(Rouyn-Noranda) La Fonderie Horne a enfoui 12 463 tonnes d’arsenic sur son site de Rouyn-Noranda au cours de la dernière décennie, montrent des données qu’elle avait omis de déclarer aux autorités.

L’entreprise appartenant à la multinationale Glencore n’avait pas rapporté l’enfouissement d’arsenic avant 2020, écrivait La Presse en juillet.

Seule l’« élimination sur le site » de près de 2500 tonnes d’arsenic pour les années 2020 et 2021 avait été déclarée par la fonderie1 dans l’Inventaire national des rejets de polluants (INRP) d’Environnement et Changement climatique Canada (ECCC).

Le ministère fédéral avait exigé de l’entreprise qu’elle lui transmette les données manquantes pour la dernière décennie, ce qui a été fait récemment.

Ces données, qui ne figurent pas encore dans l’INRP, mais que La Presse a obtenues auprès d’ECCC, montrent ainsi que les quantités d’arsenic « éliminées » par la Fonderie Horne sur son site sont stables dans le temps, avec une moyenne annuelle de 1133 tonnes.

L’élimination est définie dans l’INRP comme « l’élimination définitive par enfouissement, l’épandage ou l’injection souterraine » d’une substance, et ne doit pas être considérée comme un rejet, explique ECCC.

L’arsenic ainsi « éliminé » par la Fonderie Horne ne représente qu’une fraction des près de 50 000 tonnes de polluants que l’entreprise a générés en 2021, selon ses déclarations à l’INRP.

Parcs à résidus

L’arsenic éliminé sur le site de la Fonderie Horne provient entre autres des activités de l’entreprise, qui génèrent d’importants rejets de métaux lourds, mais aussi de l’Affinerie CCR (pour Canadian Copper Refinery), située à Montréal-Est, dont Glencore est également propriétaire.

C’est à l’Affinerie CCR que sont envoyées les anodes de cuivre qui sortent de la fonderie de Rouyn-Noranda avec un taux de pureté de 99,1 %, pour une dernière étape de transformation qui les rendra pures à 99,99 %.

L’affinerie expédie ensuite à la fonderie ses « boues anodiques », pour récupérer par traitement les métaux précieux qui s’y trouvent, et l’arsenic restant est ensuite « éliminé » sur place, avait expliqué à La Presse Marie-Élise Viger, première responsable Environnement pour les opérations cuivre Amérique du Nord de Glencore.

L’arsenic « éliminé » est placé dans un parc à résidus autorisé par le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques du Québec, précisait l’entreprise.

« Pas nécessairement une mauvaise idée »

Éliminer l’arsenic en l’enfouissant par exemple dans une ancienne mine « n’est pas nécessairement une mauvaise idée », selon le professeur de chimie environnementale à l’Université de Montréal Sébastien Sauvé.

« Il faut par contre que ce soit clair et transparent et que les normes pour l’enfouissement de déchets dangereux, selon la nature des matériaux à enfouir, soient respectées », avait-il déclaré à La Presse, en juillet.

« On veut s’assurer d’être sur un socle rocheux, pour qu’il n’y ait pas trop de risques s’il y a un tremblement de terre, et étanche, pour [que les contaminants ne migrent pas] vers la nappe phréatique », disait-il.

L’arsenic « ne peut pas » être détruit, puisque c’est un élément du tableau périodique, souligne le professeur Sauvé ; seules les molécules organiques peuvent être dégradées ou brûlées. « L’arsenic restera, peu importe », dit-il, d’où l’importance de l’entreposer convenablement.

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    Nombre de polluants dont la Fonderie Horne doit déclarer les rejets, l’élimination ou le transfert
    source : Inventaire national des rejets de polluants