Le Grand Montréal fait partie du peloton de tête des régions métropolitaines où l’avenir de la mobilité urbaine est le mieux assuré, même si le navetteur moyen y perd l’équivalent de six jours de sa vie, chaque année, dans la congestion routière.

La firme internationale de comptables et de consultants Deloitte a rendu public hier soir le feuillet montréalais de son « indice de mobilité urbaine », qui analyse les services de transport, leur qualité, leur accessibilité ainsi que les environnements politiques et réglementaires qui en régissent le développement et l’exploitation dans une soixantaine de grandes villes du monde.

Montréal est la troisième ville canadienne, après Toronto et Vancouver, à faire l’objet de cette analyse multicritère par la firme Deloitte, qui considère la mobilité comme « un vecteur économique de première importance au Canada ».

Selon les notes attribuées à la métropole du Québec dans son analyse, que La Presse a obtenue, c’est Montréal qui recueille l’indice de mobilité urbaine le plus élevé des grandes villes du Canada, grâce à « l’un des réseaux de transport public les plus verts et les plus vastes en Amérique du Nord » et à des programmes de modernisation des infrastructures qui se traduiront par l’émergence d’« un réseau ultramoderne » de transport.

« Un momentum très fort »

Selon le responsable du volet mobilité pour le Québec chez Deloitte, David De Grandpré, « la région de Montréal présente une position enviable, dans le premier tiers des 60 villes étudiées jusqu’à présent », en raison de sa vision proactive des réseaux de transport et des projets majeurs en cours de développement.

Avec le Réseau express métropolitain (REM), que la Caisse de dépôt et placement du Québec est en voie d’implanter au coût de 6,3 milliards dans la métropole, et des projets tels que le Service rapide par bus du boulevard Pie-IX et le prolongement de la ligne bleue du métro, la région de Montréal pourrait bien se hisser parmi les leaders mondiaux en matière de mobilité urbaine, croit M. De Grandpré.

« Il y a un momentum très fort en ce moment, estime l’analyse de la firme Deloitte, et une nouvelle volonté de collaboration plus efficace entre les divers acteurs du transport. Ce n’est plus seulement sur papier que les choses se passent, c’est dans l’action et les idées », avec des projets prometteurs dont le financement a été annoncé et bouclé.

145 heures dans les bouchons

La région de Montréal n’en demeure pas moins un cancre, parmi les grandes régions métropolitaines du monde, en ce qui concerne la fluidité de son réseau routier. Avec une note de 2 sur 5 seulement, sa seule sous la moyenne parmi les 15 critères évalués, Montréal présente « un problème particulier » de congestion routière.

Selon la firme Deloitte, « le navetteur moyen passe plus de 145 heures par année » – soit l’équivalent de six journées complètes de sa vie ! – dans des embouteillages causés par « des programmes continus de travaux publics et de réparations du réseau routier ».

Montréal ne brille pas beaucoup, non plus, en matière de fiabilité des services, si on compare la métropole du Québec à d’autres villes dotées de réseaux de transport urbain performants.

Les autobus de la STM tombent en panne de deux à trois fois plus souvent que les autobus de Toronto.

La firme Deloitte, dans son bulletin

La société affirme que la fréquentation du réseau de bus de la Société de transport de Montréal a diminué de plus de 13 % au cours des cinq dernières années.

L’accessibilité des réseaux aux personnes handicapées de même que l’intégration des réseaux, et celle des tarifs, sont aussi des domaines « où la ville accuse un retard sur ses pairs ».

« Avide » de nouveauté

Montréal n’en est pas moins la première ville en Amérique du Nord, affirme Deloitte, qui ait favorisé l’implantation de services d’autopartage sur son territoire, et l’une des plus actives pour augmenter la part des déplacements réalisés à vélo ou à pied, comme le démontre l’augmentation continue du nombre d’abonnés à BIXI.

Deloitte estime de plus que Montréal « est un adopteur avide de nouveaux modes de transport », comme semblent l’avoir compris les promoteurs de vélos ou de trottinettes électriques qui se bousculent au portillon pour obtenir leur part d’espace dans le domaine public.

Comment Montréal se compare à…

Amsterdam, leader mondial

Parmi les grandes régions métropolitaines d’Europe, Amsterdam est une sorte de modèle idyllique de mobilité durable. Selon Deloitte, le matin, pendant la période de pointe, pas moins de 61 % des déplacements effectués par les résidants le sont à vélo (32 %) ou à pied (29 %). La part modale de ces modes de transport actif, à Montréal, vu comme un modèle en Amérique du Nord, atteint 7 % des déplacements matinaux. Dans la métropole néerlandaise, c’est à peine 20 % des déplacements en période de pointe du matin qui sont effectués en automobile. À Montréal, c’est 68 %.

Boston, sa jumelle américaine

Avec des territoires régionaux de taille comparable, des populations métropolitaines d’environ 4 millions d’habitants et une densité de population fort semblable, Montréal et Boston sont comme des jumelles nord-américaines, à qui Deloitte donne des notes semblables sur le plan de la mobilité. Les différences : des transports publics plus abordables et une plus grande variété de services dans la métropole du Québec ; des réseaux mieux intégrés, et un cadre réglementaire plus efficace pour en favoriser le développement, dans la région de Boston. Mais dans un cas comme dans l’autre, une congestion routière préoccupante.

Delhi (en Inde), parmi les pires

La région de la capitale indienne, où vivent 22 millions de personnes, figure parmi les agglomérations où la mobilité est un défi quotidien, selon l’indice Deloitte. Les réseaux de transport urbain y assurent presque le tiers des déplacements en période de pointe du matin (24 % à Montréal), et l’usage de l’automobile (9 %) y arrive loin derrière la marche (35 %) comme principal mode de déplacement. Delhi est aussi l’une des villes les plus congestionnées du monde. Le développement urbain ne prend pas en compte les besoins en transport, et les politiques publiques ne favorisent pas l’investissement dans les services de transport public.

Toronto

Selon l’indice Deloitte, Toronto est moins congestionné que Montréal, et les services de transports en commun y sont plus fiables qu’à Montréal. La métropole québécoise est toutefois sur un élan inspiré, encadré par des politiques plus claires, un meilleur financement pour les projets en cours, et un environnement politique et réglementaire plus favorable au développement d’une mobilité plus durable. Mais selon les comptables, la qualité de l’air serait meilleure à Toronto. Ah ouais ?