(Québec) Les deux tiers des bâtiments des cégeps sont en mauvais état, selon la vérificatrice générale du Québec.

Dans son rapport annuel déposé jeudi, Guylaine Leclerc prévient aussi que les moyens prévus pour « renverser leur dégradation importante » sont insuffisants.

Ainsi, 608,6 millions sont prévus en maintien d’actifs d’ici 2027-2028, alors que 1,7 milliard seraient nécessaires, souligne-t-elle.

« La situation est telle que certaines infrastructures ont dû être fermées », écrit-elle, en donnant l’exemple du Cégep de La Pocatière.

En mai dernier, l’une des résidences étudiantes du cégep a été évacuée en « raison de moisissures qui se sont développées à la suite d’une infiltration d’eau, et de la menace d’effondrement d’un mur extérieur de briques ».

La piscine du cégep, la seule de la région, note la vérificatrice, demeure aussi fermée depuis un an en raison de fuites.

« Plus l’état des bâtiments se dégrade, plus le risque d’un bris entraînant une baisse de performance ou un arrêt de services augmente », prévient-elle dans son rapport.

Une défectuosité qui n’est pas corrigée en temps opportun risque d’en entraîner d’autres et de nécessiter des travaux beaucoup plus importants.

Guylaine Leclerc, vérificatrice générale

« Par exemple, un toit qui coule peut finir par endommager les murs et les planchers. Passé un certain seuil de dégradation, le bâtiment doit parfois être reconstruit au lieu d’être réparé », ajoute-t-elle.

Processus long et inefficace

Certains cégeps sont confrontés à un déficit d’espace important, alors que d’autres sont en surplus.

« Or, le choix de certains projets d’agrandissement ne considère pas adéquatement les besoins réels d’espace », souligne Mme Leclerc. Le processus mis en place par Québec pour sélectionner des projets est « long et inefficace ».

Pour faire son analyse, le ministère de l’Enseignement supérieur utilise le « nombre maximal d’étudiants autorisé au devis scolaire plutôt que l’effectif réel », ce qui, selon la vérificatrice, occasionne des « incohérences ».

Le Cégep de Saint-Félicien, par exemple, a vu sa demande d’agrandissement autorisée par Québec en 2022-2023, alors que ses effectifs ne le justifient pas, note-t-elle.

Pendant ce temps, le ministère refuse de financer l’expansion de certains établissements surpeuplés dans les grands centres, comme le Cégep John Abbott.

« En effet, sur l’ensemble des 48 cégeps, aucun projet n’est envisagé pour quatre d’entre eux qui présentent un important déficit d’espace, alors que la planification de projets d’agrandissement a été autorisée dans six cégeps qui présentent un surplus d’espace », écrit-elle.

La ministre Déry réagit

Interrogée à ce sujet à l’Assemblée nationale jeudi, la ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, a reconnu « certaines lacunes » en lien avec la gestion des infrastructures du réseau collégial.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

La ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry

Elle a laissé entendre qu’elle avait hérité des problèmes du passé. « Je sais très bien que le maintien d’actifs, pour les autres gouvernements précédents, ce n’était pas un enjeu très sexy », a-t-elle lancé.

« C’était le premier arrivé, premier servi, donc on a mis en place des appels à projets pour qu’on s’assure d’avoir un bon portrait de la situation. »

La Coalition avenir Québec (CAQ) a inscrit des investissements substantiels dans le Plan québécois des infrastructures (PQI) pour le maintien des actifs, a aussi fait valoir la ministre.

« Le gouvernement est conscient du rattrapage qu’il y a à faire », a-t-elle déclaré, en assurant qu’« il n’y a rien d’arbitraire dans le choix de ce qu’on fait en maintien d’actifs. […] C’est un processus extrêmement rigoureux qu’on suit », a-t-elle ajouté.