Au moins 750 ménages au Québec risquent d’être à la rue le 1er juillet

« Je ne pensais jamais me retrouver dans cette situation-là », confie Yanick Midouin. La mère de famille monoparentale de Saint-Rémi, en Montérégie, n’avait toujours pas trouvé où se reloger avec sa fille adolescente, à l’avant-veille du 1er juillet. Comme au moins 750 ménages un peu partout dans la province, selon le FRAPRU. La Presse s’est entretenue avec deux personnes aux prises avec ce problème.

La vie s’annonçait légère pour Yanick Midouin, une femme de 52 ans, qui avait prévu déménager chez le père de sa fille le 1er juillet, en Montérégie. Une rupture inattendue, à un mois du déménagement, l’a laissée le cœur en miettes. C’était sans compter la difficulté — voire l’impossibilité – de trouver un logement abordable dans sa région.

« J’ai regardé les prix, et c’était toutes des constructions à 1200 $, 1300 $, 1400 $ par mois, dénonce Mme Midouin au bout du fil. Ça n’a pas de bon sens ! »

La mère de famille monoparentale d’une fille de 15 ans payait 730 $ pour son ancienne maison. Travailleuse autonome dans le domaine des assurances, avec un salaire annuel tournant autour de 30 000 $ par année, elle estime qu’avec un loyer de plus de 1000 $, « ça serait très difficile de joindre les deux bouts ».

Ça ne l’a pas empêchée de chercher, d’essayer, de frapper à toutes les portes (la Ville de Saint-Rémi, sa députée, l’Office municipal d’habitation), rien n’y a fait. À l’avant-veille du 1er juillet, elle ne sait toujours pas où sa fille et elle vont se retrouver.

« Je n’ai pas les moyens d’aller dans un hôtel, souffle-t-elle, la voix brisée. J’essaie d’être forte devant ma fille, je ne veux rien lui montrer. Je n’ai pas le choix. »

750 ménages toujours à la recherche d’un logement au Québec

Mercredi, environ 750 ménages accompagnés par des services d’urgence des municipalités à travers la province étaient toujours à la recherche d’un logement et risquaient de se retrouver sans logis, indique Véronique Laflamme, porte-parole du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU).

« Et ce n’est que la pointe de l’iceberg, le pâle reflet de la réalité, ajoute Mme Laflamme. Il y a des ménages qui ont trouvé un bail, mais qui ont dû changer de quartier, qui se sont retrouvés dans des logements insalubres, ou qui sont hébergés par de la famille ou des amis. »

Il s’agit aussi d’un bond majeur par rapport à l’an dernier, où 440 ménages s’étaient retrouvés dans la même situation au 1er juillet.

Le nombre des demandes d’aide d’urgence a par ailleurs explosé à travers la province, observe Mme Laflamme : « Les chiffres sont en hausse partout, il y a des villes où ça a même doublé. »

Sur la paille à 70 ans

« J’avais des amis qui regardaient pour moi, je cherchais dans les journaux ou sur l’internet : il n’y avait rien, raconte Nicole Desgreniers. Ou encore il y avait des logements, oui, des nouvelles constructions, des affaires à 1400 $ par mois. Je n’ai pas les moyens. »

La dame de 70 ans, résidante de l’Estrie depuis des décennies, s’est fait montrer la porte de son logement de Magog ce printemps, en raison de son chien. Mais pour la première fois de sa vie, trouver un nouveau logis s’est avéré beaucoup plus difficile que prévu.

À Magog, c’est épouvantable, les prix. C’est abracadabrant !

Nicole Desgreniers

Depuis deux ans, le manque de logement en région a aussi entraîné une augmentation importante des prix. « Les ménages se retrouvent aux prises avec la rareté et la spéculation immobilière, affirme Mme Laflamme. Et plus seulement dans les grandes villes. On a vu des opérations de rénovictions, de rachat de maisons de chambres abordables, dans des villes comme Trois-Rivières ou Sept-Îles. »

Nicole Desgreniers a finalement dû quitter l’Estrie pour déménager dans un logement appartenant à un ami de son fils à Sainte-Thérèse, dans les Laurentides. La bâtisse étant à vendre, il s’agit d’une solution temporaire, qu’elle paye tout de même 1100 $ par mois.

« J’ai travaillé toute ma vie et je me retrouve à un âge respectable dans une situation où je fais face à du capitalisme sauvage, analyse Mme Desgreniers. Les propriétaires ont le gros bout du bâton, et ils exagèrent ! »

Tant le FRAPRU que les services d’aide aux locataires de la province anticipaient un 1er juillet particulièrement difficile. Malheureusement, reconnaît Mme Laflamme, « la situation qu’on appréhendait autour de la période des déménagements s’avère ».

En savoir plus
  • 3,7 %
    Taux d’inoccupation des logements sur l’île de Montréal en 2021
    Source : Rapport sur le marché locatif de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL)
    1,1 %
    Taux d’inoccupation des logements en banlieue de Montréal en 2021
    Source : Rapport sur le marché locatif de la SCHL