Le Conseil interprofessionnel du Québec (CIQ) appelle le gouvernement québécois à investir davantage pour accélérer la reconnaissance des diplômes des immigrants, qui sont nombreux à décrocher parce qu'ils attendent trop longtemps pour accéder à une mise à niveau nécessaire pour pratiquer leur métier.

« Plus c'est long pour accéder à ces stages ou ces formations d'appoint, plus les personnes se tournent vers d'autres emplois ; il faut qu'elles gagnent leur vie », a déclaré en entrevue Gyslaine Desrosiers, présidente du CIQ, une organisation qui représente les ordres professionnels.

Le CIQ a mandaté des professeurs de l'École nationale d'administration publique (ENAP) pour évaluer les coûts reliés à la formation d'appoint ou aux stages que doivent effectuer certains nouveaux arrivants afin d'exercer une profession au Québec. La Presse canadienne a pu obtenir copie du rapport, qui sera publié vendredi.

Selon les données de l'organisation, en 2016-2017, plus de 63 % des diplômes ont été partiellement reconnus par les ordres professionnels. Dans ces cas, les nouveaux arrivants doivent compléter une mise à niveau pour pratiquer leur métier au Québec.

D'après les calculs des chercheurs de l'ENAP, à partir de tous ces dossiers, il en coûterait environ 39 millions par année à l'État pour offrir ces mises à niveau. Or, le gouvernement dépense moins en réalité, car environ 34 % des nouveaux arrivants abandonnent en cours de route leur formation d'appoint.

C'est pourquoi le CIQ recommande au gouvernement de réinvestir pour s'assurer d'augmenter le nombre de places disponibles dans les formations et les stages. Les auteurs de l'étude chiffrent cet investissement à 12,8 millions par année.

Les chercheurs ont aussi souligné qu'il demeurait moins coûteux pour le gouvernement d'assurer une mise à niveau pour les immigrants, que de former quelqu'un de A à Z.

« Ainsi, malgré qu'en 2016-2017, 2307 cas des 3661 demandes de reconnaissances se soient soldés par une mise à niveau pour permettre la pratique au Québec, ces coûts additionnels ne dépassent jamais 50 % de la formation complète par individu et représentent, de ce fait, une avenue intéressante pour la province », ont-ils souligné.

Les ordres rejettent toute responsabilité

Dans le dossier complexe de la reconnaissance des diplômes, plusieurs montrent du doigt les ordres professionnels pour les longs délais. Une récente étude de l'Institut du Québec affirmait que les ordres professionnels représentaient parfois « des obstacles à l'intégration ».

« C'est pas là qu'il est, le problème », a tranché Mme Desrosiers.

Selon le CIQ les dossiers prennent en moyenne 90 jours pour être traités.

« C'est dur de faire plus vite que ça. Il y a des ordres qui en reçoivent 1000, des demandes, par année », a indiqué la présidente du CIQ.

Gyslaine Desrosiers assure que le problème se situe après le traitement des dossiers. « Les professionnels immigrants qui arrivent au Québec veulent avoir un plan de carrière intéressant, et actuellement sont freinés par le manque d'accessibilité soit des formations d'appoint ou des stages », a-t-elle expliqué.

« Il y a une cohorte de 30 personnes de pharmacie par année. Mais il y a plus de 100 personnes qui attendent pour faire la formation d'appoint » a-t-elle illustré, citant des données de l'étude.

Selon elle, le gouvernement devrait donner suite à ces recommandations pour pallier le manque de main-d'oeuvre auquel fait face le Québec.

« C'est dommage que ces gens-là arrivent au Québec et n'ont pas toutes les possibilités de terminer les programmes », a-t-elle conclu.