Les ventes mondiales de véhicules électriques ont doublé en 2021, mais c’est loin d’être suffisant, estime Greenpeace, qui vient de dévoiler un rapport sur les efforts des grands constructeurs automobiles vers l’électrification des transports. Car malgré la popularité grandissante des véhicules zéro émission, les ventes de VUS à essence s’accélèrent partout sur la planète, ce qui compromet les chances de respecter les cibles de l’accord de Paris.

Des ventes en hausse

Les ventes de véhicules zéro émission (VZE) ont connu une forte hausse en 2021, passant en un an d’un peu plus de 2 millions à 4,6 millions d’unités vendues. La part de marché de VZE est ainsi passée de 2,66 % à 5,75 %, soit la plus forte augmentation en 10 ans. En Chine, les voitures électriques ont représenté 11 % des ventes en 2021. Même l’Europe n’a pas fait mieux alors que 6 % des nouveaux véhicules en 2021 étaient à propulsion électrique. Malgré ces succès de ventes, 99 % du parc automobile mondial est encore constitué de véhicules à essence, signale le rapport intitulé Auto Environmental Guide 2022, préparé par Greenpeace Asie.

Grâce à la Chine

« Les grands constructeurs automobiles se sont fortement appuyés sur le marché chinois pour augmenter les ventes de véhicules électriques », note le rapport de Greenpeace. Sans la Chine, le portrait serait en effet fort différent à l’échelle mondiale. À titre d’exemple, General Motors (GM) a vendu 96 % de ses voitures électriques en Chine. On prévoit que 40 % des voitures vendues sur le marché chinois en 2030 seront électriques. Rappelons que les dirigeants chinois ont adopté des règles très strictes afin de forcer les constructeurs à accélérer leur transition électrique. En avril dernier, une analyse du Massachusetts Institute of Technology (MIT) affirmait notamment que « cette décision aura un impact énorme sur la fabrication mondiale de véhicules électriques. Il s’agit de l’une des législations les plus solides pour les voitures électriques dans le monde et elle est imposée au plus grand marché automobile du monde. »

La cible de 1,5 ℃ compromise

Greenpeace précise qu’aucun des 10 grands constructeurs ne dépasse 9 % de ses ventes en matière de véhicules électriques. « Les plus grands constructeurs automobiles du monde ne s’éloignent pas des combustibles fossiles à un rythme suffisant pour garantir que la Terre reste dans une élévation de température moyenne annuelle mondiale de 1,5 ℃ », indique-t-on. Les constructeurs devraient cesser de vendre des véhicules à essence en Europe dès 2028 et dans les autres grands marchés avant 2030, recommande le rapport.

Les VUS ont toujours la cote

À l’échelle mondiale, les ventes de VUS à essence continuent d’augmenter malgré l’urgence climatique, souligne Greenpeace. En 2021, presque un nouveau véhicule sur deux (46 %) était un VUS, une hausse de 4 % par rapport à 2020 (42 %). Pour Patrick Bonin, responsable de la campagne Climat-Énergie chez Greenpeace Canada, il faut absolument que le Canada et le Québec devancent à 2030 leur réglementation interdisant la vente de voitures à essence prévue pour 2035. « Il faut que ça se passe avant 2035 si on veut se donner des chances de respecter l’accord de Paris [limiter le réchauffement à 1,5 ℃] », affirme-t-il. Une des solutions, selon lui, serait d’imposer une taxe sur l’achat des véhicules les plus énergivores. Mais en parallèle, les gouvernements doivent forcer les constructeurs à offrir plus de voitures électriques aux consommateurs. « On le voit, dans les législations où il y a des objectifs ambitieux, c’est là qu’on retrouve le plus de véhicules électriques. »

GM au sommet du palmarès

En matière de transition énergétique, GM figure en tête de liste du palmarès établi par Greenpeace, suivi par Mercedes-Benz et Volkswagen. Les trois constructeurs japonais Nissan, Honda et Toyota occupent les trois derniers rangs. « Qui aurait cru, il y a 10 ans, que les retardataires seraient les Japonais ? », lance Daniel Breton, président de Mobilité électrique Canada. L’ancien ministre québécois de l’Environnement croit lui aussi qu’un renforcement des normes zéro émission est nécessaire au pays afin de forcer les constructeurs à offrir leurs modèles électriques aux consommateurs canadiens. « Les délais d’attente varient entre six mois et trois ans. Les consommateurs sont pris au piège ! »

Un rapport critiqué

De son côté, Pierre-Olivier Pineau, titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie à HEC Montréal, se montre assez critique du rapport de Greenpeace. « Ce genre de palmarès des meilleures pratiques de l’industrie glorifie les meilleures compagnies, alors que les vraies solutions à la carboneutralité passent par beaucoup moins de véhicules. » Si Greenpeace l’indique dans son rapport, M. Pineau souligne qu’il ne faut pas s’attendre à voir l’industrie opérer ce changement. « Ces changements demandent aux individus et aux gouvernements de changer les règles, bien plus qu’aux industries de changer leurs pratiques, même si elles devront aussi le faire. »

En savoir plus
  • 5 %
    Pour plusieurs grands constructeurs comme GM, Honda et Mercedes-Benz, la proportion de véhicules électriques vendus aux États-Unis en 2021 ne dépasse pas 5 %.
    Source : Auto Environmental Guide 2022, préparé par Greenpeace Asie
    6 %
    Proportion de véhicules électriques neufs vendus en Chine en 2020, un pourcentage qui a grimpé à 11 % en 2021.
    Source : Auto Environmental Guide 2022, préparé par Greenpeace Asie