Les compagnies minières verseront «beaucoup moins» de redevances cette année à Québec, alors qu'elles n'en paient déjà que peu ou pas du tout à l'heure actuelle.

Le ministre délégué aux Ressources naturelles, Serge Simard, a indiqué hier qu'en raison de la crise économique, «l'effervescence dans le secteur minier a diminué», ce qui entraînera une baisse des redevances versées à l'État pour l'exploitation des ressources du sous-sol québécois. La crise n'explique pas tout, puisque les règles actuelles permettent déjà à plusieurs entreprises de ne payer aucun droit minier.

 

L'an dernier, malgré une conjoncture favorable, seulement trois entreprises productrices ont versé des redevances, qui ont totalisé 94 millions de dollars, a révélé le Vérificateur général Renaud Lachance, plus tôt ce mois-ci. Ce sera «beaucoup moins» cette année, a dit le ministre Simard, refusant d'apporter des précisions.

Toujours selon le rapport du vérificateur général, entre 2002 et 2008, 14 entreprises n'ont versé aucune redevance à l'État, même si la valeur brute de leur production a atteint 4,2 milliards de dollars. Les autres sociétés ont payé 259 millions en droits miniers, ce qui représente seulement 1,5% de la valeur brute de leur production.

Les entreprises sont pourtant tenues de payer des droits qui correspondent à 12% de leur «profit minier». Mais Québec a créé toutes sortes de mesures et d'allocations, ce qui permet à bien des sociétés de ne verser aucune redevance.

Serge Simard préfère souligner que le Québec est «le paradis de l'investissement au niveau minier selon l'Institut Fraser».

Québec a donné à cette industrie des avantages fiscaux et crédits d'impôts évalués à 137 millions de dollars en 2008 (624 millions entre 2003 et 2008), beaucoup plus que ce qu'il a reçu en droits miniers. «Il y a des avantages fiscaux parce que ça coûte très cher d'installer une mine», a expliqué M. Simard.

Selon lui, les retombées économiques de l'industrie minière sont importantes. «Ça crée de l'emploi dans les régions.» Le nombre d'emplois dans ce secteur a diminué de 17% entre 1997 et 2007, a toutefois révélé le Vérificateur général.

Serge Simard planche sur une nouvelle «stratégie minière». «On va continuer à faire le travail pour que l'ensemble des Québécois aient les retombées qu'ils doivent avoir «, a-t-il affirmé, refusant de préciser si le gouvernement allait revoir ses règles pour exiger plus de redevances.

«On va faire le travail (...) pour que les mines continuent à créer de la richesse pour l'ensemble des Québécois. Et on va s'assurer aussi qu'on est compétitif, tout en respectant l'environnement», a-t-il affirmé.

Les écologistes veulent une enquête publique

Selon les écologistes, les conclusions du vérificateur général devraient inciter le gouvernement à lancer une enquête publique, ou à tout le moins une vaste audience publique sur la gestion des mines.

Pour le chanteur Richard Desjardins, la gravité des constats du vérificateur milite pour la tenue d'une enquête indépendante, tandis que pour une coalition de groupes réunis sur le thème «Pour que le Québec ait meilleure mine», une audience générique du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement suffirait.

«Le vérificateur a confirmé nos appréhensions, précise Christian Simard, directeur de Nature Québec. Nous pensons donc qu'il est temps de mettre sur pied une audience générique du BAPE ou une commission indépendante comme il y en a eu une sur la forêt (Commission Coulombe).»

Cet appel survient à un moment critique pour l'industrie minière. D'abord parce que l'on attend toujours la première stratégie gouvernementale du secteur minier, promise pour 2007, ensuite parce que le vaste projet de mine en milieu urbain Osisko déchaîne actuellement les passions en Abitibi.