Un autre policier du service des enquêtes spécialisées de la Ville de Montréal a été relevé de ses fonctions, a appris La Presse. L'homme est soupçonné d'avoir détourné environ 10 000$ d'un budget destiné à combattre la contrebande du tabac.

Selon nos sources, il s'agit d'Yves Miron, inspecteur à la division du renseignement du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). Son «déplacement administratif» est survenu à la fin avril, nous indique-t-on.

Le porte-parole du SPVM, Ian Lafrenière, a confirmé qu'un policier avait été relevé de ses fonctions, mais il n'a pas voulu dire son nom ni les motifs de l'enquête interne. «Il faut être prudent, dit-il. Ce ne sont que des allégations. Il n'y a pas d'accusation.»

Ce policier est le cinquième du service des enquêtes spécialisées à être relevé de ses fonctions depuis quelques mois. La semaine dernière, La Presse a révélé que François Bouffard, commandant à la division du crime organisé, fait l'objet d'une enquête interne. L'enquête est liée aux projets immobiliers de son entreprise familiale. Elle a débuté à la suite de renseignements venus de l'escouade Marteau, selon nos sources. Aucune accusation n'a été portée.

Les allégations concernant Yves Miron n'ont rien à voir avec l'immobilier. Elles concernent plutôt l'utilisation des fonds du programme ACCES destiné à contrer la contrebande d'alcool et de tabac, nous indiquent plusieurs sources.

Selon nos informateurs, Yves Miron aurait puisé dans le budget du programme ACCES pour acheter du matériel électronique d'une valeur d'environ 10 000$ à des fins qui ne sont pas liées au programme. Il aurait donné le matériel (des ordinateurs portables, des iPad ou des écrans de télévision) à d'autres policiers mais l'aurait aussi utilisé à ses fins personnelles, selon les allégations.

Ces faits n'ont pas été prouvés et n'ont pas fait l'objet d'accusations. Yves Miron n'a pas rappelé La Presse pour s'expliquer. Selon nos sources, il soutient avoir acheté ces équipements pour le travail.

Le programme ACCES vise à lutter contre la contrebande de cigarettes, notamment. Son objectif est d'augmenter la probité dans le commerce du tabac et de démanteler les réseaux illégaux. Les corps policiers du Québec collaborent avec Revenu Québec, qui cherche à réduire les pertes fiscales du gouvernement.

Yves Miron a de longs états de service. Avant d'être inspecteur, il a notamment été commandant à la division du crime organisé. La dernière opération d'envergure où il a été cité par les médias date de juin 2009. Les policiers du SPVM avaient alors fait une importante rafle chez les Hells Angels. Une cinquantaine de personnes liées au trafic de drogue et à la contrebande de tabac avaient alors été arrêtées, dont Salvatore Cazzetta. Au fil de leur enquête, les policiers avaient saisi des roches de crack, de la méthamphétamine, de la cocaïne, de la marijuana, du tabac et des armes à feu.

En juin 2010, Yves Miron a également été cité par des médias concernant le démantèlement de deux réseaux de vendeurs illégaux de cigarillos d'origine asiatique et arabe, auxquels 200 policiers avaient participé.

Atmosphère tendue au SPVM

D'autres policiers ont aussi fait l'objet d'enquêtes ces derniers temps. En plus d'Yves Miron et de François Bouffard, il y a Alain Thibeault, de la division du crime organisé.

En février 2011, cet ex-commandant responsable des produits de la criminalité a été accusé d'avoir produit de fausses déclarations aux douanes sur la valeur de deux véhicules récréatifs qu'il tentait d'importer des États-Unis. Il s'agit d'accusations pénales, et non criminelles, pour lesquelles il est passible d'une amende de 1000$ à 25 000$ pour chacun des six chefs d'accusation.

Deux autres policiers du service des enquêtes spécialisées ont dû quitter leurs fonctions, cette fois pour des raisons administratives.

Ces événements touchant cinq officiers de haut rang rendent l'atmosphère tendue dans les locaux du SPVM de la Place Versailles, à Montréal, où se trouve le service des enquêtes spécialisées.

-Avec la collaboration de Catherine Handfield