La crise du recyclage rattrape à nouveau Montréal alors que la collecte est perturbée dans plusieurs arrondissements. La Ville de Montréal a par ailleurs décidé d'inscrire à sa « liste grise » l'une des entreprises responsables du transport des matières en raison de ses nombreux ratés.

Des milliers de bacs de recyclage sont restés à la rue cette semaine à Montréal sans que leur contenu soit ramassé. La situation a principalement affecté quatre arrondissements, soit LaSalle, Verdun, Villeray-Saint-Michel-Parc-Extension et Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce. D'autres secteurs ont connu des « ralentissements majeurs » dans la collecte, dont Ahuntsic-Cartierville.

Ces ratés dans la collecte sont dus aux longs délais au centre de tri du Complexe environnemental Saint-Michel, où les camions doivent aller porter le recyclage. « Le contexte de crise du recyclage entraîne des fluctuations dans l'écoulement des matières, ce qui a des impacts au centre de tri même, mais aussi sur le transport des matières », explique Laurence Houde-Roy, porte-parole de l'administration Plante.

Les problèmes ont été particulièrement importants mercredi, journée la plus achalandée dans la collecte du recyclage sur l'île. Plusieurs camionneurs perdent ainsi un temps important pour se décharger, ce qui étire leur journée de travail.

Excédés, certains transporteurs ont décidé cette semaine que c'en était trop. 

« Des fournisseurs qui effectuent la collecte ont annoncé qu'ils cesseraient de déroger à la loi 430 sur les heures de travail et qu'ils cesseraient leur collecte à 19 h, qu'elle soit terminée ou non. »

- La porte-parole Laurence Houde-Roy

La loi limite en effet le nombre d'heures de conduite des véhicules lourds et force les entreprises à donner du repos à leurs chauffeurs. C'est d'ailleurs pour cette raison que Montréal doit parfois suspendre ses opérations de déneigement l'hiver.

Hier, constatant que la collecte ne serait pas complétée, l'arrondissement de Verdun a ainsi demandé à ses citoyens d'enlever du bord de la rue leur bac de recyclage, même si le contenu n'avait pas été collecté. Ils devront le remettre à la rue seulement la semaine prochaine.

Montréal espère maintenant voir le gestionnaire du centre de tri réduire les délais. Pour y arriver, l'entreprise pourrait demander une autorisation spéciale pour détourner une partie des camions vers un autre site. Cette solution a déjà été utilisée dans le passé, mais l'entreprise n'en a pas encore fait la demande. Il faut dire que la métropole n'est pas la seule à vivre les contrecoups de la crise du recyclage et que trouver un autre centre de tri prêt à accueillir les matières montréalaises pourrait s'avérer difficile. La fermeture des portes de la Chine à l'importation de recyclage complique la revente des ballots de matières québécoises.

TRANSPORTEUR SANCTIONNÉ

Ces ratés dans la collecte surviennent au moment même où Montréal a décidé de sanctionner une entreprise responsable de ramasser une partie du recyclage. L'administration Plante a en effet inscrit Services Ricova sur la liste des fournisseurs au rendement insatisfaisant. Pendant deux ans, la métropole pourra ainsi refuser d'accorder un contrat à Ricova dans le cadre d'un appel d'offres.

L'entreprise a cumulé les ratés depuis qu'elle a pris en charge la collecte du recyclage dans l'arrondissement Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce (CDN-NDG), en 2017. Montréal lui a en effet envoyé pas moins de 73 avis de pénalités, pour un total de 100 400 $. Les problèmes étaient nombreux : manque de respect de l'horaire des collectes, enlèvement incomplet des matières, nombre insuffisant de camions et retards.

La qualité du service n'étant pas au rendez-vous, l'arrondissement avait dû envoyer des cols bleus en renfort l'été dernier. Le contrat a finalement été résilié au mois d'août.

Ricova blâmait à l'époque les longues files d'attente au centre de tri pour justifier ses problèmes. Montréal estime toutefois que l'entreprise n'a jamais respecté le nombre de camions prévus au contrat.

Le transporteur avait décroché en août 2017 un contrat de 2,8 millions pour assurer le service pendant trois ans dans tout CDN-NDG, soit jusqu'en 2020. Ce prix était nettement inférieur aux estimations de la Ville, qui s'attendait à payer 45 % de plus. Dès février 2018, Ricova a avisé Montréal qu'elle souhaitait résilier son contrat, disant perdre trop d'argent.

L'entreprise a aussi connu des difficultés dans Ahuntsic-Cartierville. L'arrondissement du nord de l'île avait placé l'entreprise sous surveillance après des ratés dans la collecte des résidus alimentaires, l'été dernier. Son contrat est toutefois arrivé à échéance hier, et c'est une nouvelle entreprise qui assurera le service à partir de lundi.

La liste des firmes à rendement insatisfaisant compte présentement 10 entreprises, principalement du domaine de la construction.

Les ratés dans la collecte à Montréal sont dus aux longs délais au centre de tri du Complexe environnemental Saint-Michel, où les camions doivent aller porter le recyclage.

1264 Nombre de plaintes reçues par l'arrondissement sur la qualité du service de Ricova en 2018. C'est huit fois plus qu'en 2017, où 159 plaintes avaient été enregistrées.