(Québec) Les cours d’école du Québec devraient bénéficier d’un financement « intouchable », car elles sont souvent tout en bas de la liste des priorités, conclut un rapport de Lab-École dévoilé lundi.

Trop petite, trop grise, mal pensée, mal financée… La cour de récréation est parfois l’enfant pauvre de l’école québécoise. C’est à tout le moins le constat auquel arrive le projet Lab-École, qui a dévoilé un rapport de 230 pages à l’intention des décideurs.

Le but ? Faire de la cour un endroit de socialisation qui s’inspire des meilleures pratiques du monde.

« On veut que la cour de récréation soit un endroit bienveillant, pas un stationnement », a lancé lundi l’architecte Pierre Thibault, instigateur de Lab-École avec Ricardo Larrivée et Pierre Lavoie.

PHOTO FOURNIE PAR LAB-ÉCOLE

L’école Des Berges au centre-ville de Québec a une cour ouverte sur un parc, avec un espace pour enseigner en plein air.

« En voyageant à l’étranger, on voit que dans certains pays, on demande un minimum de nature par enfant, note-t-il. Il y a même des écoles dans un parc. Quand on rentre ici, le choc est brutal. »

Après avoir tenté de repenser les écoles du Québec, Lab-École a décidé de s’intéresser à la cour de récréation. Un enfant au primaire passe en moyenne 3000 heures dans ces aires de jeu.

« Un enfant qui joue bien apprend bien », résume Carole Carufel, enseignante d’éducation physique à la retraite devenue spécialiste de la cour d’école.

Elle a participé à la consultation menée par Lab-École. Une centaine d’enfants du primaire ont aussi été sondés. L’élément le plus important pour eux dans une cour ? Des arbres.

La recette d’une cour réussie n’est pas unique. Mais les auteurs du rapport recommandent, avec images à l’appui, de bons aménagements, de la verdure, une multitude d’usages, des espaces de jardinage, de jeu collectif, de jeu libre, etc.

L’argent, le nerf de la guerre

En somme, la cour mérite d’être pensée. Or, pour être pensée et réalisée, elle doit être financée adéquatement.

« Ce qu’on a constaté, c’est que la cour d’école, c’est ce qui arrivait à la fin. C’est l’élément qu’on coupait », explique Pierre Thibault.

« Il n’y avait pas de budget dédié. On a vu des cours où on faisait le stationnement, le débarcadère, et à un moment donné, on arrivait et il ne restait plus rien. »

La cour d’école est, selon lui, « l’enfant pauvre » de certains projets de nouvelles écoles. Or, les enfants passent de plus en plus de temps dans la cour de récréation, note le rapport intitulé Penser la cour de demain.

Consultez le rapport Pensez la cour de demain

« Les enfants profitent de la cour lorsqu’ils et elles sont au service de garde, qui est plus fréquenté qu’il y a plusieurs années. Par ailleurs, les espaces extérieurs sont aussi plus utilisés comme lieux d’apprentissage à part entière », peut-on lire.

Le rapport conclut à la nécessité « d’un financement consacré, voire intouchable, pour l’aménagement d’environnements extérieurs de qualité excluant les travaux de génie civil ».

Ce ne sont pas que les nouvelles cours qui sont en cause. Québec accorde un maximum de 50 000 $ pour la rénovation de cours existantes, un montant jugé dérisoire par plusieurs acteurs du monde de l’éducation.

Le cabinet du ministre de l’Éducation a dit dans un courriel reconnaître l’importance d’investir dans les cours d’école. « Mais nous héritons d’écoles désuètes qui doivent être rénovées. C’est la priorité », note Jean-François Del Torchio, directeur stratégique du ministre.

L’année dernière, le programme d’embellissement des cours d’école a octroyé 10 millions en subventions, c’est beaucoup plus que les 3 millions alloués en 2018-2019, note le cabinet ministériel.

Pierre Thibault pense que les investissements dans une cour d’école sont « peut-être les plus importantes retombées qu’on peut avoir pour chaque dollar investi ».

Après la cour de récréation, Lab-École entend produire un rapport sur le mobilier, puis l’alimentation en milieu scolaire. Une réflexion devrait aussi avoir lieu sur le transport actif et les moyens d’inciter les enfants à se rendre à l’école à pied ou à vélo, par exemple.