En plus du ministère de l'Éducation, le Conseil du trésor a décidé de lancer sa propre enquête sur la commission scolaire English-Montreal (CSEM). Il veut vérifier si elle respecte les règles dans l'octroi de contrats.

La semaine dernière, le ministre de l'Éducation, Jean-François Roberge annonçait le déclenchement d'une enquête sur la gouvernance et l'administration de la plus grande commission scolaire anglophone du Québec après avoir pris connaissance d'allégations nombreuses et « très sérieuses », certaines datant de plusieurs années.

Par exemple, la CSEM aurait contourné le processus d'appel d'offres public prévu à la loi et accordé, de gré à gré, plusieurs contrats de plus de 100 000  $. Des « extras » auraient également été versés à des entreprises sans justification. Il y aurait eu de fréquents dépassements de coûts, ce qui alimente les soupçons à Québec.

Informé de la situation, le président du Conseil du trésor, Christian Dubé, a pris la décision de s'en mêler. Il « entame une vérification concernant le processus de gestion contractuelle » de la CSEM, annonce-t-il par voie de communiqué mercredi.

« Ces vérifications se font en vertu de l'article 27.1 de la Loi sur les contrats des organismes publics, qui permet au président du Conseil du trésor de vérifier si l'adjudication et l'attribution des contrats, par une commission scolaire, respectent les règles établies », précise le document.

Christian Dubé a refusé une demande d'entrevue. Son cabinet a indiqué que le Trésor « n'a pas réalisé d'intervention spécifique auprès de la commission scolaire auparavant quant à sa gestion des fonds ». Sa vérification s'ajoute à l'enquête du ministère de l'Éducation.

Ce dernier se penche en plus sur les conflits internes au conseil des commissaires. Le

commissaire à l'éthique de la CSEM a conclu en décembre que la présidente Angela Mancini avait contrevenu au code de déontologie en adoptant une conduite inappropriée.

Le ministère examine également des « irrégularités importantes en formation professionnelle ». La CSEM fait affaire avec « des partenaires non reconnus par le Ministère qui donnent un enseignement déficient », disait M. Roberge. Il ajoutait que des élèves se sont plaints auprès du Ministère de ne pas avoir obtenu leur diplôme après avoir terminé leur formation.

Ce n'est pas la première fois que la CSEM se retrouve sous la loupe des autorités. L'Unité permanente anticorruption (UPAC) a lancé une enquête à l'automne 2016 sur la CSEM, mais aussi sur une autre commission scolaire anglophone, Lester-B.-Pearson. La même année, le ministre de l'Éducation Sébastien Proulx avait désigné une vérificatrice ayant pour mandat de « documenter les processus relatifs aux pratiques irrégulières portées à l'attention du Ministère » dans ces deux commissions scolaires.

Des médias anglophones rapportaient à l'époque que les autorités policières et ministérielles se penchaient sur le versement d'« extras » à des entreprises pour des contrats de rénovation d'écoles, mais aussi sur la gestion d'un programme de formation destiné à des étudiants étrangers qui étaient recrutés par des firmes sous contrat avec les deux commissions scolaires. The Gazette révélait que la CSEM avait payé 5,66 millions en commissions à la firme Can-Share Connection pour le recrutement d'étudiants chinois entre 2010 et 2016. Il n'y avait pas eu d'appel d'offres public avant 2014 pour ce contrat.

Le gouvernement Couillard n'avait pas donné suite au rapport de sa vérificatrice qui, pourtant, relevait des problèmes de gouvernance importants à la CSEM. L'UPAC refuse de dire si son enquête est toujours en cours.

La semaine dernière, la CESM réagissait en disant que l'enquête du ministère de l'Éducation la « prend complètement par surprise ». Son vice-président, Joe Ortona, soutenait que le Ministère avait mené une autre vérification sur l'attribution de contrats en 2016-2017 et que les fonctionnaires avaient conclu qu'« il n'y avait rien d'anormal ».

Les deux enquêtes du gouvernement Legault surviennent au moment où les commissions scolaires anglophones promettent de livrer bataille contre lui s'il va de l'avant avec son intention de les abolir. Questionné sur le sujet, M. Roberge a répondu qu'il n'y a pas de lien à faire entre les deux dossiers.