Le projet de loi instituant des élections générales à date fixe a été entouré d'un grand battage publicitaire lors de son adoption, il y a deux ans, mais il comporte une échappatoire susceptible de permettre la tenue d'élections anticipées.

Un des plus grands constitutionnalistes au pays soutient que si le premier ministre Stephen Harper déclenchait des élections anticipées, il romprait son engagement envers le Parlement, mais ne violerait pas la loi.

C'est qu'une disposition de cette loi, la toute première, stipule que rien, dans cette section, n'affecte les pouvoirs du gouverneur général, y compris celui de dissoudre le Parlement. Or, la tradition parlementaire veut que le gouverneur général ne dissolve le Parlement qu'à la demande du premier ministre, souligne Ned Franks, professeur émérite à l'Université Queen's, à Kingston, en Ontario.

En mai 2005, M. Harper présentait la législation sur les élections à date fixe comme une réforme démocratique qui s'imposait, et qui devait empêcher les leaders de manipuler le calendrier électoral à des fins partisanes. Mais dans ce même discours, il semblait avoir déjà l'échappatoire dans sa mire. Il avait assuré vouloir faire fonctionner ce parlement minoritaire pendant les trois prochaines années, «à moins que nous ne soyons défaits ou empêchés de gouverner». C'est la portion «empêchés de gouverner» qui semble alimenter les plus récentes rumeurs d'élections.

Les conservateurs ont laissé entendre ces derniers jours que M. Harper est prêt à se rendre chez la gouverneure générale, Michaëlle Jean, pour réclamer la dissolution du Parlement - et entrer en campagne - avant même la reprise des travaux aux Communes, le 15 septembre. Selon eux, M. Harper estime que le Parlement n'est plus fonctionnel et qu'une élection est requise pour rétablir la situation.

M. Harper a besoin d'une excuse pour ne pas tenir compte de sa propre législation sur la date des élections, dit M. Franks. Comme il s'est engagé à des élections à date fixe aux quatre ans, il lui faut trouver un prétexte plausible lui permettant de déclencher une élections plus tôt, note l'universitaire. «C'est purement et simplement pour sauver la face», ajoute-t-il.