Une ferme maraîchère, une forêt en ville, une tour en bois massif, un espace de travail net zéro, 250 logements au fil de l’eau… Dévoilé hier par la mairesse de Montréal Valérie Plante, le gagnant du concours « Reinventing Cities » propose de transformer le mode de vie de ses habitants pour lutter contre le réchauffement climatique.

Il verra le jour, dans quatre ans, sur le site de la cour de voirie de la Commune (987, rue de la Commune Ouest), bordé par l’autoroute Bonaventure et le canal de Lachine.

« Nous, on fournit le terrain », a dit la mairesse Plante, en point de presse à la Maison des marins, place d’Youville. « Mais après ça, c’est les promoteurs qui doivent faire le montage. »

En tout, 15 équipes avaient soumis des projets verts et innovants à la suite de l’appel lancé par Montréal dans le cadre de ce concours auquel participent 13 autres métropoles dans le monde. Quatre finalistes avaient été choisis en septembre 2018, au terme d’une première étape de sélection par un jury composé de sept personnes.

L’équipe lauréate est formée de Pomerleau, Ivanhoé Cambridge, ACDF Architecture, Gensler architecture et l’ŒUF (Office de l’éclectisme urbain et fonctionnel). Elle doit acquérir le terrain mis à sa disposition par la Ville à sa valeur marchande, soit 4,76 $ le mètre carré. Superficie du terrain : 9000 mètres carrés.

« Ils ont quatre ans pour développer le site, précise Mme Plante. Sinon, ils perdent le terrain. Je ne vous cacherai pas que c’est une façon de mettre une certaine pression. Oui, les dessins sont beaux, la maquette est belle, mais on veut que ça sorte de terre. »

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Valérie Plante, mairesse de Montréal, en point de presse à la Maison des marins, hier

Un délai réaliste ?

Est-ce que ce délai de quatre ans est réaliste ?

« On a construit le pont Champlain en quatre ans. On va construire le REM en moins de quatre ans. Ça devrait être possible », répond Pierre-Luc Dumas, vice-président principal chez Pomerleau, à la tête de l’équipe lauréate.

Le projet, appelé « Demain Montréal », comprend 250 logements, dont 50 sociaux-communautaires pouvant héberger des familles à faible revenu. En son cœur se trouvera le « souk », un lieu voué à l’économie circulaire, incluant un « fab lab » (atelier collaboratif), une épicerie et des restaurants zéro déchet, ainsi que des services éducatifs promouvant un comportement écologique. Le projet offrira aussi à ses habitants une forêt urbaine, un verger et une ferme aéroponique pour la production alimentaire locale.

Il a un objectif carbone neutre ambitieux pour réduire au maximum son empreinte écologique et mise sur une stratégie d’engagement communautaire.

« Les technologies qu’on emploie, c’est pas de la science-fiction, dit M. Dumas, de Pomerleau, un acteur important dans l’industrie de la construction au Québec. Mais le défi, c’est d’être capable de les assembler. Par exemple, on a une enveloppe super performante qui a des composantes de bois laminé et on étudie la possibilité de faire une structure de bois pour un bâtiment en hauteur. On nous demande de faire un suivi du projet sur 10 ans. »

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Pierre-Luc Dumas, vice-président principal chez Pomerleau

On comprend qu’on n’est pas uniquement dans l’évolution du projet immobilier, mais aussi des comportements des gens qui vont y habiter. Il ne s’agit pas d’être vertueux, mais plutôt d’être beaucoup à gérer imparfaitement.

Pierre-Luc Dumas, vice-président principal chez Pomerleau

Un projet parmi 31

La cour de voirie de la Commune est un des 31 terrains à réaménager dans le monde dans le cadre de Reinventing Cities, un concours lancé en novembre 2017 par le réseau C40 pour encourager la régénération urbaine à faible émission carbone.

Organisation internationale de lutte contre les changements climatiques, le C40 a été créé en 2005 par l’ancien maire de Londres Ken Livingstone.

Ce réseau réunit près de 90 des plus grandes villes de la planète autour du même objectif : favoriser la mise en place de programmes et de mesures pour réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre et permettre l’émergence de pratiques respectueuses de l’environnement.

« Le projet Reinventing Cities ouvre la voie, il montre ce qui est possible dès aujourd’hui et donne à voir des projets phares qui serviront de modèles demain », explique Hélène Chartier, partenaire principale du C40 et chef de projet de Reinventing Cities, à New York.

« Il sert de catalyseur du changement dans les administrations des villes et aussi dans les bureaux d’architecture et de promotion immobilière. Le défi n’est pas vraiment technologique, poursuit Mme Chartier. Les solutions sont pour beaucoup déjà connues. Le défi consiste surtout à combiner ces solutions et à les développer rapidement. »

Il s’agit de la première participation de Montréal à Reinventing Cities, mais ce ne sera pas la dernière. « On a l’intention de continuer à participer à ce programme parce qu’on voit à quel point c’est intéressant », confirme la mairesse Plante.

En chiffres

14

Nombre de métropoles dans le monde qui ont répondu à l’appel de projets de Reinventing Cities : Montréal, Vancouver, Auckland, Chicago, Houston, Madrid, Milan, Oslo, Paris, Portland, Reykjavik, Rio de Janeiro, Salvador et San Francisco.

14

Nombre de partenaires qui composaient, en moyenne, les équipes finalistes, à Montréal. « C’est un chiffre important », dit Hélène Chartier. « Il montre que les équipes ont dépassé le traditionnel trio promoteur, architecte et ingénieur pour intégrer aussi des associations locales, des start-up, des artistes, des acteurs de terrain qui, eux aussi, sont prêts à proposer un nouveau modèle de ville. »

7

Nombre de membres du jury, dont deux internationaux, qui ont sélectionné les quatre projets finalistes à Montréal : Nathalie Bleau, d’Ouranos, Hélène Chartier, partenaire principale du C40 et chef de projet de Reinventing Cities, Carmella Cucuzzella, de l’Université Concordia, Ronald Gagnon, de Concept-R, et les architectes Lina Ghotmeh, Owen Rose et Peter Soland.

23

Nombre de villes qui ont signé, en 2018, la déclaration portée par le réseau C40 sur les bâtiments zéro carbone, s’engageant à ce que tous les nouveaux bâtiments soient net zéro d’ici 2030, et que l’ensemble des bâtiments de la ville le soient d’ici 2050.