Un jeune joueur de soccer avec une plaie au visage et un ballon taché de sang. Un piéton et une cycliste défigurés après avoir été happés par le conducteur d’un véhicule automobile.

Lancée le mois dernier par la Ville de Gatineau, une nouvelle campagne choc vise à illustrer avec des images crues le prix payé par des citoyens à la suite d’excès de vitesse de la part de conducteurs d’un véhicule automobile.

« Le but est de faire prendre conscience aux automobilistes des conséquences désastreuses que peut avoir la vitesse sur la vie ou la sécurité des autres, particulièrement les usagers vulnérables, comme les enfants, les piétons, les cyclistes et les personnes à mobilité réduite », explique Jean Boileau, directeur des communications de la Ville de Gatineau.

Diffusée à la radio, à la télévision, sur les réseaux sociaux et dans la rue, la campagne a été créée en consultation avec le Service de police de la Ville de Gatineau, qui s’est focalisé sur des voies publiques où la sécurité est compromise en raison de problèmes récurrents de vitesse excessive.

Pour concevoir sa campagne, la Ville de Gatineau a aussi fait appel à des groupes de discussion composés d’automobilistes.

Ceux-ci ont signalé que la crainte de blesser ou de mettre en danger la vie des usagers de la route les plus vulnérables, dont des enfants, des cyclistes ou des personnes âgées, les incitait fortement à ralentir, plus encore que le risque de recevoir une contravention pour vitesse excessive.

Les effets de la campagne sur les comportements routiers seront mesurés afin d’évaluer sa portée, note M. Boileau. « Étant donné que la campagne vient tout juste d’être lancée, il est trop tôt pour en commenter les retombées », dit-il.

En plus de la campagne, la Ville de Gatineau note avoir installé au cours des dernières années plus de 700 balises flexibles de ralentissement pour rétrécir la largeur des rues, en plus d’ajouter 1500 bollards latéraux et 70 radars pédagogiques.

Faire des « rues complètes »

Sandrine Cabana-Degani, directrice générale de Piétons Québec, note que cette campagne de sensibilisation rappelle la campagne menée par la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) sur l’alcool au volant, qui montrait des accidents graves, et avait marqué les esprits il y a plusieurs années.

« On sait que des campagnes choc peuvent avoir un effet, si on n’en fait pas trop souvent » dit-elle.

Mme Cabana-Degani se réjouit de voir que le message envoyé dans cette campagne porte sur la nécessité de ralentir.

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Sandrine Cabana-Degani, directrice générale de Piétons Québec

« Les excès de vitesse, même petits, ont un impact sur la sécurité des usagers de la route les plus vulnérables, dit-elle. »

À 30 km/h, la personne happée a une probabilité de survie de 90 %. À 50 km/h, c’est seulement 25 % de probabilité de survie. Donc faire campagne sur la vitesse est un choix intéressant.

Sandrine Cabana-Degani, directrice générale de Piétons Québec

Cela dit, les campagnes de sensibilisation ont leurs limites, dit-elle. « C’est en misant surtout sur des interventions et sur des aménagements qu’on peut vraiment faire des gains. »

Par exemple, plusieurs organisations recommandent aux élus d’adopter une politique de rue complète (complete street en anglais), qui consiste à aménager des rues sûres et agréables pour tous les usagers, qu’ils soient jeunes, âgés, à mobilité réduite, et ce, peu importe le mode de transport choisi.

Plus il y a de déplacements motorisés, plus il y a de danger

Selon les experts, la dangerosité d’une voie publique pour les usagers les plus vulnérables augmente de concert avec la hausse des déplacements motorisés qu’on y enregistre. De 2016 à 2021, quelque 400 000 véhicules se sont ajoutés au parc des véhicules de la province, qui atteint aujourd’hui près de 7 millions de véhicules.

En 2021, 52 piétons sont morts après avoir été happés par le conducteur d’un véhicule automobile au Québec, une baisse de 21 % par rapport à la moyenne de 2016 à 2020, tandis que 16 cyclistes ont été tués, une hausse de 57 % par rapport à la moyenne de 2016 à 2020.

Selon la SAAQ, le nombre de blessures et de morts parmi tous les usagers de la route diminuerait fortement si chaque conducteur réduisait sa vitesse moyenne. « Nous verrions 12 décès en moins par année pour une réduction de 1 km/h, 60 décès en moins par année pour une réduction de 5 km/h, et 120 décès en moins par année pour une réduction de 10 km/h », a noté la SAAQ l’an dernier.

Vélo Québec encourage l’ouverture pivot pour éviter l’emportiérage

Rouler à vélo près d’une rangée de voitures stationnées peut exposer le cycliste à des risques d’emportiérage. Dans le but de prévenir ces situations qui peuvent entraîner des blessures graves et même la mort, Vélo Québec et la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) viennent de lancer une campagne pour promouvoir l’ouverture pivot, une façon simple pour les automobilistes d’adopter un comportement sécuritaire. Il s’agit pour l’occupant d’un véhicule d’ouvrir la portière avec la main la plus éloignée de celle-ci (main droite côté conducteur, main gauche côté passager). Ce mouvement oblige la personne à pivoter et à vérifier par-dessus son épaule si un cycliste est présent. Vélo Québec rappelle aux cyclistes de laisser au moins un mètre de distance entre eux et les voitures garées. « Depuis 2013, il y a eu pas moins de 1127 cas d’emportiérage à Montréal, note l’organisme. Les cas déclarés ne représentent que la pointe de l’iceberg, sans compter les nombreux cas d’emportiérage évités de justesse. »

Nicolas Bérubé, La Presse

PHOTO FOURNIE PAR VÉLO QUÉBEC

L’ouverture pivot consiste à ouvrir la portière avec la main la plus éloignée de celle-ci.

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  • 251 802
    Nombre de constats pour excès de vitesse remis aux conducteurs de véhicules automobiles au Québec par la Sûreté du Québec l’an dernier
    Source : Sûreté du Québec