(Québec) Régis Labeaume rêvait d’un plan de 200 millions pour sauver le lac Saint-Charles, principale source d’eau potable de Québec. Le gouvernement et la Ville ont annoncé mardi un investissement de 60 millions axé sur le remplacement de vieilles fosses septiques.

L’annonce laisse sur sa faim l’Organisme des bassins versants de la Capitale, qui plaide pour le raccordement des résidences autour du lac au système de distribution d’eau et d’égouts. Mais les autorités affirment qu’il fallait agir dans l’urgence.

« On n’a pas mis la hache dans ce projet-là de raccordement. Ce qu’on me dit, c’est qu’il fallait en priorité poser des actions le plus rapidement possible pour avoir un effet sur la question de l’eau potable », a dit mardi le maire de Québec, Bruno Marchand, lors de l’annonce.

Le lac Saint-Charles est victime d’une eutrophisation anthropique. Il vieillit prématurément à cause de l’activité humaine. Les vieilles fosses septiques laissent couler des déjections dans le milieu aquatique. L’apport de phosphore et d’azote multiplie les algues, accapare l’oxygène et « étouffe » le lac.

La Ville de Québec et le gouvernement ont donc décidé de s’attaquer aux vieilles fosses septiques, celles de 30 ans et plus, qui laissent davantage de contaminants dans la nature. Les propriétaires de ces vieilles installations dans le pourtour du lac, dont le nombre est estimé entre 1500 et 2000, seront forcés de les changer d’ici cinq ans.

Les gouvernements entendent subventionner ce remplacement, même si la part qui sera couverte n’est pas encore arrêtée. Le remplacement d’une fosse septique peut coûter entre 5000 $ et 12 000 $. Les modalités seront connues cette année, et les remplacements commenceront en 2024.

Un « Band-Aid » ?

Le lac Saint-Charles alimente en eau 300 000 personnes. Sa santé est un sujet d’inquiétude dans la région.

L’annonce de mardi a laissé perplexe Nancy Dionne, directrice générale de l’Organisme des bassins versants de la Capitale, qui s’intéresse depuis des années à la santé du lac. Elle assimile le plan gouvernemental à un « Band-Aid », une solution à court terme, mais qui n’est pas optimale.

« C’est sûr que ça va avoir un impact immédiat, mais je ne pense pas que ce soit la meilleure solution à long terme », note Mme Dionne.

« Pour nous, la priorité, c’est le raccordement. Plusieurs études vont dans ce sens-là. La mise à niveau des fosses septiques, c’est quelque chose qui sera à refaire, dit-elle. Ça implique du déboisement sur les terrains des citoyens. Les fosses septiques, même neuves, elles fuient. Il y aura encore des rejets dans l’environnement. »

Elle se demande aussi si des résidants, qui devront probablement payer des milliers de dollars pour une nouvelle fosse, accepteraient de payer une taxe spéciale pour un raccordement éventuel.

Elle rappelle par ailleurs que les usines d’épuration de Stoneham-et-Tewkesbury et Lac-Delage envoient toujours leurs rejets dans le lac Saint-Charles. « Ça ne réglera pas ce problème-là. »

Le ministre responsable de la Capitale-Nationale, Jonatan Julien, croit quant à lui que le raccordement peut avoir des effets indésirables, dont la densification.

« Il faut garder en tête l’effet pernicieux que peut avoir un raccordement de plus en plus loin, qui amène potentiellement du développement et de la densité supplémentaires dans des lieux où on ne souhaitait pas le voir », dit-il.