Les Premières Nations du Québec et du Labrador accusent les principaux partis politiques fédéraux de courtiser leur vote, mais de se montrer indifférents à leur sort une fois au pouvoir. Alors que la campagne électorale s'achève, les autochtones descendent dans la rue aujourd'hui pour se faire entendre.

L'Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador organise une grande marche à travers le centre-ville de Montréal qui partira du square Cabot (à l'angle de l'avenue Atwater et de la rue Sainte-Catherine Ouest) à midi. Entrevue avec son chef, Ghislain Picard. À compter de demain, et ce jusqu'à lundi, La Presse+ publie une enquête inédite sur les morts violentes ou non élucidées de jeunes autochtones au Québec.

Pourquoi organiser cette marche ?

Lors des campagnes électorales précédentes, on a trop souvent vu que les priorités mises de l'avant par les partis alors qu'ils courtisent notre vote deviennent secondaires une fois qu'ils sont élus. Autre raison importante : après une décennie d'un régime conservateur sous lequel on ne sentait aucune volonté de collaboration, notre confiance envers le fédéral est au plus bas. Peu importe le gouvernement qui sera élu le 19 octobre, on souhaite que la confiance soit rétablie. On est également très déçus du peu de place que les enjeux autochtones ont pris dans les débats des chefs alors que ces derniers ont préféré parler du niqab.

Vous dénoncez le « silence des partis » sur les questions autochtones depuis le début de la campagne électorale. Pourtant, certains partis comme les libéraux et le NPD ont fait une série de promesses, dont un financement accru pour les écoles des réserves. À vos yeux, ce n'est pas suffisant ?

On est réceptifs aux promesses faites jusqu'à maintenant, mais l'importance des enjeux des nations que nous représentons est telle qu'il faut que le prochain gouvernement travaille en collaboration avec nous sur des solutions dès son arrivée au pouvoir. Ça fait des décennies qu'on dit que les écarts socioéconomiques entre nos communautés et la majorité canadienne sont tout à fait inacceptables.

Vous dites que la relation entre le fédéral et les Premières Nations est rompue. Qu'est-ce qui a causé une telle rupture ?

Avant l'ère Harper, le gouvernement libéral de Paul Martin avait convenu d'un plan avec les provinces et les nations concernées qui proposait des milliards en investissements, notamment en éducation, en santé, en logements et pour le développement économique des Premières Nations. C'est ce qu'on a appelé l'accord de Kelowna. Or, cet accord a été abandonné par les conservateurs peu de temps après leur arrivée au pouvoir. D'ailleurs, le premier geste de Stephen Harper comme premier ministre a été d'abolir le budget de 160 millions de dollars qui avait été accordé par le gouvernement précédent pour la protection des langues autochtones à travers le pays. C'était mal parti.

Quel est l'enjeu des Premières Nations auquel le nouveau gouvernement devra s'attaquer en premier, selon vous ?

Je dis souvent que c'est injuste de demander à un chef autochtone de définir une priorité parmi tant de priorités. Ça prend un plan global comme ce que prévoyait l'accord de Kelowna. Mais avant tout, ça prend une volonté urgente de part et d'autre d'améliorer les choses.