Les funérailles de l’astrophysicien et vulgarisateur scientifique québécois Hubert Reeves ont eu lieu ce mercredi à Paris. Des proches et des anonymes étaient venus par centaines pour rendre un dernier hommage à celui qui s’est éteint le 13 octobre à 91 ans.

Des milliers d’étoiles sur un semblant de ciel azur. Pouvait-il y avoir meilleur cadre pour dire adieu à l’un des plus grands amoureux de l’Univers ? Sous la voûte céleste de la salle de la Coupole, au cimetière du Père-Lachaise, à Paris, plusieurs centaines de personnes se sont réunies ce 25 octobre pour un dernier au revoir à l’astrophysicien Hubert Reeves.

Le vulgarisateur scientifique né à Léry, à l’ouest de Châteauguay, qui avait fait de la France sa seconde patrie, s’est éteint le 13 octobre dernier à l’âge de 91 ans. « Il souhaitait une cérémonie publique. Merci d’être si nombreux », a soufflé l’un de ses fils, Benoît, à l’assemblée de proches, de scientifiques – y compris l’ex-ministre de l’Enseignement supérieur français Sylvie Retailleau – et d’anonymes venus se presser dans cette enceinte où sont enterrés certains des plus grands artistes, auteurs, scientifiques et politiciens français.

  • Le chœur de choristes installé devant la voûte étoilée du crématorium du cimetière du Père-Lachaise a chanté Fix You lors de l’entrée du cercueil.

    PHOTO LOLA BRETON, COLLABORATION SPÉCIALE

    Le chœur de choristes installé devant la voûte étoilée du crématorium du cimetière du Père-Lachaise a chanté Fix You lors de l’entrée du cercueil.

  • Le fils d’Hubert Reeves, Nicolas, a prononcé un discours pendant les funérailles.

    PHOTO JULIEN DE ROSA, AGENCE FRANCE-PRESSE

    Le fils d’Hubert Reeves, Nicolas, a prononcé un discours pendant les funérailles.

  • Une personne place une rose sur le cercueil de l’astrophysicien.

    PHOTO JULIEN DE ROSA, AGENCE FRANCE-PRESSE

    Une personne place une rose sur le cercueil de l’astrophysicien.

  • Hubert Reeves souhaitait que ses funérailles soient publiques.

    PHOTO LOLA BRETON, COLLABORATION SPÉCIALE

    Hubert Reeves souhaitait que ses funérailles soient publiques.

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On n’aurait peut-être pas imaginé une reprise du groupe Coldplay pour l’entrée du cercueil en bois clair d’Hubert Reeves. Pourtant, ce sont bien les paroles de la chanson Fix You et son refrain si évocateur – « Lights will guide you home/And ignite your bones/And I will try to fix you » – qui ont accompagné ce moment, chantés par une cinquantaine de choristes tout de noir vêtus.

Une cérémonie pleine de musique, un art que le scientifique aimait tout particulièrement, avec la présence d’un quintette à cordes pour rythmer les prises de parole.

Je me souviens de mes 8 ans lorsque tu as posé un vinyle sur la platine. C’était la Symphonie n6, la Pastorale, de Beethoven. Ce moment suspendu m’a accompagné toute ma vie.

Evelyne Reeves

Hubert Reeves, c’est bien sûr, d’abord, l’astrophysique et la passion pour les atomes. « Ses yeux s’illuminaient quand il nous parlait du cosmos », se souvient son petit-fils. « Une passion contagieuse » transmise par celui qui avait « le désir ardent de rendre la science accessible à tous », résume Emmanuelle, l’une de ses petites-filles. Elle lui promet : « Nous ferons de notre mieux pour préserver ton œuvre en protégeant la nature et en cultivant notre curiosité. »

Une qualité qu’il a tenté de transmettre et de semer par-delà les frontières. Au Québec, où son empreinte reste ancrée chez les jeunes étudiants en astrophysique, à qui Hubert Reeves avait dédié une bourse. Mais aussi en France, où sa voix profonde et grave a longtemps résonné dans des conférences comme sur les ondes radio.

Pendant des décennies, Hubert Reeves a tenté de répondre aux questions existentielles qui nous taraudent.

L’Univers si grand autour de nous ne semblait alors avoir aucun secret pour lui. Pourtant, il restera toujours des mystères dans cette immensité pour les humains que l’astrophysicien et vulgarisateur scientifique aimait à appeler des poussières d’étoiles. « Hubert, tu as rendu la science aimable. Tu as ouvert aux étoiles la porte des maisons. Tu as marié le ciel et la terre dans la pensée humaine », a tenu à souligner l’un de ses proches.

Nathalie Jaouën a eu la chance de l’entendre lors d’une conférence il y a quelques années. Cette habitante de Reims n’a pas hésité une seconde à faire le trajet jusqu’à Paris pour rendre hommage à ce « grand pédagogue dont beaucoup de professeurs devraient s’inspirer, dit-elle. Il arrivait à parler d’astrophysique avec des mots simples, à nous fasciner. Je pourrais l’écouter des heures. »

Nino Roussel, fils de 18 ans de Mme Jaouën, partage cette admiration pour celui qui lui a « fait penser au père Noël » la première fois qu’il l’a vu. Il faut dire que sa longue barbe et ses cheveux blancs lui donnaient l’air presque magique de celui qui raconte le monde.

PHOTO LOLA BRETON, COLLABORATION SPÉCIALE

Jean-Baptiste Reddé a fait le déplacement depuis l’Yonne pour rendre hommage à Hubert Reeves.

Jean-Baptiste Reddé a, lui aussi, fait le déplacement de l’est de la France pour ces funérailles. Et il n’a pas fait les choses à moitié. Devant l’entrée du crématorium, il portait à bout de bras une pancarte de sa confection. On y lisait, en une explosion de couleurs vives : « Merci Hubert Reeves. »

L’homme originaire de l’Yonne, où Hubert Reeves et sa femme, la journaliste Camille Scoffier, avaient élu domicile dans les années 1990, a « eu la chance de le rencontrer plusieurs fois ». « C’était un homme engagé pour le vivant, pour nous, pour la nature. C’était un scientifique, un philosophe, un poète. Je voulais le remercier pour sa profondeur. »

Cet amour du vivant et cette volonté de préserver la planète contre nous, ses premiers prédateurs, ont animé la vie d’Hubert Reeves. En avance sur son temps, peut-être. Juste à l’heure pour prévenir les nouvelles générations, dont ses petits-enfants, de l’urgence climatique.

Jamais avare d’une « devinette ou d’une histoire drôle », il a marqué la Terre. Sa famille lui souhaite désormais « que Vega, Deneb et Altaïr [les trois étoiles qui forment le triangle d’été] se tiennent prêtes à [l’]accueillir ».