendemain. Elle a disparu ce jour-là», a confié la jeune femme.

Plusieurs personnes qui ne connaissaient pas Jolène, comme Isabelle Lemay, étaient aussi venues lui rendre un dernier hommage. «Ayant moi-même des enfants, ça me touche beaucoup et j'ai souvent pensé à elle.»

Plusieurs enquêteurs de la Section des crimes majeurs de la police de Montréal, qui portent ce dossier à bout de bras depuis 1999, ont tenu eux aussi à offrir leurs condoléances. «Les derniers développements dans cette affaire nous ont aussi bouleversés, en plus de nous donner espoir», a souligné l'un d'eux.

Moins d'une semaine après avoir annoncé la découverte des restes de Jolène, la police a arrêté un homme de 47 ans. Il a été relâché samedi après un long interrogatoire et demeure le principal suspect.

Sur le parvis de l'église, la mère, le père, le frère et la soeur de Jolène ont libéré des colombes dans le ciel bleu, sous les applaudissements nourris de la foule.

La famille s'est ensuite enlacée, et le rideau s'est enfin abaissé sur cette triste histoire. Du moins jusqu'au prochain acte.