(Montréal) Les garçons qui commencent à fréquenter un service de garde entre les âges de six et 36 mois sont ensuite plus susceptibles de réussir leurs études secondaires et moins à risque de souffrir de pauvreté à l’âge adulte, démontre une nouvelle étude canadienne publiée par le journal médical Pediatrics.

L’étude dirigée par des chercheurs de l’Université de Montréal s’est intéressée à une cohorte de 2900 enfants francophones nés en 1980 ou 1981 pour déterminer quel impact la fréquentation d’un service de garde aurait sur leur vie.

Si aucun avantage n’a été décelé pour les filles, les garçons dont la fréquentation commençait en bas âge s’en tiraient ensuite mieux que ceux qui commençaient plus tard ou qui n’y allaient pas du tout.

« Pour ceux qui débutent tôt, chez les garçons, il y a une association protectrice, c’est-à-dire qu’ils ont un plus haut taux de graduation de l’école secondaire que ceux qui ne fréquentent pas [un service de garde], a résumé la professeure Sylvana Côté, de l’École de santé publique de l’Université de Montréal. Ils ont aussi moins de risques d’être dans la pauvreté entre 18 et 33 ans.

« On parle d’effets qui n’ont jamais été documentés dans le passé et sur un aussi long terme pour les services de garde qui sont disponibles dans la communauté. »

L’étude a été menée par Mme Côté, qui en est l’auteure principale, et par la postdoctorante Pascale Domond, qui en est la première auteure. Toutes deux sont chercheuses au CHU Sainte-Justine.

C’était la première fois que des chercheurs suivaient des enfants provenant de tous les milieux socioéconomiques, et non seulement de milieux défavorisés, du service de garde jusqu’à l’âge adulte.

C’était aussi la première fois que des chercheurs utilisaient des données gouvernementales officielles pour quantifier les revenus des parents.

« On s’attendait à ce que l’association soit là plus fortement pour les enfants de familles moins bien nanties, parce que c’est ce qu’on trouve dans d’autres études, a dit Mme Côté. Ce n’est pas ce qu’on a trouvé ici, mais on regardait un facteur de risque qui est très masculin, le décrochage scolaire, donc ça semble être spécifique au facteur de risque qu’on regardait. »

Lutte au décrochage

On sait de longue date que les garçons sont plus vulnérables que les filles au décrochage. Il semblerait donc que la fréquentation d’un service de garde tôt dans leur vie les aide ensuite à rester aux études et, subséquemment, à avoir un meilleur niveau de vie.

« Pour les enfants qui sont plus à risque de certains problèmes, lorsqu’ils fréquentent un service d’éducation préscolaire, ça a une association avec une réduction de risque, mais pour les populations qui sont les plus vulnérables, a expliqué Mme Côté. Dans ce cas-ci, les garçons sont plus vulnérables au décrochage scolaire et c’est là qu’on voit l’association. Les services de garde préscolaires semblent avoir un effet d’égalisateur social. »

Il semblerait donc, poursuit-elle, que d’avoir un environnement extrafamilial à la petite enfance est bénéfique, « surtout quand ça se passe dans un environnement structuré comme un centre ».

« Il y a des gens qui sont formés, il y a d’autres enfants, il y a des interactions sociales, ce sont des lieux qui sont extrêmement stimulants si on compare avec un enfant qui reste à la maison, en solo, avec sa maman ou son papa. C’est une source de stimulation précoce qui est très importante », a-t-elle dit.

Cette étude serait donc la première à témoigner d’une association entre la fréquentation hâtive d’un service de garde, un taux plus élevé de diplomation au secondaire et une réduction du risque de pauvreté au début de l’âge adulte.

« On montre avec ces données-là […] qu’un environnement structuré peut faire des différences importantes sur le long, long terme, a conclu Mme Côté. Ça donne vraiment espoir que si on continue à développer notre réseau, à le bonifier, qu’on va pouvoir faire encore plus pour réduire les inégalités dans le développement des enfants et bien les préparer pour aller à l’école, parce que les inégalités sont déjà très apparentes dès qu’on entre à la maternelle. »

L’étude a été réalisée en collaboration avec l’Université McGill, Statistique Canada, l’Université Sciences Po à Paris, l’Université de Bordeaux et University College Dublin.