La Ville de Montréal prévoit que son budget annuel dépassera la barre des 7 milliards dès 2024, et qu’il faudra travailler fort pour combler des manques totalisant 780 millions sur trois ans, selon le « cadre budgétaire préliminaire » rendu public jeudi par l’administration Plante-Dorais.

Le président du comité exécutif, Benoit Dorais, a présenté cet exercice comptable, largement théorique, comme un effort de transparence budgétaire sans précédent. Il vise à fournir à la population le portrait réel de l’état des finances publiques, à la veille de la prochaine campagne électorale municipale.

« C’est un document sérieux, qui a été préparé par les professionnels du service des finances de la Ville, avec le secrétaire général de la Ville et le trésorier de la Ville », a insisté M. Dorais.

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Benoit Dorais, président du comité exécutif de la Ville de Montréal

Ce portrait « préélectoral » des finances de la Ville devrait aussi permettre de mesurer la faisabilité des engagements des candidats à la mairie, à l’aune des chiffres apparaissant dans ces prévisions budgétaires.

Mais que disent-ils, ces chiffres, au juste ?

Une hausse des dépenses de 900 millions

En 2021, les Montréalais ont profité d’un gel de taxe foncière imposé par la ville centre (des arrondissements en ont ajouté). Et malgré des acrobaties qui ont été nécessaires pour balancer les chiffres en temps de pandémie, la Ville a tout de même présenté en novembre 2020 un budget équilibré de 6,17 milliards pour l’année en cours.

Dans trois ans, selon ces prévisions, le budget de la Ville devrait passer à un peu moins de 7,1 milliards. C’est une augmentation des dépenses de presque 900 millions, sur trois ans, qui représente une hausse de 14,6 % par rapport au budget de cette année.

Budgets 2021–2024

  • Budget réels 2021 : 6 166 498 700 $
  • Budget anticipé 2022 : 6 516 448 000 $
  • Budget anticipé 2023 : 6 728 604 700 $
  • Budget anticipé 2024 : 7 065 145 400 $

Source : Ville de Montréal

En revanche, durant la même période, le portrait financier de la Ville prévoit des revenus plus élevés d’à peine 120 millions pour 2024, une hausse de moins de 2 % par rapport à cette année. Selon ces prévisions, les revenus actuellement prévisibles de la Ville seraient même légèrement en baisse, en 2023. Le calcul des revenus de taxes municipales a été établi sur l’hypothèse d’une hausse annuelle égale à l’inflation d’environ 2 %.

Revenus 2021–2024

  • Revenus (réel) 2021 : 6 166 498 700 $
  • Revenus anticipés 2022 : 6 205 019 000 $
  • Revenus anticipés 2023 : 6 183 741 100 $
  • Revenus anticipés 2024 : 6 285 923 000 $

Source : Ville de Montréal

Un trou réel de 311 millions

Il résulte des chiffres ci-dessus un « déficit » hypothétique de 779 millions en 2024 entre les dépenses prévues et les revenus anticipés par la Ville. Bien que ce portrait reste largement théorique, qu’il soit appelé à être bonifié et à s’adapter aux priorités du moment, il montre une tendance à l’augmentation des dépenses de presque 5 % par année, en moyenne, et l’absence apparente de nouvelles sources de revenus assurées pour la financer.

C’est le cas pour le budget municipal de 2022, déjà en préparation, où apparaît actuellement un « trou » réel de 311 millions. Le directeur général de la Ville, Serge Lamontagne, a rappelé qu’un manque à gagner d’une telle somme, à ce stade de la préparation d’un budget, n’est pas rare, « mais qu’on arrive toujours à présenter quand même un budget équilibré ».

Ni les fonctionnaires présents ni le président du comité exécutif n’ont voulu s’exprimer sur les intentions de l’administration, à la veille du scrutin municipal.

Les « stratégies » potentielles pour équilibrer le budget, présentées dans le document de la Ville, restent assez vagues : revoir les activités, changer des priorités d’investissement de l’administration ou réduire les dépenses, par exemple.

La négociation de possibles ententes avec les ordres supérieurs de gouvernement, notamment pour le financement des transports collectifs, une augmentation des taxes foncières, la mise en place de mesures d’écofiscalité pour favoriser l’atteinte des objectifs de la transition écologique et des revenus plus élevés que prévu en provenance des droits de mutation immobilière sont parmi les avenues envisagées pour augmenter les revenus de la Ville.