Un peu plus de deux ans après la catastrophe ferroviaire qui s'est imposée dans leurs vies, les citoyens de Lac-Mégantic ont choisi hier d'élire Jean-Guy Cloutier à la mairie. Ils ont aussi dit au revoir à Colette Roy Laroche, qui les représentait à l'hôtel de ville depuis 2002, et qui avait annoncé en août son intention de quitter la politique municipale.

Jean-Guy Cloutier obtient le mandat de représenter les Méganticois pendant deux ans; dans le tumulte du 7 juillet 2013, les élus en place avaient obtenu l'autorisation de prolonger leur mandat de deux ans, mais les candidats choisis hier auront à se représenter en 2017, afin de respecter le calendrier des élections municipales dans la province.

Dans le triste et sombre épisode du déraillement d'un train qui a emporté 47 personnes, Colette Roy Laroche avait émergé comme un phare. La mairesse avait été présente sur toutes les tribunes, elle avait touché et impressionné ses concitoyens, qui accouraient vers elle dans les rues onduleuses de leur ville pour lui demander des autographes, témoins de sa stature devant la tragédie.

Mais voilà, après deux années éprouvantes à soutenir sa ville à bout de bras, à se battre pour resserrer la règlementation dans le milieu ferroviaire, à reconstruire un centre-ville et à essuyer des critiques, aussi, Colette Roy Laroche a choisi de tirer sa révérence.

Son successeur, qui a été maire de Lac-Mégantic de 1985 à 1989 et qui a fait carrière dans le domaine de la construction, a été préféré à son opposant, Pierre Deschamps, par les électeurs.

«On va travailler fort, de 50 à 60 heures par semaine, pour aligner l'économie de la ville», a réagi le nouveau maire, en entrevue avec La Presse hier soir. Sa liste de priorités est musclée: produire le budget de la ville dans le prochain mois, réduire les dépenses, s'attaquer à la dette municipale et redresser la situation financière de la municipalité à moyen terme.

Resteront donc à gérer les expropriations de résidants pour la reconstruction du centre-ville, les poursuites judiciaires contre Montreal, Maine and Atlantic (à qui appartenait le convoi qui a explosé), l'évaluation, en cours, de l'éventuelle mise sur pied d'une voie de contournement pour ne plus que les trains traversent le centre-ville de Lac-Mégantic.

«On va aller rapidement dans le dossier de la rue Frontenac, le futur centre-ville, pour voir ces dossiers-là, pour savoir comment on peut corriger ça, ou s'il vaut mieux que ça reste de même», a lancé le maire, qui a retrouvé l'appel de la politique quelque part dans les contrecoups de la catastrophe ferroviaire. «Je ne serais probablement pas revenu s'il n'y avait pas eu la tragédie, parce que Mme Laroche serait encore en poste. Et je ne serais pas allé contre elle», a-t-il dit, dans un élan de reconnaissance qu'apporte rarement la politique.

Pour la santé et la famille

Colette Roy Laroche quitte la vie publique après 37 ans d'engagement au niveau scolaire et 13 ans comme mairesse. «La somme de travail exigée à la mairie, particulièrement au cours des deux dernières années, et la maladie et le décès de mon mari au cours de la dernière année me dictent de ralentir, de prendre du repos, de penser à ma santé et à ma famille», avait-elle déclaré en août pour expliquer sa décision.

Son mari, Yvan Laroche, a succombé à un cancer en février 2015, sept mois après avoir reçu le diagnostic. La mairesse a aussi perdu deux cousins, Éliane Parenteau et Jean-Pierre Roy, dans la tragédie ferroviaire.

Cinq des six collègues conseillers de la mairesse l'ont suivie dans sa décision de se retirer de la vie politique. Vendredi dernier, trois conseillers ont été élus par acclamation. Hier, les candidats Jasmin Brière, dans Fatima, Pierre Mercier, dans Centre-Ville, et Jean Bilodeau, dans Québec-Central, étaient élus ou en avance.

Colette Roy Laroche a longtemps milité pour que ses collègues féminines participent à la chose publique. Celle dont l'excellence sur la scène municipale a été reconnue par le prix Francine-Ruest-Jutras et l'Ordre du Québec, qui l'a faite chevalière en 2014, a laissé le milieu municipal alors que 30% des élus et 17,3% des maires sont des femmes.