Les milliers de réfugiés et demandeurs d'asile arrivés au Canada bénéficient dorénavant de tous les soins de santé gratuits dont ils pourraient avoir besoin, une couverture qui avait été considérablement diminuée par les conservateurs.

Le gouvernement libéral de Justin Trudeau a ainsi rétabli dans son intégralité le programme universel rogné en 2012 par le précédent gouvernement conservateur. La mesure est entrée en vigueur vendredi, 1er avril.

«C'est un bon jour pour ceux qui fuient la persécution», s'est exclamé le docteur Med Rashid, directeur médical de la clinique Crossroads, à Toronto, qui avait mené la lutte contre les coupes infligées par l'ancien gouvernement.

Mais selon le docteur Rashid et plusieurs autres, il reste encore beaucoup de travail à faire pour s'assurer que les réfugiés et demandeurs d'asile aient accès à tous les soins dont ils ont besoin.

Entre autres, les libéraux doivent s'assurer d'informer tous les intervenants sur le rétablissement de la couverture, parce que pour l'instant, les signaux sur ce plan ne sont pas encourageants, selon le docteur Philip Berger, directeur du programme de santé des quartiers défavorisés à l'Hôpital St. Michael's de Toronto.

«Tous les médecins et les réfugiés en particulier qui sont au courant de ces changements sont profondément reconnaissants de la décision morale, correcte et juste qu'a pris le gouvernement fédéral libéral», a-t-il soutenu.

«Malgré cela, le bilan du gouvernement pour communiquer ces changements aux professionnels de santé de première ligne dont les médecins, aux hôpitaux, aux signataires d'entente de parrainage, aux groupes de parrainage privé, est épouvantable», a-t-il ajouté.

Le programme universel couvre les coûts des soins de santé de base et les services supplémentaires tels que les soins dentaires et oculaires pour les réfugiés et demandeurs d'asile qui ne sont pas admissibles aux plans de santé provinciaux ou qui n'ont pas d'assurance privée.

Il avait été lancé en 1957, mais le gouvernement conservateur avait décidé de le réviser pour économiser des coûts et s'attaquer aux demandeurs «factices» qui viendraient au pays seulement pour recevoir des soins de santé.

Les conservateurs avaient créé une douzaine de types de programmes, allant de la couverture complète pour les réfugiés parrainés par le gouvernement à la prestation de services d'urgence pour les demandeurs provenant de certains pays seulement.

Plusieurs médecins ont d'ailleurs baissé les bras devant cette grille complexe. Un sondage mené en 2014 dans 94 cliniques sans rendez-vous a démontré que 45 pour cent des médecins à Montréal et 47 pour cent de ceux à Toronto avaient soit facturé un honoraire, soit refusé tous les patients - même ceux qui sont couverts complètement.

«C'est merveilleux que le gouvernement adopte les changements pour que tout le monde ait accès à la couverture fédérale, mais nous nous inquiétons qu'en pratique, les mêmes problèmes soient là», a souligné Janet Cleveland, qui coordonne la recherche sur les soins de santé des réfugiés au Sherpa, un institut de recherche affilié à l'Université McGill.

Nancy Chan, une porte-parole pour le ministère de l'Immigration, a affirmé que les informations sur le nouveau programme étaient sur le site Internet et que les administrateurs des réclamations pouvaient également offrir des précisions.

Le fait que tous les réfugiés et demandeurs soient admissibles à la même couverture signifie que le programme est plus simple à gérer et qu'il ne devrait pas accuser de retards, selon la porte-parole.

«Avec ce rétablissement, nous nous assurerons que les réfugiés puissent accéder à tous les services selon leurs besoins de santé, pas selon l'étape de leur application ou selon la catégorie d'immigration à laquelle ils appartiennent», a-t-elle écrit dans un courriel.

Depuis l'élimination du programme universel, certains réfugiés et demandeurs d'asile se retrouvaient pratiquement sans couverture médicale dans certains cas. Cette décision avait soulevé l'indignation dans certains milieux et donné lieu à des contestations judiciaires, qui ont toutes été perdues par Ottawa.

En première instance, la Cour fédérale avait statué que la loi violait la Charte des droits et libertés, surtout concernant les enfants.

«Refuser une couverture d'assurance-santé à des enfants innocents pour s'en prendre au comportement de leurs parents et d'autres est incohérent et injuste (...) Cela constitue un traitement cruel et rare», avait écrit la juge Anne Mactavish.