Moins d’étapes pour porter plainte, un protecteur de l’élève indépendant et un processus uniforme et « efficace » pour tous les élèves, qu’ils soient au public ou au privé : le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, a déposé mardi un projet de loi pour faciliter le traitement des plaintes dans les écoles. Une réforme attendue depuis longtemps.

Porter plainte dans un centre de services scolaire au Québec est l’équivalent d’une « course à obstacles » : dans un rapport déposé en 2017, la protectrice du citoyen, Marie Rinfret, jugeait que le Protecteur de l’élève ne remplissait pas son rôle.

Bien qu’il y en ait un dans chaque centre de services depuis plus d’une décennie, peu connaissaient son existence, un nombre restreint de plaintes étaient étudiées chaque année, et les parents estimaient que le traitement de celles-ci était souvent partial.

Le projet de loi 9 déposé par le ministre de l’Éducation, mardi, entend répondre à ces critiques. « On arrive avec des solutions à tous ces problèmes », a assuré Jean-François Roberge.

Québec veut créer un « organisme indépendant externe au réseau scolaire, qui va jouer le rôle d’un ombudsman de l’éducation ». Cet organisme serait sous la gouverne d’un protecteur national de l’élève nommé par le gouvernement. Celui-ci aurait pour rôle de coordonner les protecteurs régionaux, auxquels les élèves des écoles tant publiques que privées pourraient se référer.

Chaque année, le protecteur national de l’élève devrait rédiger un rapport faisant état du nombre de plaintes traitées, de leur nature et de leurs motifs, du délai d’examen des plaintes et de ses recommandations.

Traitement plus rapide des plaintes

Selon le projet de loi déposé mardi, le traitement des plaintes serait uniformisé à l’échelle du Québec et consisterait en « trois étapes maximales et successives », qui se compteraient en jours plutôt qu’en mois.

Alors qu’il était critique de la Coalition avenir Québec en matière d’éducation, Jean-François Roberge avait dénoncé le rôle « totalement inefficace » du Protecteur de l’élève. Mardi, il a observé qu’avec 72 centres de services scolaires et près de 250 établissements privés, il y a de « très grandes disparités » dans le traitement des plaintes.

« On peut imaginer que des élèves qui vivent des problématiques très semblables ont des parents qui portent des plaintes, mais comme c’est dans des régions différentes, les plaintes sont traitées de manière différente et, à la fin, ce sont des décisions différentes », a déclaré le ministre.

« Projet de loi important pour les parents »

La Fédération des comités de parents du Québec (FCPQ) accueille avec soulagement cette réforme. Son président, Kévin Roy, dit qu’il était temps qu’« enfin, on fasse de la place pour ça dans le programme politique ».

Il y a « beaucoup de parents qui ne savaient pas, qui ne savent pas » que le Protecteur de l’élève existe, ajoute le président de la FCPQ, qui reçoit nombre d’appels de parents qui ne savent plus vers qui se tourner pour faire valoir leurs droits.

Kévin Roy relève que le projet de loi déposé mardi prévoit qu’il soit de la responsabilité du Protecteur de l’élève de faire sa propre promotion auprès des parents.

On aimerait que le numéro et les services du Protecteur de l’élève soient connus. C’est important pour les parents pour bien accompagner leurs jeunes ou pour dénoncer des faits qui pourraient arriver.

Kévin Roy, président de la Fédération des comités de parents du Québec

Le Regroupement des comités de parents autonomes du Québec rappelle pour sa part qu’il a vu « passer différents projets de loi sur le sujet ».

« Cette fois-ci, espérons qu’il aboutira, quelle qu’en soit la forme finale », a déclaré le regroupement dans un communiqué.

Professeur de sciences de l’éducation à l’Université du Québec à Rimouski, Jean Bernatchez voit quant à lui dans ce projet de loi une « professionnalisation de la fonction » de protecteur de l’élève.

« On exigeait relativement peu de choses du protecteur de l’élève. On demandait minimalement un baccalauréat et une formation de 20 heures en administration », dit le professeur. Selon les régions, les protecteurs de l’élève traitaient en moyenne une dizaine de plaintes, à taux horaire.

En conséquence, le professeur se demande comment les protecteurs de l’élève étaient choisis. Un « certain nombre » d’entre eux faisait un bon travail, dit-il, mais beaucoup étaient « très près » des gestionnaires scolaires. « J’y voyais une forme de partialité », dit Jean Bernatchez.

Il faudra voir de quelle manière se traduit la mise en œuvre de ce projet de loi, poursuit-il. « Mais je vois ça comme étant plutôt encourageant », conclut le professeur.

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En 2017, un parent sur cinq disait que sa plainte à la commission scolaire avait pris au-delà d’un an à être acheminée.

Source : Protecteur du citoyen