Un taxi est-il un espace public ou privé? Ou les deux?

La question pourrait être tranchée une première fois cette semaine en cour municipale de Montréal. Un chauffeur de taxi, Arieh Perecowicz, y conteste en effet les six contraventions totalisant 1400$ que lui ont remises des inspecteurs du Bureau du taxi de Montréal parce que son véhicule est truffé d'objets personnels et religieux.

Selon les inspecteurs montréalais, le taxi de M. Perecowicz est à la fois sale et dangereux. Sale car encombré de babioles proscrites par la section 98 du règlement sur les taxis, qui prohibe les objets et inscriptions non requis pour l'exercice du travail de chauffeur. Dangereux parce que certains de ces objets obstruent le tableau de bord. Mardi, une inspectrice est ainsi venue dire que des photos empêchaient de voir les indicateurs de vitesse et du niveau d'essence. Une autre photo était placée dans un encadrement de métal, un danger en cas d'accident.

 

M. Perecowicz estime, au contraire, que la section 98 de la loi est inconstitutionnelle, car elle viole la Charte des droits qui lui garantit la liberté de religion et d'expression.

De religion juive, l'homme de 66 ans exerce son métier depuis plus de quatre décennies. Dans son véhicule, il a installé une photo de sa femme, de ses enfants, un coquelicot, un petit drapeau d'Israël, un autre du Canada et deux mezouzahs, genre de parchemins où sont inscrites des prières et qui sont placés dans des réceptacles. On remarque parfois ces petits objets fixés au linteau des portes, à l'entrée des résidences ou des commerces.

Hier matin, M. Perecowicz a eu un petit moment de joie lorsque la juge Dominique Joly a demandé aux deux parties de voir s'il n'était pas possible de s'entendre sur la base que le taxi doit être propre et sécuritaire, mais que M. Perecowicz pouvait y posséder quelques objets personnels.

«C'est la meilleure nouvelle que j'aie entendue depuis le début des procédures», a-t-il lancé, les yeux rougis et remplis de larmes.

À la reprise de l'audience, l'affaire était tombée à l'eau. M. Perecowicz, qui se défend seul, a alors repris l'interrogatoire d'une des agents du Bureau de taxi qui lui ont attribué des constats d'infraction. Le procès se poursuit aujourd'hui.