Jean-Pierre Brunelle s’est retrouvé en plein cœur d’un vol à main armée, dans le cadre d’une vague qui secoue des dizaines de boutiques de téléphones cellulaires depuis deux mois. L’un des cambrioleurs a appuyé son arme si fort dans son dos que le client doit suivre des traitements de physiothérapie. Il a demandé une compensation auprès du programme d’Indemnisation des victimes d’actes criminels (IVAC).

M. Brunelle s’est rendu à la boutique Telus de la rue Masson, le 12 mai dernier, pour comprendre les fonctionnalités de son nouveau téléphone. La porte était verrouillée en raison des nombreux vols survenus dans la grande région de Montréal, mais une employée lui a ouvert grâce à sa clé. En refermant, elle n’a pas verrouillé la porte.

« J’étais au comptoir du fond et je faisais dos à la porte. À un moment, j’ai entendu la porte s’ouvrir. La vendeuse a demandé aux deux jeunes s’ils venaient pour acheter un téléphone, mais j’ai senti son visage changer. En me tournant, j’ai vu qu’ils tenaient chacun une arme à feu », raconte M. Brunelle.

Les deux voleurs, le visage caché par un masque chirurgical, ont demandé à l’employée et au client de se diriger vers l’arrière-boutique du magasin. Ils ont ordonné à la vendeuse d’ouvrir le coffre-fort et au client de se coucher au sol. Ils s’exprimaient en français.

L’un d’eux avait son canon sur mon omoplate et son genou dans le bas de mon dos. L’autre mettait les téléphones dans son sac.

Jean-Pierre Brunelle

« À un moment donné, ça me faisait mal et je me suis décidé à lui demander : ‘‘Peux-tu juste tasser ton canon ?’’ Le gars, avec un brin de sympathie, a tassé son canon sur le côté de mon épaule. C’était vraiment une arme en métal », souligne M. Brunelle.

L’homme, nouvellement retraité, s’est remis de ses émotions, mais il admet qu’il a craint que le bandit fasse un faux mouvement et lui tire dans le dos pendant le braquage. Il ne souffre pas de choc post-traumatique, mais de maux de dos à la suite du vol.

« Ma colonne est correcte, je ne suis pas inquiet. Mais ma massothérapeute m’a dit que j’ai probablement un nerf coincé et que ça va se replacer en faisant quelques exercices. »

Il y a une dizaine de jours, l’homme a effectué une demande d’indemnisation auprès de l’IVAC appuyée par les images des caméras de la boutique et le rapport de police qu’il a rempli. Il attend la décision.

L’IVAC affirme qu’elle n’a pas reçu d’autres demandes d’indemnisation de clients ou d’employés de boutiques de téléphones cellulaires dans les derniers mois.

Épidémie de braquages

Depuis la mi-avril, La Presse a recensé plus de 20 vols à main armée survenus dans des boutiques de téléphones cellulaires de Vaudreuil, Joliette, Repentigny, Boisbriand et Salaberry-de-Valleyfield, pour n’en nommer que quelques-uns.

Les voleurs, cagoulés et armés, ne s’intéressent pas à l’argent dans les caisses, mais au nouvel iPhone Pro Max qui vaut 1550 $. Ils visent toutes les enseignes, que ce soit Bell, Vidéotron, Rogers…

Or, une fois que les téléphones sont déclarés volés, ceux-ci ne peuvent pas être activés au Canada puisqu’ils sont inscrits sur la liste noire de l’Association canadienne des télécommunications sans fil.

« L’enquête est en cours, mais l’explication [selon laquelle] les téléphones sont destinés à l’outre-mer est plausible », affirme l’agente Mélanie Mercille, porte-parole du Service de police de l’agglomération de Longueuil (SPAL). Deux vols sont survenus récemment sur le territoire du SPAL.

Depuis la fin du mois d’avril, les policiers de Saint-Jérôme, de Montréal et de Lévis sont parvenus à arrêter 11 suspects, âgés de 15 à 23 ans, mais les vols se sont poursuivis. « Il n’y a pas eu de nouvelles accusations. L’enquête est toujours en cours », affirme Mariane Allaire Morin, agent-relationniste médias du Service de police de la Ville de Montréal.