Les troupes de Denis Coderre ont finalement dévoilé leur cadre financier, vendredi, à quelques heures du vote. Ensemble Montréal prévoit dégager des revenus de 327 millions d’ici 2025, dont plus de 100 millions dans la dernière année du mandat. Les engagements du parti coûteraient près de 278 millions sur quatre ans, pendant que les investissements dans de grands projets atteindraient 2,4 milliards.

« Moi, ce que je vais recommander, c’est que les dépenses non essentielles soient gelées pour trois mois, avec un gel de nouvelles embauches jusqu’à tant qu’on puisse prendre le contrôle », explique à La Presse le maire de Saint-Laurent et porte-parole du parti en finances, Alan DeSousa. Il promet « moins de dépenses et moins d’emprunts » que sous l’administration Plante.

Plus du tiers des revenus engrangés par la formation, soit 135 millions, proviennent en effet d’un « Plan de redressement des finances de la Ville ». Le groupe chiffre aussi à sept millions les revenus potentiels liés à un « plan de réduction de la paperasse ». Ce cadre financier n’explique toutefois jamais comment le parti compenserait les 289 millions de revenus tirés des droits de mutation, que M. Coderre envisage d’abolir.

M. DeSousa affirme qu’il sera crucial de « générer un surplus pour les mois et les années qui s’en viennent ». « Il faut qu’il y ait une analyse de fond qui soit faite pour chaque dépense, parce que présentement, ce n’est pas sain. On dépense sans fin et sans calculs », fustige-t-il.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Alan DeSousa

Une série de nouvelles impositions fiscales sont au cœur du plan de M. Coderre. Son parti estime qu’une taxe sur les grands stationnements commerciaux – pour inciter ceux-ci à « devenir écoresponsables » – rapporterait jusqu’à 82 millions, pendant qu’une taxe sur les « grands panneaux publicitaires » dégagerait 35 millions, des revenus qui permettraient « d’augmenter le budget de la Ville en culture ». « On ne va pas taxer juste pour taxer, mais bien pour changer les comportements. Si vous avez des îlots de chaleur dans des centres d’achat, ça nous servira à les verdir », dit M. DeSousa.

Son parti envisage aussi de créer une « taxe sur l’insalubrité » qui dégagerait jusqu’à 15 millions sur quatre ans, en plus de 500 000 $ tirés de « l’augmentation des amendes en insalubrité ». L’ajout de 50 000 logements en quatre ans – une promesse-phare de M. Coderre – engrangerait environ 42 millions de revenus. L’utilisation de surplus « non affectés », enfin, rapporterait 10 millions.

« On aurait apprécié débattre »

Au cabinet de la mairesse Valérie Plante, la critique n’a pas tardé. « Si ce cadre était un tant soit peu sérieux, il ne serait pas déposé à moins de 24 heures du vote. On aurait apprécié débattre au cours des dernières semaines des erreurs glissées dans son cadre financier, questionner Denis Coderre sur son plan de coupes de 135 millions, par exemple. Malheureusement, Ensemble Montréal a choisi de déposer un document important à la toute dernière minute », dénonce l’attachée de presse, Marikym Gaudreault.

Dès le début de la journée, vendredi, Valérie Plante était passée à l’attaque, en affirmant que la présentation de ce cadre financier au dernier jour de la campagne « est irrespectueuse du processus démocratique ». « Denis Coderre démontre qu’il est encore un adepte de l’opacité. Il sera impossible, à 24 heures du vote, d’analyser sérieusement ce cadre financier », a aussi dénoncé sa potentielle numéro 2, Dominique Ollivier.

« Le plan qu’on dépose est le plus complet possible. On n’a pas fait ça en improvisation comme Mme Plante. En annonçant son cadre financier tôt, elle a ajouté d’autres promesses qui n’y sont pas reflétées », leur a rétorqué M. DeSousa à ce sujet.

Une idée des dépenses

C’est l’embauche d’environ 250 policiers qui coûterait le plus cher au parti, totalisant 110 millions d’ici 2025. Une somme de 50 millions irait comme prévu aux Sociétés de développement commercial (SDC). Quelque 37 millions de dépenses iraient enfin dans la « stratégie de santé urbaine » en itinérance, qui inclurait des haltes-chaleur « 24 heures sur 24 » et des logements sociaux « ciblés pour les itinérants ». L’implantation de la gratuité dans le métro et les bus pour les 65 ans et plus coûterait 25,5 millions.

17 millions : C’est le montant budgété pour convertir 3000 locaux pour bureaux en logements. Ensemble Montréal veut faire débloquer une « enveloppe consacrée » de 40 millions, avec l’aide de Québec et d’Ottawa si nécessaire.

Côté immobilisations, environ 660 millions seraient dédiés à l’intégration du REM de l’Est dans les quartiers, un engagement qu’avait déjà pris Valérie Plante pendant la campagne, en promettant 500 millions. Au total, ce sont 2,4 milliards qui sont prévus sur dix ans dans de grands projets.

En rafales, 180 millions iraient au programme « Aucune rue sans arbres », 240 millions à la réforme du Programme d’aide à l’acquisition résidentielle et 100 millions pour le lancement de négociations avec Ray-Mont Logistiques, en vue du rachat de ses terrains dans l’Est de Montréal. La « cité étudiante » que veut développer l’ancien maire bénéficierait d’un budget d’environ 30 millions.