Alors que les élèves s'apprêtent à reprendre le chemin des classes, la rentrée s'annonce difficile dans les écoles de la Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, où le nombre d'inscriptions explose. Dans l'ouest de l'île, des classes ont été aménagées dans toutes sortes de locaux pour répondre à la demande. Il s'agit de gérer la surpopulation engendrée entre autres par la construction de condos et l'immigration, selon la commission scolaire.

Des classes sur un terrain de basket

Au pavillon Saint-Germain de l'école Saint-Laurent, par exemple, on prévoit accueillir 670 élèves, en septembre, soit 170 de plus qu'il y a quatre ans. Quatre classes modulaires ont été ajoutées, au coût de 570 000 $, sur le terrain de basket de l'école. On a aussi aménagé des locaux dans une section du bâtiment autrefois occupée par une garderie, éliminé des casiers pour faire de la place et tracé des lignes jaunes au sol pour assurer la circulation des élèves. « On est à pleine capacité, affirme Dominic Bertrand, directeur général de la CSMB. On a tout agrandi ce qu'on pouvait agrandir par l'intérieur. On a même transformé des dépôts pour en faire des salles de classe. »

De 200 à 230 inscriptions par semaine

Depuis le 1er juillet, ce sont de 200 à 230 nouveaux élèves qui s'inscrivent chaque semaine à la CSMB. Vingt-cinq de plus par semaine que l'année dernière, qui était déjà une année record. « Du jamais-vu », assure Diane Lamarche-Venne, présidente de la commission scolaire, qui regroupe 85 écoles primaires et secondaires dans 7 arrondissements et 13 municipalités, de Verdun à Sainte-Anne-de-Bellevue, en passant par Outremont, Pierrefonds et Dollard-des-Ormeaux.

D'où viennent ces élèves ?

« Il y a plusieurs effets, répond-elle. Plein de monde déménage sur notre territoire pour toutes sortes de raisons : parce qu'on offre de meilleurs services, parce qu'on a des spécialisations, puis parce que le territoire se densifie. Si on se promène dans Saint-Laurent, on voit qu'on continue à construire des édifices de condos. Avant, on nous disait, non, non, non, il n'y aura pas d'enfants là-dedans, mais il y en a. Il y a aussi l'immigration normale. Beaucoup de Chinois, d'immigrants économiques. Puis, il y a les migrants. »

3200 migrants accueillis en cours d'année

L'an dernier, la CSMB a accueilli 3200 migrants en cours d'année scolaire et ne sait toujours pas ce que l'année 2018-2019 lui réserve. Il est quasi impossible de prévoir combien de nouveaux élèves vont s'inscrire et dans quel coin de Montréal ils vont s'installer. « Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'on a une période d'inscription qui va du mois de février au 30 avril, précise Mme Lamarche-Venne. Après ça, il y en a d'autres qui arrivent, qui déménagent. Le Ministère fait des prévisions pour en tenir compte. Mais nous, on les dépasse toujours depuis les 10 dernières années. » « Les prévisions sont basées sur les cartes d'assurance-maladie, ajoute M. Bertrand. Les 500 jeunes Syriens que nous avons reçus, il y a 18, 24 mois, n'étaient pas dans les chiffres. Pas plus que les 1000 demandeurs d'asile. Si on combine ces deux chiffres-là, on est à 1500 jeunes qui ne font pas partie des prévisions du Ministère. Et pour avoir des allocations, il faut démontrer que les jeunes sont là. »

115 classes de plus que prévu

Dans les 72 écoles primaires de la CSMB, il y avait, l'an dernier, 115 classes de plus que prévu. En prévision de la rentrée, la direction a fait installer 27 nouvelles classes modulaires dans ses écoles surpeuplées. Mais ces unités ne sont pas permises dans toutes les villes desservies par la commission scolaire. À Lachine, par exemple, elles sont interdites. La CSMB a dû aménager des classes temporaires chez les Soeurs de Sainte-Anne. Elle a aussi loué des locaux dans un centre hellénique de Saint-Laurent.

Pénurie d'enseignants

« On parle beaucoup d'enjeux de ressources matérielles, mais il y a des enjeux de ressources humaines incroyables, fait remarquer Dominic Bertrand. Auparavant, on utilisait uniquement des enseignants légalement qualifiés. Mais, là, c'est sûr qu'on doit baisser nos critères. En juin, on devait remplacer entre 275 et 350 enseignants chaque jour. C'est inquiétant. Mais la pression est énorme parce que nos résultats sont très bons. On est deuxième au Québec, en termes de diplomation, ce qui est exceptionnel dans un contexte où 82 % de nos jeunes sont issus de l'immigration. » Depuis plusieurs années, il y a une réelle compétition entre les commissions scolaires pour l'embauche d'enseignants, partout au Québec. Mais la situation est pire à Montréal, en raison notamment des ponts et des travaux routiers. De plus, plusieurs municipalités de la CSMB sont mal desservies par la STM.

Recrutement intensif

« On recrute partout en région, en Belgique, en France, on va dans tous les salons de l'emploi. Ce n'est pas d'hier qu'on fait ça, ça fait quelques années, on le voyait venir. Mais là, tout le monde est frappé », indique Mme Lamarche-Venne. L'an dernier, la commission scolaire a offert 40 postes permanents à de nouveaux enseignants, mais ceux-ci ont tous refusé. « On n'a pas réussi à faire signer un seul enseignant parce que, maintenant, les gens veulent savoir dans quelle école ils vont être et à quel niveau ils vont enseigner. Ils veulent aussi visiter la classe dans laquelle ils vont enseigner, dit-elle. On parle beaucoup d'enseignants, mais c'est la même chose pour les techniciens informatiques, les techniciens en bâtiment où on est peu compétitif par rapport aux villes qui offrent un salaire plus élevé, ajoute son collègue, M. Bertrand. On est constamment en train de recruter et de former du nouveau personnel. Ça aussi, ça a un coût pour une organisation. »

À la CSDM aussi

La situation n'est pas plus réjouissante à la Commission scolaire de Montréal (CSDM). En tout, 91 classes modulaires, réparties dans cinq arrondissements de la métropole, ont été installées cet été en prévision de la nouvelle année scolaire. La CSDM s'attend à recevoir 1800 nouveaux jeunes en classes d'accueil le 27 août. Sera-t-elle prête ? « Oui, assure le porte-parole Alain Perron. Les 91 unités préfabriquées correspondent à cinq écoles. On va en profiter pour désembourber les écoles qui sont à 130 % de leur capacité d'accueil et redonner accès à des bibliothèques qui avaient été transformées en classes. »

Photo Ivanoh Demers, La Presse

Diane Lamarche-Venne, présidente de la Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, et Dominic Bertrand, directeur général