La Société de transport de Montréal (STM) jette du lest dans sa négociation en chassé-croisé avec le seul consortium encore en lice pour réaliser la « colonne vertébrale » du prolongement de la ligne bleue du métro.

Le transporteur vient de reporter pour la troisième fois l’échéance de dépôt des soumissions, en plus de diminuer de façon importante le niveau de risque auquel s’exposeront les firmes qui creuseront le tunnel de six kilomètres.

La STM – qui cherche à éviter un énième déraillement du prolongement – a aussi accepté de limiter son pouvoir de vérification des données financières de ses sous-traitants.

La Presse a révélé mi-novembre qu’il ne restait plus qu’un seul consortium intéressé par le mégacontrat. Mobilité Horizon Bleu, un groupe mené par le géant de la construction Pomerleau, a menacé de ne pas soumissionner si le contrat proposé n’était pas modifié de façon importante. Des « enjeux critiques » pourraient « affecter [sa] capacité à déposer une soumission finale », a-t-il averti.

« C’est sûr que c’est préoccupant, mais [j’ai bon espoir] qu’il va y avoir une entente », avait commenté Valérie Plante, le mois dernier. « Ce n’est jamais le genre d’informations qu’on veut avoir, parce que ce qu’on veut, c’est que ça roule. »

Une rencontre au sommet

Théoriquement, la STM et le consortium ne peuvent pas négocier les termes d’un contrat en plein milieu d’un processus d’appel d’offres.

En pratique, Pomerleau et ses alliés ont utilisé une ligne de communication habituellement consacrée aux questions techniques pour formuler leurs demandes et les conséquences de ne pas les satisfaire. Et La Presse a appris que les deux parties s’étaient rencontrées dans les derniers jours du mois de novembre, dans le cadre d’une « rencontre d’information ».

« Il arrive que ce genre de rencontre soit organisée entre un donneur d’ordre et des entreprises soumissionnaires, le tout selon les encadrements applicables », a indiqué par courriel Kevin Bilodeau, porte-parole de la STM. « La Loi sur les sociétés de transport en commun autorise d’ailleurs la tenue de différentes initiatives d’informations. »

Quelques jours après la rencontre, l’organisation publique a modifié le contrat qu’elle propose au consortium : en cas d’évènement catastrophique (l’écroulement du tunnel pendant le creusage, par exemple), la responsabilité maximale du consortium retenu équivaudra à 30 % de la valeur du contrat.

Ces clauses ne sont virtuellement jamais utilisées dans la réalité, mais pèsent lourdement sur le profil de risque – et donc sur la capacité d’emprunt – des entreprises.

L’échéance du processus a été reportée au 18 janvier, alors qu’elle était initialement prévue en novembre.

Mobilité Bleu Horizon, qui inclut aussi EBC et la française Spie Batignolles, n’a pas voulu commenter le dossier.

« Le bureau de projet travaille avec rigueur pour assurer l’intégrité du processus. Il s’agit d’un exercice mené avec sérieux par une équipe multidisciplinaire compétente », a commenté Kevin Bilodeau, de la STM. « Nous tenons compte des meilleures pratiques de l’industrie visant à assurer un partage équitable des risques entre le donneur d’ouvrage et le futur adjudicataire en tenant compte de la nécessité de s’ajuster aux conditions actuelles du marché. »