(Montréal) Le déconfinement qui se poursuit progressivement a beau générer un sentiment de lent retour à la normale, l’organisme Banques alimentaires du Québec constate toujours une hausse du recours à ses services et craint que la situation ne dure pendant encore plusieurs mois.

« L’économie est au ralenti. Les programmes gouvernementaux vont être modifiés. On sait aussi qu’il y a […] des gens qui mettent de l’argent sur leur carte de crédit, qui repoussent leurs paiements d’hypothèque, qui essaient de retarder une visite à la banque alimentaire », a résumé la directrice générale, Julie Marchand.

« C’est tout ça ensemble qui fait qu’on se prépare à une augmentation additionnelle [du recours] à l’aide alimentaire. »

Depuis la mi-mars, Banques alimentaires du Québec a distribué l’équivalent de 40 millions à ses membres, soit 21 millions en dons monétaires et plus de 3,2 millions de kilos de denrées alimentaires, d’une valeur de 19 millions.

Selon les données de Statistique Canada, près d’un Canadien sur sept a déclaré vivre dans un ménage en situation d’insécurité alimentaire pendant la pandémie, alors qu’en temps normal, on estime que c’est plutôt une personne sur dix.

« 8 % des gens qui ont perdu leur emploi dans le cadre de la COVID sont en situation d’insécurité alimentaire, a dit Mme Marchand. C’est quand même beaucoup. »

Banques alimentaires du Québec a constaté une hausse de 50 % des quantités de denrées distribuées par ses membres Moisson, en avril seulement. Mme Marchand estime que la demande demeure actuellement supérieure d’environ 30 % à la normale.

L’organisme craint maintenant que les effets de la pandémie et le ralentissement économique qui l’accompagne ne se fassent sentir pendant encore 12 ou 24 mois.

« Il ne faut pas croire que c’est un coup à donner et que c’est réglé pour l’aide alimentaire, a dit Mme Marchand. Si ça perdure, ça va perdurer dans le temps. Ce n’est pas revenu à la normale. Si on en rajoute encore à ça, ça commence à être lourd pour le système. C’est structurel. »

Arrivée en poste depuis peu, Mme Marchand se réjouit de constater que « le réseau fonctionne » et qu’on a réussi à répondre à la demande « dans un contexte pas facile ».

Reste maintenant à voir ce qui arrivera si, comme le craint l’organisme, les temps difficiles sont là pour rester.

« On a eu un élan de générosité sans précédent, a conclu Mme Marchand. Vraiment, ça a été extraordinaire. On est “correct”. Ce qui nous inquiète, c’est une augmentation additionnelle qui [perdure], et c’est là qu’on risque d’avoir encore besoin d’aide pour pouvoir répondre à la demande. »