Le premier ministre Philippe Couillard maintient sa volonté d'abolir les élections scolaires malgré la grogne dans la communauté anglophone.

La Presse révélait mardi que les opposants au projet du gouvernement parmi cette communauté ont de nouvelles munitions alors qu'un comité piloté par l'ancienne députée libérale fédérale, Marlene Jennings, recommande à Québec de maintenir le système actuel, avec quelques ajustements. 

M. Couillard reste ferme : les élections scolaires seront bel et bien abolies en dépit de l'avis de ce comité issu de la communauté anglophone et créé par quatre groupes opposés aux intentions du gouvernement (l'Association des comités de parents anglophones, le Quebec Community Groups Network et le Quebec Federation of Home and School Associations).

«Les taux de participation aux élections scolaires sont différents dans les deux communautés (francophone et anglophone), mais ils sont faibles dans les deux cas. Une démocratie qui ne s'exprime pas fortement est une démocratie moins forte», a plaidé M. Couillard. Aux dernières élections scolaires tenues en novembre dernier, le taux a atteint 17,26% dans les commissions scolaires anglophones, contre 4,85% dans les francophones.

Il n'est pas question pour le premier ministre de maintenir les élections pour les commissions scolaires anglophones ou encore de créer pour la communauté anglophone un système différent de celui des francophones. « On va essayer de trouver une solution qui s'applique partout de la même façon et qui respecte à la fois le besoin des communautés d'être représentés, je pense qu'il y a moyen de le faire correctement, et le désir de faire en sorte que le centre de gravité du système scolaire soit maintenant l'école, les enseignants et les parents », a expliqué le premier ministre.

La Presse a révélé des détails du plan du gouvernement en juin dernier. Il entend créer des conseils scolaires en lieu et place des commissions scolaires. Chaque conseil serait composé de 15 membres chacun, selon des documents qui circulaient au gouvernement ce printemps. Cinq postes seraient réservés aux parents. Ils seraient choisis parmi le comité de parents, dont les membres - un par école - sont élus à l'assemblée générale des parents, comme le veut la formule actuelle. 

Québec prévoit également réserver une place au sein du conseil scolaire à un représentant du monde municipal. Il y aurait aussi quatre membres provenant des milieux communautaire ou économique. Ils seraient élus par les conseils d'établissement des écoles. Ces mêmes conseils nommeraient les trois représentants des établissements: un directeur d'école, un enseignant et un membre du personnel professionnel. Enfin, deux postes seraient pourvus par cooptation. Ils seraient ainsi nommés par les autres membres du conseil scolaire, toujours selon les documents obtenus.

Le projet de loi est attendu cet automne, après un forum que tiendra le Parti libéral à la fin du mois sur le thème de l'éducation. L'important pour Philippe Couillard est d'accorder plus d'autonomie aux écoles, ce qui est également le souhait de la communauté anglophone selon lui. «Les Québécois et les Québécoises de langue anglaise, à juste titre, considèrent très importantes les institutions scolaires parce que pour eux c'est un facteur d'identité. Et bien sûr, on prend ça en considération. Mais ils veulent également comme tous les autres Québécois qu'on recentre le système d'éducation sur l'école, l'enseignant, les parents. On veut faire en sorte que le projet éducatif appartienne à l'école, que ça soit là que ça se passe. Et que l'organisme régional, commission scolaire ou autre, soit en soutien de l'école, et non pas l'inverse. (...) On est à l'année, à la charnière où enfin on va faire ce qu'on attend depuis longtemps.»

Des voix discordantes au sein de la communauté anglophone se sont fait entendre à la suite des révélations sur le contenu du rapport Jennings qui sera rendu public mercredi. Dans un communiqué, le Comité de pouvoir parental en gouvernance scolaire exprime son appui à l'idée d'abolir l'élection des commissaires au suffrage universel. Il accuse l'Association des commissions scolaires anglophones, qui s'oppose au projet du gouvernement, de n'avoir «ni le soutien politique ni la légitimité juridique pour représenter les contribuables anglophones du Québec». Et comme La Presse l'indiquait le mois dernier, les représentants anglophones de la Fédération des comités de parents du Québec (FCPQ), des personnes issues de deux des neuf commissions scolaires anglophones, ont soumis au comité Jennings un mémoire favorable à l'abolition des élections scolaires. Mais leur voix s'est avérée minoritaire.

Les commissions scolaires anglophones ont déjà signalé qu'elles sont prêtes à poursuivre le gouvernement s'il va de l'avant avec l'abolition des élections scolaires.