Le Grand Prix du Canada à Montréal a la réputation malheureuse de créer un environnement propice à l'exploitation sexuelle et à la traite de personnes, mais le groupe Stella estime qu'il s'agit d'un mythe servant surtout à alimenter des opérations annuelles des autorités contre les travailleuses du sexe.

Chaque année, divers groupes orchestrent des campagnes pour contrer ce qu'ils perçoivent comme une intensification du phénomène, mais Stella, une organisation montréalaise qui soutient les travailleuses du sexe, affirme qu'il n'y a pas de preuve montrant que l'événement sportif a une telle influence.

Toutefois, durant la semaine qui précède le Grand Prix, les femmes travaillant dans le commerce sexuel font face à une présence policière accrue, de même qu'à une répression ayant un effet à long terme, soutient la directrice générale de Stella, Sandra Wesley.

Mme Wesley explique que les policiers interviennent auprès de centaines de travailleuses du sexe sous prétexte de rechercher des victimes d'exploitation sexuelle et les retracent par l'entremise de publicités en ligne et d'autres techniques. Des travailleuses du sexe étrangères dont le statut n'est pas en règle risquent de faire face à la déportation, souligne-t-elle.

La directrice générale de Stella soutient qu'il y a un «environnement très répressif» durant la fin de semaine du Grand Prix, et que les impacts se font ressentir durant toute l'année «étant donné que cela crée effectivement un climat de peur au sein de l'industrie du sexe».

«Année après année, ils réalisent cette opération, ils ne trouvent jamais de victimes de la traite de personnes et, s'ils y arrivent, c'est extrêmement marginal et des opérations comme celles-là ne font que rendre l'industrie encore plus clandestine», fait-elle valoir.

Une coalition de groupes de femmes affirme, selon sa propre expérience, qu'il y a effectivement une augmentation du recrutement et de l'exploitation durant la semaine très touristique du Grand Prix - dont l'édition 2018 se conclut dimanche.

«Il est difficile de nier les expériences (des femmes défendues par Stella), mais elles ne sont pas tout à fait cohérentes avec ce que l'on voit et nous sommes tous des groupes qui travaillent avec les femmes», fait valoir Éliane Legault, une porte-parole de la Concertation des luttes contre l'exploitation sexuelle.

Mme Legault affirme que son organisation a lancé une campagne sur plusieurs fronts cette année, utilisant notamment les médias sociaux pour conseiller aux filles âgées de 15 à 18 ans d'être prudentes face aux offres qui leur promettent de gagner de l'argent facilement.

«Nous demandons aux jeunes femmes de suivre leur instinct, d'exercer leur jugement critique», dit Mme Legault.

Le commandant de la police de Montréal Michel Bourque, qui dirige aussi une force d'intervention spéciale contre l'exploitation, affirme ne pas pouvoir dire avec certitude pourquoi le Grand Prix serait plus propice à la sollicitation de services sexuels.

La police a rapporté une vingtaine d'arrestations l'an dernier, notamment plusieurs pour la sollicitation de services auprès de personnes mineures.