Devant la hausse des évènements impliquant une arme à feu, la police de Montréal veut « s’investir davantage » dans l’univers des réseaux sociaux, où certains « exhibent des armes juste pour le plaisir ». Elle lance d’ailleurs un message aux groupes criminalisés : leurs gestes en ligne auront des conséquences juridiques.

« Le terrain le plus chaud présentement semble être les réseaux sociaux. Il va falloir commencer à s’y investir davantage, pour être présents auprès des jeunes », a expliqué Anne Chamandy, qui dirige les communications du SPVM, lors d’une mêlée de presse à l’hôtel de ville mercredi.

Ses propos survenaient à la sortie d’une séance de la Commission sur la sécurité publique, où le corps policier présentait son rapport annuel, selon lequel la moitié des homicides et des tentatives de meurtre commis à Montréal en 2021 impliquait la présence ou l’utilisation d’une arme à feu. Pas moins de 25 129 crimes contre la personne ont été perpétrés à Montréal l’an dernier, soit 17,3 % de plus par rapport à la moyenne des cinq années précédentes, un record depuis 10 ans.

Pour Mme Chamandy, « le futur [de la criminalité] est vraiment dans l’espace virtuel ». « Notre défi, ça sera de penser à tout ça tout en maintenant l’espace traditionnel du crime qui, lui, n’a pas nécessairement disparu », a-t-elle dit.

La porte-parole a du même coup lancé un message aux jeunes qui utiliseraient les réseaux sociaux pour promouvoir des activités criminelles. « Il ne faut pas qu’ils pensent que parce qu’ils sont derrière leur écran et anonyme, ils sont à l’abri de la justice. Nous arrêtons des jeunes qui pourraient faire des menaces, ou qui pensent que c’est cool de déployer ou exhiber une arme juste pour le plaisir », a-t-elle martelé.

Soyez prudents, soyez alertes de ce que vous faites. Et parlez avec des adultes avant de penser que ce que vous faites, c’est une bonne idée pour influencer ou pour essayer d’avoir des likes.

Anne Chamandy, directrice des communications du SPVM

De manière générale, le crime dans l’espace public est plus « désorganisé » qu’avant, selon la cadre. Elle invite d’ailleurs aussi la population en général à « prendre sa part de responsabilité dans sa propre sécurisation ». « Parlez aux policiers, même si c’est le détail le plus anodin. Participez avec nous dans le retour de la sécurisation, et du sentiment de sécurité à Montréal. »

Malgré le contexte actuel, la police montréalaise se dit « encore très en contrôle » de la situation, surtout si elle se compare à « d’autres grandes villes canadiennes » où la criminalité est aussi en forte hausse. « Cela dit, il n’y a aucune décharge qui n’est pas prise au sérieux. Il n’y a rien de banal et de normal, et ça le deviendra jamais à Montréal », a insisté Anne Chamandy.

Plante veut « revoir les méthodes »

Mercredi matin, la mairesse Valérie Plante avait plaidé que la lutte au crime organisé appelle actuellement à une révision des méthodes de répression. « Ce sont vraiment des groupes qui ont changé, le crime organisé a changé, et c’est pour ça qu’on doit revoir nos méthodes, qu’on doit approfondir », a dit Mme Plante mercredi, en appelant à réfléchir le « modèle montréalais ». « Il faut trouver des solutions pour venir cibler cette transformation des groupes, qui entre autres vont chercher des jeunes. »

Elle soutient qu’il faut éviter de « tomber dans le piège de trouver une solution unique ». « Il faut plutôt identifier un ensemble d’outils et d’éléments », dit-elle, en citant l’accès aux espaces verts, à des emplois de qualité, du logement abordable et du transport collectif comme des piliers de soutien aux communautés.

« Chaque gain qu’on fait à loger une famille, à aller chercher du logement social et à avoir du logement abordable pour garder nos familles, pour moi ça contribue à notre définition de la sécurité urbaine », a insisté Mme Plante, en remerciant les policiers pour leur travail « sous-estimé, qu’on ne connaît pas assez ».

La Ville réclame enfin qu’Ottawa aille plus loin qu’un gel des armes de poing, en interdisant carrément leur circulation, ce qui lui permettrait avec le SPVM de « faire un travail qui s’inscrit dans le temps », a soutenu la mairesse. « Est-ce que c’est suffisant ? La réponse est non. Il y a encore du travail à faire au niveau fédéral dans les messages et dans les lois pour nous aider dans notre travail, et surtout faire peur aux criminels, pour qu’ils sentent qu’il y a vraiment une conséquence au port d’armes », a ajouté Mme Chamandy.