Le carnaval de Rio a atteint son apothéose dimanche soir avec les premiers défilés des grandes écoles de samba de la ville, annoncés par une explosion de feux d'artifice et des centaines de percussions, un spectacle diffusé par les télévisions dans le monde entier.

Dans la nuit, sept des treize meilleures écoles de samba de Rio devaient présenter tour à tour devant 72 500 spectateurs privilégiés leurs costumes extravagants, leurs percussions assourdissantes, leurs chars monumentaux et leurs «passistas» (danseuses) à peine couvertes de quelques paillettes.

La première école à défiler a été «Renascer» qui a choisi de rendre hommage à l'artiste plastique Romero Britto, un peintre et sculpteur du nord-est considéré comme une icône de la culture pop mondiale.

Dans la nuit de lundi à mardi, six autres écoles défileront sur la «Passerelle de la samba» (vrai nom du sambodrome), une avenue de 700 mètres bordée de gradins à ciel ouvert et de loges pour VIP, comme par exemple la chanteuse Jennifer Lopez qui devait assister aux défilés dimanche.

Inauguré en 1984, le Sambodrome, conçu par l'architecte Oscar Niemeyer aujourd'hui âgé de 104 ans, a retrouvé son dessin original: il a été agrandi de 12 500 places et des rampes d'accès pour handicapés et des ascenseurs ont été construits. Son éclairage et son acoustique ont été améliorés.

Pour défiler, les treize écoles ont choisi d'aborder les thèmes les plus variés: hommages à la région pauvre du Nord-est, célébrations de peintres, d'écrivains ou de musiciens brésiliens. Elles se disputeront le titre convoité de «championne du carnaval», une compétition suivie avec la même passion que les grands matches de football.

Chaque école comprend entre 3000 à 5000 danseurs, souvent issus des favelas (bidonvilles). Les écoles ont dépensé jusqu'à 5 millions de dollars pour préparer le défilé, autrefois largement financé par la mafia des jeux clandestins mais de plus en plus parrainé aujourd'hui par de grandes marques.

Sans attendre ces deux nuits d'apothéose, le carnaval populaire a déjà envahi les rues du Brésil.

Samedi, sous un soleil de plomb, le défilé «Cordao da Bola Preta» a entraîné plus de deux millions de fêtards sur l'avenue Rio Branco, au coeur de la ville, qui ont chanté et dansé la samba dans une ville désormais plus sûre après la pacification des favelas les plus violentes.

Quelque 12 000 policiers ont été mobilisés pour assurer la sécurité à Rio, choisie pour accueillir les jeux Olympiques de 2016.

Ce spectacle qui donne du travail à 250 000 personnes rapportera 640 millions de dollars aux coffres de la ville. Quelque 850 000 touristes, dont 250 000 étrangers, ont rempli les hôtels de la ville.

Mais les écoles de samba de Sao Paulo, la capitale financière du Brésil, rivalisent de plus en plus en luxe avec celles de Rio.

Elles ont commencé leurs défilés dans la nuit de samedi à dimanche et l'école la plus applaudie a été celle des «Gavioes da Fiel», qui appartient au club de football des Corinthians, a retracé le parcours du très populaire ex-président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva, 66 ans, enfant pauvre du nord-est devenu ouvrier, syndicaliste puis chef de l'État.

Mais à l'image de Rio, c'est tout le Brésil, un pays de 191 millions d'habitants et aujourd'hui la sixième économie du monde, qui s'arrête pendant une semaine, emporté du nord au sud par la folie du carnaval, une tradition de plus de 150 ans.