Plusieurs météorologues que l’on peut voir et entendre dans les bulletins de nouvelles de grandes chaînes de télévision canadiennes reconnaissent avoir changé de ton et d’approche face aux changements climatiques dont les conséquences s’aggravent et se font de plus en plus sentir.

Si les présentateurs météo peuvent parfois être considérés comme des personnalités télévisuelles au ton typiquement plus léger, plusieurs affirment adopter une approche plus éducative et plus sérieuse pour expliquer plus en détail pourquoi une région particulière vit un certain épisode de temps difficile et comment cela pourrait affecter ceux qui y vivent.

Le météorologue Warren Dean, de la chaîne CTV News à Vancouver, fait partie de ceux qui ont changé de ton et d’approche face aux changements climatiques. Il se souvient à quel point il s’est senti impuissant alors qu’un dôme de chaleur mortel surplombait la Colombie-Britannique, l’été dernier.

Ce présentateur météo raconte qu’avec ses collègues, ils ont tenté de marteler le message de la gravité de la situation devant ce dôme de chaleur. Malheureusement, bon nombre de personnes n’ont pas écouté les avertissements.

« On était vraiment impuissant en observant les impacts et en voyant autant de gens en souffrir », a partagé le météorologue comptant 16 ans d’expérience. Plus de 600 personnes sont mortes dans cette vague de chaleur intense.

« Je crois qu’on a vraiment fait du bon travail en tant que communauté de météorologues pour transmettre les avertissements et donner des conseils aux gens pour s’adapter, mais on a quand même eu droit aux : “Bah, ce ne sera pas si terrible.” Je pense qu’avec ce qu’on a vu, oui, ça peut être terrible. »

Warren Dean dit vouloir se faire plus pédagogue dans ses bulletins météorologiques et puiser encore plus « dans l’aspect scientifique de la météo ». Il veut aider les gens à bien comprendre pourquoi les changements climatiques constituent une véritable crise.

Sa collègue de CBC, la météorologue Colette Kennedy, qui œuvre dans le métier depuis 1995, reconnaît elle aussi avoir modifié sa manière de procéder devant l’accélération et l’accumulation des évènements météorologiques extrêmes.

« On a l’habitude de parler dans un ton enjoué lorsque l’on ne fait que rapporter des prévisions météorologiques en général, mais la différence quand le temps est violent, c’est que ça devient très sérieux. Ça peut mettre des vies en danger et il faut prendre une approche différente », mentionne-t-elle.

« Puis, il y a cet entre-deux, où l’on ne rapporte que des prévisions qui ne sont pas nécessairement extrêmes comme une tornade ou des orages violents, mais qui sont graves pour leur effet à long terme sur notre planète. Il faut alors être à l’aise pour rapporter de mauvaises nouvelles », décrit-elle.

Pour le président de la Société canadienne de météorologie et d’océanographie, Jim Abraham, le défi des présentateurs météo face aux changements climatiques est de bien préparer les gens « pour quelque chose qu’ils n’ont encore jamais vécu ».

« Ce que tous les météorologues à travers le monde doivent apprendre à gérer, c’est comment faire pour communiquer le danger d’une façon dont tout le monde peut comprendre ? », soutient-il. Selon lui, c’est une mission qui s’apprend et s’effectue progressivement.

Jim Abraham souligne que les présentateurs météo à la télévision ont longtemps limité leurs interventions à la température, à l’humidex, à la force des vents et aux précipitations. Il croit cependant qu’il faut aussi s’attarder aux « impacts de ces éléments en particulier » et de quelle manière les gens peuvent agir pour en réduire les effets.

« Je ne pense pas que le public reconnaît l’ampleur du risque que pose la chaleur par exemple, développe-t-il. Je doute que beaucoup de Canadiens réalisent que le pire évènement météorologique en pertes de vies dans l’histoire du Canada a eu lieu l’an dernier en Colombie-Britannique avec le dôme de chaleur. »

Colette Kennedy insiste sur l’importance pour toute la communauté dans le domaine météorologique d’adapter le discours alors que les changements climatiques continuent d’affecter la vie des gens.

Cet article a été produit avec l’aide financière des Bourses Meta et La Presse Canadienne pour les nouvelles.