(Ottawa) Le gouvernement fédéral devrait-il attribuer au fleuve Saint-Laurent le statut de personnalité juridique qui permettrait d’accorder à la faune et la flore qui en dépendent des droits inhérents à la protection ?

Le Nouveau Parti démocratique (NPD) croit qu’une telle mesure s’impose. Et la formation politique dirigée par Jagmeet Singh s’inspire du cas de la rivière Magpie, sur la Côte-Nord, pour lancer le débat sur l’avenir du fleuve.

Une récente pétition lancée par l’Observatoire international des droits de la nature favorable à cette démarche a jusqu’ici recueilli quelque 1400 signatures de personnes venant non seulement du Québec, de l’Ontario et de la Colombie-Britannique, mais également de France, du Royaume-Uni, d’Allemagne et de Suède.

Dans une lettre qu’il a envoyée au ministre fédéral de l’Environnement et du Changement climatique, Jonathan Wilkinson, le député néo-démocrate Alexandre Boulerice affirme que le fleuve Saint-Laurent doit bénéficier d’une protection supplémentaire, au moment où des projets de développement industriel se multiplient.

M. Boulerice a notamment fait allusion au projet d’expansion du port de Montréal à Contrecœur, de l’expansion du port de Québec avec le projet Laurentia, du projet GNL-Québec dans le fjord du Saguenay et de possibles travaux d’exploration pétrolière dans le golfe du Saint-Laurent au large des îles de la Madeleine.

L’Agence d’évaluation d’impact du Canada (AEIC) est d’ailleurs saisie d’une demande visant à effectuer une évaluation pour une partie de la région du fleuve Saint-Laurent au Québec. Selon M. Boulerice, le ministre de l’Environnement doit aller plus loin en confiant à l’AEIC le mandat de mener une étude globale sur l’état de santé du fleuve et de ses tributaires.

Mais si le gouvernement Trudeau voulait véritablement faire preuve d’audace, il devrait envisager d’accorder un statut juridique au fleuve.

« Le fleuve Saint-Laurent est un joyau environnemental, historique et culturel de notre pays. Il est le berceau de la civilisation occidentale en Amérique du Nord et un des cours d’eau les plus importants pour plusieurs nations autochtones », affirme le chef adjoint du NPD dans sa missive au ministre Wilkinson.

Prendre exemple sur la rivière Magpie

« Le cas de la rivière Magpie est un cas d’espèce qui fera école et on se doit de s’en inspirer si l’on est vraiment sérieux dans nos démarches visant non seulement à préserver la faune et la flore du fleuve Saint-Laurent, mais également à combattre les changements climatiques », ajoute M. Boulerice dans sa lettre.

En février, la rivière Mapgie, considérée comme une destination de renommée mondiale pour le rafting en eau vive, est devenue le premier cours d’eau au Canada à obtenir un statut juridique. Ailleurs dans le monde, des démarches semblables ont été entreprises dans des pays comme la Nouvelle-Zélande, l’Inde et l’Équateur.

La rivière Magpie s’est vu attribuer ce statut après que la municipalité régionale de comté de Minganie et le Conseil des Innus d’Ekuanitshit eurent adopté des résolutions en ce sens qui ont pour effet de lui accorder « neuf droits juridiques », dont ceux de couler, de maintenir sa biodiversité naturelle et d’intenter une action en justice.

Les résolutions précisent que la rivière peut être représentée par des « gardiens » nommés par la municipalité régionale et les Innus, qui auraient le « devoir d’agir au nom des droits et des intérêts de la rivière et de veiller à la protection de ses droits fondamentaux ».

Concrètement, ce statut pourrait lui accorder une protection contre des menaces futures, telles que le développement hydroélectrique.

Avec La Presse Canadienne