Plus de 730 chèques de remboursement d'impôts perdus dans le système et finalement reçus par des citoyens. Un règlement pour interdire l'enlèvement de déchets la nuit, une pratique qui empoisonnait la vie des résidants du centre-ville. Une application uniforme, de Pierrefonds à Pointe-aux-Trembles, des règles pour la cession des ruelles aux propriétaires.

Quelques milliers de Montréalais ont ainsi pu profiter en 2010 de l'intervention de l'ombudsman de la Ville de Montréal, Johanne Savard. Celle qui se veut le porte-voix des simples citoyens dans la machine municipale a été saisie de 1444 dossiers l'an dernier - soit exactement le même nombre qu'en 2009, selon le rapport annuel publié plus tôt cette semaine. Son équipe a procédé là-dessus à 230 enquêtes plus approfondies, sur des sujets aussi variés que des terrasses trop bruyantes, des cyclistes indisciplinés, des vignettes de stationnement refusées ou un logement social impossible à obtenir.

Les trois arrondissements qui ont donné le plus de travail à l'ombudsman sont le Plateau-Mont-Royal, Ville-Marie et Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce. «C'est tout à fait normal, ce sont des arrondissements de densité très forte, où on trouve une cohabitation quasi incestueuse entre le résidentiel, le commercial et l'industriel ou l'institutionnel», a expliqué en rencontre de presse Mme Savard.

En poste depuis 2003, avec un renouvellement de mandat cette année jusqu'en 2015, l'ombudsman estime que son service a pu contribuer à prévenir des problèmes aux citoyens. Si certains arrondissements ou services ont pu se faire tirer l'oreille dans le passé, en raison de leur manque de collaboration, aucun ne s'est distingué l'an dernier par sa mauvaise volonté, précise Mme Savard.

Un toit illégal... puis légal

Sur les 1444 plaintes reçues, 575 ont été écartées d'emblée parce qu'elles n'entraient pas dans la juridiction de l'ombudsman - comme les plaintes concernant le comportement d'un policier ou la Société de transport de Montréal. Par ailleurs, 639 ont été acheminées au bureau du vérificateur général. Sur les 230 ayant fait l'objet d'une enquête, 19 recommandations à des arrondissements ou services de la Ville ont été suivies. Et 62 ont finalement été considérées comme «complètement réglées».

Les exemples foisonnent dans le rapport annuel. À Pierrefonds-Roxboro, un citoyen a reçu l'ordre de démolir son toit en PVC, un matériau non permis au moment de la construction... mais que l'arrondissement prévoyait rendre légal dans les mois suivants. Les autorités, à la suite de l'intervention de l'ombudsman, ont accepté de suspendre la demande de démolition jusqu'à ce que le règlement rende le toit en PVC conforme.

Partout en ville, des bornes de paiement pour le stationnement sur rue sont trop hautes pour les personnes handicapées. Stationnement de Montréal a accepté de les baisser de 40 mm, ce qui suffit à rendre leur écran et l'insertion de la carte de crédit accessible à une personne en fauteuil roulant. L'an dernier, 450 bornes ont ainsi été abaissées.

Médias sociaux recherchés

Certaines interventions sont moins réussies. Dans le Vieux-Montréal, par exemple, des voisins se plaignent des bruits de la terrasse du Boris Bistro et ce, depuis des années. Des constats d'infraction ont été donnés, ceux-ci ont été contestés par le commerçant... et «à ce jour, aucune solution efficace n'a été trouvée», peut-on lire dans le rapport annuel.

Parmi les dossiers les plus inquiétants, justement, l'ombudsman signale la question des terrasses de bar ou de restaurant en milieu résidentiel. «Quand on tombe sur un propriétaire qui ne veut pas collaborer, c'est très difficile, ça peut prendre des années à se régler, précise-t-elle. Quand on donne un permis de ce genre, il faut s'assurer des conséquences sur le voisinage, prévoir l'impact sur les gens.» L'autre grand sujet de préoccupation, ce sont les pistes cyclables. «Certains en veulent plus, d'autres moins. Certains en voudraient une dans leur quartier, mais pas devant chez eux. On dénonce le comportement agressif des automobilistes... puis celui des cyclistes.»

Statistiquement, le sujet de plainte numéro un concerne le logement - HLM, subvention ou logement social -, avec 105 signalements. Les problèmes d'horaire ou de disponibilité à la cour municipale (89), le comportement d'un employé (79) et le stationnement (75) sont les trois autres domaines les plus problématiques pour les Montréalais.

Le principal défi du bureau de l'ombudsman est aujourd'hui «son manque de notoriété», estime Mme Savard. Le site internet sera modernisé dans les prochains mois et se mettra à l'ère des médias sociaux, avec notamment l'ajout d'un blogue. «Il faut trouver une façon de se rapprocher les gens... mais sans y engloutir toutes nos ressources», dit l'ombudsman.